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 »  C ’eit de cette maniéré que Michel Romano époufa Eudoxe, fille  
 »  d’un pauvre Gentilhomme  nommé  Streshneu.  Il  cultivoit  fes  
 »  champs lui-même avec les Domeftiques,  lorfque des Chambel-  
 »  lans  envoyés par  le Czar  avec  des  préfents,  lui apprirent que  
 »  fa fille étoit fur le Trône  ». 
 Après que le Czar Romano eut choifi fon époufe,  il  la fit conduire  
 avec pompe  dans une  grande Salle  ,  ou il avoit  alfepiblé les  
 principaux Seigneurs de la Cour. Il leur déclara, affis fur fon Trône,  
 qu’il avoit choifi  pour époufe Eudoxe, fille du Boyard Streshneu,  
 &  qu’il leur ordonnoit, ainfi qu a tous fes Sujets,  de la reeonnoître  
 &  refpeéter comme PrineelTe  illue de la FamilleRoyale.il donna de  
 tnême  fes ordres pour faire enregiftrer fon mariage dans  les Archives  
 de I E tat, &c le faire publier dans toute l’étendue  de  fa domination. 
  On commença dès ce moment les préparatifs du Mariage,  &  
 Je Czar diftribua toutes les Charges de la Cérémonie, 
 Le  jour  fuivant  le Czar ,  fuivi  de  toute  fa Cour ,  alla voir  le  
 Patriarche fon Pere, Il fe rendit enfuite  à l’Eglife, pour y entendre  
 fa Mefle, & lui annoncer de nouveau fon Mariage, Le Czar déclara  
 au Patriarche ,  après la Melïè, qu’il ne lui avoit demandé jufqu’ici  
 fon  conlentement  ,  que comme à fon Pere ;  mais qu’il étoit venu  
 pour le lui demander eu égard à la qualité de h, Charge  de Patriarche. 
  C e Prélat fit un difçours au Czar fur fa foumiffion exemplaire,  
 fur  fon  Mariage,  &  lui  donna  la Bénédiction avec  l’Image  de la  
 Sainte Vierge. 
 La cérémonie du Mariage exigeoit plufieursappartements arrangés  
 de  la  maniéré  que  je  vais  rapporter  (  i  )',  O n   avoit  placé  
 dans le premier  appartement  le  Trône  du Czar , & dans le milieu  
 une  grande  table  couverte d’un  tapis vert  brodé en  or. Des fieges 
 (i) Je n’ai fait d’autres changements à ia traduction de mon Manufcrit, que de iiipjari-  
 ïner quelques détail* ennuyeux &  inutiles, & d’y mettre plus.d’orcjrç. 
 e n   S i b é r i e .  
 étoient difpofés autour de la table, pour les principaux Seigneurs de  
 la Cour,  &  des  bancs  pour  le  refte de  l’AlIèmblée. O n   y voyoit  
 quatre Images placées fuivant les quatre Points Cardinaux, 
 Le fécond appartement  étoit fuperbement orné :  on l’appelloit le  
 Salon nuptial.  Le  Trône du  Czar écoitdans  le milieu, avec deux;  
 fauteuils  pour  Leurs  Majeftés,  dont  les  couffins étoient d’étoffes  
 très  riches.  O n   avoir  placé  fur  chaque  couffin  quarante peaux  de  
 martres  zibelines.  Un Seigneur de  la Cour  étoit debout à côté du  
 Trône, & tenoit autant de peaux dans fes mains. Une grande table  
 étoit difpofée vis-à-vis du Trône, ainfi que  dans le premier appartement  
 ,  avec  cette  différence que celle-ci étoit  couverte  de  trois  
 napes. Tout le fervice confiftoit dans trois plats, & une faliere avec  
 du fel :  le  premier plat contenoit  un  gâteau ;  le deuxième des con-  
 fitures en pyramide,  &  le troifieme un fromage. Il y avoit auffi fur  
 la même  table plufieurs douzaines de mouchoirs blancs de moufle-  
 line, qui dévoient fervir à préfenter ces différents mers au C za r ,  à la  
 Czarine,  &  aux Seigneurs de la Cour. Les tiroirs de la table étoient  
 remplis  de  ces  mets,  au cas que  ceux  qui  étoient fur  la  table  ne  
 fuiTent  pas  fuififants. Cette Salle contenok, ainfi que la première ,   
 quatre Images difpofées de la même façon. 
 On avoit préparé dans un  troifieme appartement, voifin du premier  
 , deux couroway ou grands pains nuptiaux ; l’un pour le Czar  
 & l’autre pour la Czarine.  Le  nombre neuf étok défigné trois fois  
 fur ces pains g leurs parties fupérieures ,  &   toutes les épures de décoration  
 étoient  dorées,  &  leurs parties inférieures àoieiît argentées. 
   Ces  deux  pains  étoient placés fur des brancaads qui pofoient  
 eux-mêmes  fur  une  table  couverte d’un  tapis  vert. Les fieux pains  
 étoient auffi couverts  ;  celui  du Czar d’un velours rouge brodé  en  
 or, & celui de  la Czarine d’une étoffé d’or. 
 On  avoit  placé dans un  quatrième appartementfur  itnp xàbïs  
 couverte d’un tapis, deux cierges de figure conique, mais trcuiqués