plufieurs autres maladies inconnues dans les Pays policés du relie
de l’Europe, parce que les peres & les meres qui en font attaqués fe
font guérir par la facilité qu’ils en ont. Le peu de foin que les
Rufles ont de leurs enfants dans leurs maladies, augmente encore
la mortalité.
La petite vérole, les maladies vénériennes & le fcorbur, produi-
fent de fi grands ravages en Rulfie, qu’ils y détruiront l’efpece humaine
, fi le Gouvernement n’y apporte un prompt fecours.
Les enfants qui jouiffent d’une bonne fanté, deviennent par
leur éducation d’une vigueur extraordinaire (i). Non-feulement
on les plonge dans l’eau froide , lorfqu on les baptife pendant
l’hiver, mais on les expofe aux froids les plus rigoureux en for-
tant des bains {%). Ces Peuples ne confervent pas long-temps
la vigueur qu’ils ont acquife dans leur jeuneffe ; ils ruinent leur
tempérament par la. débauche de l’eau-de-vie & des femmes. J’ai
vu peu de vieillards dans mon voyage : j’en ai trouvé quelques-uns
de foixante & foixante-dix ans , un de quatre-vingt ; c’étoit un
ancien Soldat.. Pour le récompenfer de fes fervices, on lui avoit
donné une petite chaumière fituée fur la route. On S’y arrêtoit quelquefois
pour faire repofer les chevaux. Seul &c ifolé au milieu de
ces forêts, il n’avoit ni femme ni eau-de-vie.
Ces Peuples ne connoiffent ni Chirurgiens ni Médecins , ni d’autres
remedésen général que les bains, excepté pour une maladie épidémique
qui regne de tempsen temps dans cette contrée, & dont je
n’ai jamais entendu parler en Europe : elle s’annonce par des tumeurs
de la grolfeur d’une pomme d’api : au bout de trois jours il
n’y a plus de remede ; mais ils en guérilfent aifément, lorfqu’ils y
(i) V o yez page 64.
(1) V o y e z page 5.0 & fuivantea
apportent promptement du fecours. Il fulfit de mâcher du tabac
avec du fel ammoniac 3 & den faire un cataplafme, qu’on applique
fur la tumeur, après l’avoir piquée dans plufieurs endroits jufqu’au
vif ( 1 ).
L ’exploitation des Mines eft encore une des grandes caufes de la
dépopulation de la Rulfie : plus de cent mille hommes font occupés
à ce travail ( z ) , & tout le monde fait que l’exploitation des
Mines eft une caufe de deftru&ion de l’elpece humaine. Ce travail
n’eft propre qu’aux Etats très peuplés ; il convient moins à la Rulfie
qu a toute autre Nation. D ’ailleurs fi l’on en excepte les Mines de
Fer & de Cuivre, celles d’O r , d’Argent & de Plomb font d’un
produit très modique ; il eft à peine égal à la dépenfe qu’exige
l’exploitation de ces Mines (3). Il eft vrai qu’elle multiplie l’efpece
monnoyée-, très rare en Rulfie ; mais l’or & l’argent font des ri-
chelfes de fiction : la population , la culture des terres, & l’induf-
trie, conftituent la vraie richelïè d’un Etat, & celle du Monarque.
La puilfance de l’Efpagne ne s’eft affoiblie après l’expulfion des
Maures , que parce que, les Habitants de ce Royaume ont abandonné
l’agriculture pour aller exploiter les Mines d’Or du Pérou.
Les Colons que l’Efpagne a envoyés en Amérique ont rendu quelques
Provinces de ce Royaume prefque déièrtes.
Depuis la conquête de la Sibérie, la Rulfie fe dépeuple tous les
jours par le nombre d’Habitants qu’elle envoie dans les deferts de
cette vafte Province. La Sibérie eft plus dangereufe à la Rulfie que
le Pérou ne l’a jamais été a l’Efpagne. Les Rulfes perdent inutilement
un grand nombre de Sujets 3 l’Efpagne reçoit au-moins des
tréfors du Pérou.
(1) Le détail de cette maladie 8c da- la guérifon laifle à défiret bien des circonftances ;
mais je n’ai pu lavoir que ce que j’en rapporte > & j’ai' cru devoir me borner a ce que j’ai
trouvé dans mon Journal.
(2) V o ltaire, Tome I , pages 52 & 54.
(}) On en donnerais détail d l’Article de l’Hiftoire Naturelle.
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