
rant ses accès de manie , montroit une facilité rare pour la versification,
quoiqu’elle eût été antérieurement occupée d’un travail manuel, et
que son entendement n’eût jamais été fécondé par la culture' ».
L ’on sait que le Tasse faisoit ses plus beaux vers jiendant ses accès
de manie. Combien de fois les poètes né sont-ils pas dans la nécessité
de provoquer l’inspiration par des boissons spiritueuses dont ils font
usage .jusqu’à s’enivrer ou se plonger dans une espèce de manie ?
J’ai déjà parlé ailleurs d’un certain Leon , de Vienne, qui pendant les
accès d’une fièvre nerveuse, faisoit des vers dans le genre de Klopstock.
Siège et apparence extérieure de l'organe dont le grand
développement produit le talent de la poésie.
Le premier poète qui me frappa parla forme de sa tête., fut l’un de
mes amis , qui souvent, au moment où l’on s’y attendoit le moins, im-
provisoit des vers de circonstance, et s’étoit fait par là une espèce de
réputation, quoique ce fût, du reste, un homme fort médiocre. Son
front, à partir du nez, selevoit d’abord perpendiculairement, puis
reculoit en fuyant, et s’étendoit beaucoup latéralement, comme si l’on
y avoit ajouté une côte de chaque côté. Je me rappelai avoir remarqué
la même forme de tête dans le buste d’Ovide. Chez d’autres poêles, je
ne trouvai pas, à beaucoup près, toujours ce front d’abord perpendiculaire
et puis fuyant. De sorte que je regardai cette forme du front
comme accidentelle. Mais chez tous, je remarquai ces proéminences
dans la partie antérieure-latérale de la tête, au-dessus des tempes. Je
commençai donc dès-lors à regarder ces proéminences comme la
marque distinctive du talent poétique. Cependant, je n’en parlai à mes
auditeurs qu avec le ton du doute, et cela d’autant plus, qu’à celte
époque je n etois point convaincu encore que le talent poétique fût
une faculté fondamentale. J’attendois, pour me décider, que j’eusse
recueilli un plus grand nombre d’observations. 1
1Ibidem, § ia5, p. m 'e t 112.
Peu après, j ’acquis la tête du poète Alxinger,. dans laquelle cette
partie cérébrale, ainsi que l’organe de l’attachement, sont très-déve-
loppés, tandis que les autres organes ne le sont que foiblement.Un peu
plus tard, mourut le poète Jünger; je trouvai encore à sa tête les mêmes
protubérances. Je vis cependant ces parties cérébrales plus fortement
développées encore chez le poète Blumauer, qui y réunis-oit l’organe
de l’esprit caustique. A cette époque, Wilhelmine Maisch se fit, à
Vienne, une réputation par ses poésies; je lui trouvai les mêmes protubérances
très-prononcées au-dessus des tempes. Je trouvai la même
organisation chez madame Laroche, à Offenbach , près Francfort,
chez Angélique Kauffmann, chez Sophie-Clémentine de Merken, chez
Klopstock , chez Schiller, dont je possède le plâtre, nous la trouvâmes
aussi très-marquée chez Gessner, à Zurich.
Lorsqu’à Berlin je parlai de cet organe dans mes cours publics, mettant
toujours encore beaucoup de réserve dans tout ce que j ’en disois,
M,. Nicolai nous invita, M. Spurzheim et moi, à aller voir une collection
d à-peu-près trente bustes de poètes qu’il possédoit. A notre très-
grande joie, nous trouvâmes dans tous la région indiquée plus ou
moins saillante, selon le talent plus ou moins prononcé de chaque
poète. *
Depuis ce moment, j’enseignai hardiment que, quelque invraisemblable
que paroisse cette assertion, il faut admettre un organe particulier
du talent pour la poésie, et que par conséquent le génie poétique
suppose une faculté fondamentale propre.
Toutes les observations que j ’eus l’occasion de faire plus tard, confirmèrent
cette idée, et maintenant je soutiens, sans balancer, qu’il
na jamais existé de poète, et qu’il n’en existera jamais, chez lequel les
parties cérébrales indiquées ne soient très-développées.
A Paris, je moulai, après sa mort. la tête de Legouvé,où cette partie
est également très-prononcée. M. Spurzheim et moi, nous ouvrîmes la
tête de feq L'elille, et nous fîmes remarquer, à plusieurs médecins qui
se trouvoient préseus, le développement considérable des circonvolutions
placées sous les protubérances que j’ai signalées; elles dépas- '