i* 4 V o y a g e
lefe-Majeilé en paroles & en actions. Alors tous les affiliants font
obligés d’arrêter celui qui eit dénoncé. Un pere fe prête à arrêter
fon fils , le fils fon pere , & la Nature gémit dans le filence.
L ’accufé & le dénonciateur font d’abord conduits en prifon, &c
enfuite à Saint-Pétersbourg , où ils font j-ugés par la Chancellerie
fecrete.
C e Tribunal, compofé de quelques Mmiilres choifis parle Souverain
, livre à la merci de leur haine la vie & la fortune de toutes
les Familles. Cette Jurifdiction ell fi odieufe, qu’un Sujet indifférent
à ces Suppôts de la- tyrannie , ell fouvent jugé criminel, lors
meme que le dénonciateur ne peut apporter de preuves certaines du
crime de l’accufé , ainfi que dans le cas où le dénonciateur répond
Etudes , on les en fera fortir chacun félon fon mérite, en.lui donnant unGrade pour ré-
compenfe ; après quoi chacun peut s’engager & fervir félon-ce qui a été dit ci deifus.
VIII. On.ne donnera pas le congé aux- Gentilshommes qui font actuellement dans notre
Service Militaire y comme Soldats , & dans d’autres rangs inférieurs à celui d’Officier, 8s
qui n’ont pas encore l’ancienneté requife pour être Officiers , à moins qu’ils- n’ayent été
plus de douze ans dans le Service Militaire : alors-iis pourront obtenir leur congé.
IX. Mais comme nous conftituons notre- préfent très gracieux Règlement, pour être
dans tous les temps à perpétuité, une Loi fondamentale 8c immuable ,.ainfi nous aifuronç
fur notre parole Impériale, de la maniéré la plus folemnelle, que nous maintiendrons ceci
pour toujours facré 8c inviolable , dans le fens qui y eit exprimé, 8c dans les privilèges*;
& nos légitimes héritiers qpi feront nos fucceifeurs, ne pourront rien faire qui puiiTe y
déroger en quoi q#ue ce foit ;.car nous regardons le. maintien inviolable de notre préfente
Conftitution comme le plus ferme appui du Trône Souverain, de toutes les Ruffies. D’un
autre côté nous efpérons que toute la-Nobleflè RuiTe étant fenfible à/de fi grands bienfaits
de notre part envers eux & leur poftérité, ils feront excités par la fidélité & le zele qu’ils
nous doivent comme nos Sujets, à ne pas avoir d’éloignement pour le Service, & à ne pas
fe cacher pour l’éviter ; mais à s’y engager avec émulation 8c volontairement, & à.s’y conduire
de tout leur pouvoir honorablement & fans reproche,. auffi-bien qu’à inftruire avec
foin 8c application leurs enfants, de toutes les Sciences convenables car tous ceux qui
plongés dans la parefle 8c l’oifiveté n’ayant été dans aucun genre de Service dans aucun
Pays, n’inftruiront pas leurs enfants dans les Sciences utiles, à leur Patrie, feront regardés
comme des gens fans zele pour le bien public „ & par conféquent dignes du plus haut nié*-
pris, & ne feront pas-foufierts ni à notre Cour ni dans les Aifemblées 8c Solémnités publiques.
Donnée à Saint-Pétersbourg le 18 Février i
fur fes épaulés du crime de l’accufé ; c’eil-à-dire qu’il s’oblige à recevoir
le knout (i). S’il le fupporte fans fe rétraéler, l’accufé eil jugé
coupable , digne de mort, & une partie de fes biens eil confifquée
au profit du dénonciateur. Si des circonilances extraordinaires démontrent
que l’accufé eft innocent, le dénonciateur eil puni une
fécondé fois. II. l’eft auffi, mais une fois feulement, lorfque n’ayant
pas demandé à être admis a la preuve du knout, il ne peut pas
prouver le crime de celui qu’il dénonce.
Dans cette Jurifdiétion la tyrannie ne s’eil prcpofé que de jouir
de la liberté de facrifier au Defpote tous ceux qui lui font fufpeétsi
Il écoit alors néceifaire que le crime du délateur ne fût point puni
de mort , & que le fupplice du knout fût toujours adouci à foa
égard.
La Nobleffe ainfi affervie fous le joug de l’efclavage le plus affreux,
en fait fentir le contre-coup à tout le Peuple : il eil fon Efclave, ou
celui du Souverain & des Vaivodes qui le repréfentent.
On diilirrgue en Ruffie deux fortes d’Efclaves parmi le Peuple' :
les uns appartiennent au Souverain ,. & les autres à la Nobleffe. Les
premiers ne payent le tribut qu’à l’Impératrice, & les autres au Souverain
& à leur Seigneur. Les Nobles comptent leurs richeflès par
le nombre des Payfans qui leur appartiennent. Les Efclaves de la
Couronne payent au Tréibr Royal cent dix kopykkes, ou cinq livres
dix fous de notre argent, & les autres trois livres dix fous à la
Couronne (i). Les Seigneurs impofent k taxe qu’ils.jugent à propos
fur leurs Efclaves, & leur enlevent même quelquefois la petite fortune
qu’ils ont pu acquérir- par leurs talents. Si ces Efclaves ne gagnent
pas affez par la culture des terres & leur induilrie, pour payer
( i ) Voyez l’Article, des Supplices.
( l ) On éclaircira l’Article des impôts dans-celui des revendis de' la Rufîie;