V o y a g e
C ’eft à la protection de cette Princeffe que je dois les fecours dont
j’ai joui en Sibérie pendant le cours de mon voyage.
Arrivé à Saint-Pétersbourg, j’étois encore éloigné de plus de Huit
cents lieues de Tobolsk. Ce nouveau voyage exigeoit de nouveaux
préparatifs, & d’un genrë différent de ceux dont je m’étois occupé à
mon départ de France. Il falloit me pourvoir pour tout ce trajet, de
provifions de bouche de toute efpece, même de celles dont Image
eft le plus néceffaire, comme de pain ; de lits, & de tous les uften-
iïles néceffaires à la vie. Je ne pouvois me paffer ni d’un Interprète,
ni d’un Horloger pour raccommoder mes pendules, en cas d’accident.
A peine avois-je le temps de délirer ; j’étois prévenu en tout
par M. le Baron de Breteuil ; il partageoit mon zele pour cette ob-
fervation. C ’eft: à lui fur-tout que les Sciences en doivent le fuccès ;
& que ne doit pas d’ailleurs la Nation à ce fage Miniftre?
La faifon étoit cependant fi avancée, que menacé du dégel avant
mon arrivée à Tobolsk, on me faifoit craindre que ce nouveau
contre-temps ne rendît mon voyage inutile, en m’obligeant de refter
au milieu des forêts de Sibérie. Je fondois toute mon efpérance dans
la facilité qu’offrent les traîneaux pour voyager avec la plus grande
.vîteffe.
Je partis de Saint-Pétersbourg le i o Mars au foir, avec quatre
traîneaux. On en diftingue de plufieurs efpeces (V . i . ) , quoique
la conftruction foit toujours la même à plufieurs égards ( i ).
( i ) Description des Traîneaux.
La partie inférieure des traîneaux eft compofée de deux pièces de bois qui ont iix
pouces environ de largeur, & trois d’épaifleur à l’extrémité du derrière du traîneau :
ces dimenfions font les mêmes fur deux ou trois pieds de longueur ; elles diminuent
enfuite , toujours en approchant de l’autre extrémité, qui fe releve en arc fur le de-
yant du traîneau, jufqu’à la hauteur de deux pieds environ a ainli que dans le traîneau
m i