
33.| P H Y S I O L O O I E
autre saison pour vivre isolé que pour se rassembler en troupeaux, ou
pour faire des provisions.
Et comment expliquer, dans la supposition d'un instinct général,
que les divers instincts n’existent pas seulement séparés dans les différentes
espèces d’animaux, mais que plusieurs d’entre eux sont même
contradictoires?
On a donc tort de considérer l ’instinct comme une force générale, et
de vouloir expliquer parelle touslesactes des animaux, quelque opposés
qu’ils soient. Il est par conséquent absolument impossible de trouver un
organe unique de l’instinct; et les efforts que l ’on a faits pour y parvenir,
durent être infructueux. De semblables expressions ne servent qu’à
se donner à peu de frais l’air d’un profond savoir, à se tirer de toutes
les difficultés au moyen d’une faculté occulte, et à se dispenser de
toute recherche pénible.
Y a-t-il autant d’instincts que de forces fondamentales? La dénomination
instinct ne désigne-t-elle que l’activité de ces mêmes forces
fondamentales?
La propagation, l’amour de la progéniture, l’amitié et l’attachement,
le mariage ou le célibat, l’état de société ou d’isolément, la propre
défense ou l’amour des combats, se nourrir de chair ou de substances
végétales, faire des provisions, la circonspection et la précaution
de placer des sentinelles, le choix d’un lieu déterminé pour sa demeure,
l’émigration, le chant, la construction, etc-, dérivent d’autant de
qualités fondamentales, sont autant de dispositions primitives, et toutes
deviennent des instincts, du moment, où , par leur activité, ils font
éprouver à l’animal un désir , un besoin , une impulsion intérieure en
vertu de laquelle il est poussé à agir.
La dénomination instinct convientdoncà toutes les forces fondamentales
, et il doit exister autant d’organes pour les instincts, qu’il existe
de forces fondamentales. Ceci explique très-naturellement comment un
animal peut être doité de tel instinct et être privé de tel autre ; l’on
peut dire que tous les animaux agissent par instinct, quoique leurs
actes soient très-différens et quelquefois même opposés.
Maintenant examinons la question, si dans la manifestation de leurs
forces fondamentales les animaux obéissent toujours à une impulsion
aveugle ; s’ils agissent exclusivement par instinct, ou s’ils ont la conscience
de leurs penchans et de leurs facultés ; s’ils modifient leurs
instincts par l’idée claire d’un but et des moyens qu’ils employent
en d’autres termes, s’il faut leur accorder l’intelligence, l’entendement.
; Si les animaux n’agissoient que par un instinct aveugle, leur manière
d’agir devrait être constamment uniforme; l’expérience, l ’influence
des objets extérieurs devraient être impuissantes pour les Lire dévier le
moins du monde de leur ornière habituelle ; leurs actes et l’ordre
danslequel ceux-ci se succèdent, devraient, être soumis au calcul comme
la marche d’une machine, c’est ce qu’en effet l’on soutient ordinairement;
mais l’expérience nous apprend le contraire.
En même temps que le loup évente un troupeau enfermé dans
un parc, la sensation du berger et du chien lui est rappelée par la
mémoire, et balance l’impression actuelle qu’il reçoit par les moutons-
il mesure la hauteur du parc, il la compare avec ses forces; il juge de la
difficulté de la franchir lorsqu’il sera chargé de sa proie, et il en conclut
l ’inutilité ou le danger de la tentative. Cependant au milieu d’un troupeau,
répandu dans la campagne, il saisira un mouton, à la vue même
du berger, surtout si le voisinage du bois lui laisse l ’espérance de s’y
cacher avant d’être atteint. Il mine le parc ou la bergerie lorsqu’il ne
trouve point d’autre moyen pour y pénétrer. Il ne faut que très-peu
d’expérience au loup pour apprendre que l’homme est son ennemi,
et qu’il doit redouter ses pièges. Aussi est-il toujours sur ses gardes!
Plus il avance en âge, plus il a couru de dangers, plus il est méfiant.
Les loups unis chassent ensemble, et le secours qu’ils se prêtent
rend la chasse plus facile et plus sûre. S’il est question d’attaquer un
troupeau, la louve va se présenter au chien , qu’elle éloigne en se faisant
poursuivre, pendant que le mâle insulte le parc et emporte un mouton
que le chien n’est plus à portée de défendre. S’il faut attaquer quelque
bête fauve, les rôles se partagent en raison des forces: le loup se met en