Ruflès ont préfentetnent des Chantiers à Archange!, à Cronftar T
à Saint-Pétersbourg, à Revel, & l’on emploie beaucoup de Conf-
cructeurs nationaux. Il parole par l’état des forces de Mer de 1756,
dans les magafins de Mofcou 8c de Saint-Pétersbourg. Ces pelleteries paiTent alors par tant
de mains différentes, que les plus belles parviennent rarement à ces magafins. D’ailleurs
les contrées d’où on les tire étant plus fréquentées de jour en jour par les Marchands qtii
fe font établis dans la Sibérie pour faire ce commerce, 8c par le Militaire qu’on y envoie 3
ces Peuples vendent leurs belles pelleteries, au-lieu de les donner à ceux qui font chargés
de lever cette efpece d’impots 3 8c cette conduite eft toute fimple. Les particuliers Ruiïes
fe procurent par le moyen des Marchands, ou par leurs amis dans le Militaire , la plus
grande partie de leurs fourures, 8c j’ai fu que quantité de pelleteries de la Couronne
dépérifloient, faute de débit', dans des Magafins en Sibérie 8c à Mofcou.
Je n’ai point fait mention dans le revenu de la Ruffie du produit des Apothicaireries'^
parce que je ne l’ai point trouvé dans mes Mémoires. La Couronne s’eft réfervée le revenu
de tons les établifïements formés dans fes Etats pour les Apothicaires, & la diftri-
bution des Remedes 3 elle donne des appointements aux Employés , paye l’entretien de
tous ces établifïements 3 elle fait enfin toutes les dépenfes 8c en retire auffi tout le revenu.
Quoique la dépenfe que la Couronne fait pour cet objet foit très confidérable, il eft très
certain qu’après en avoir retiré les frais, elle y gagne encore au-moins fa retenue quelle
■fait fur les troupes pour les médicaments , 8c l’on m'a afïùré que le gain alloit au-
delà 3 mais les Apothicaires n’étant plus que des gens à gage, ils n’ont plus le zelfe
néceiïàire pour s’occuper à augmenter nos connoiffances dans ce genre, parce qu’ils ne travaillent
jamais pour eux; On voit de même'dans l’état ci-déifiis, que le Souverain s’eft të-
fervé ptuiieurs branches de Commerce, & tout te monde fait qü’il doit fe borner à le protéger
pour le faire fleurir. Ces abus font abfoiument contraires à une bonne adminiftras.
«on, & ils ne fubfiftent que parce qu’on ne peut pas remédier à tout en' même-temps.
’ J’ai fuppofe dans le même état le revenu des Provinces conquifes fur là Suede dfe
cent mille roubles feulement ( ou de 5 00000 Iiv. de France ) , tandis que ces Provinces
produifoient un grand revenu à la Suede 5 mais ces Ptovinces ne- payent plus de Capitation
, & ce revenu médiocre eft le produit des Biens domaniaux des Souverains dfe
Ruffie : ces revenus ont beaucoup diminué par les donations qu’ils en ont faites- J
différents Particuliers.
Le détail dans lequel je fuis entré fur le revenu de Ruffie en faifant connoître la na**:
ture des Impôts,donne une idée des richeffes aétüelles de la’ Nation, 8c de'fes ref-
fources. Les obfervations que j’ai faites fur le revenu de cette Puiflance, paroiffent confo
tater qu’on le doit fuppofer en argent de treize millions quatre- cents mille roubles, oa
de foixante-fept millions argent de France.' J’ai connu plufieurs perfonnes très inftruites
itir la Ruffie, les unes eftimoientle revenu de l’Etat à quinze millions de roubles , 8c le»
autres k treize & au deffousq mais ces dernieres faifoienc entrer dans leurs calculs- les uonr
valeurs.
Comparé à celui que M. Strahlenberg en donne en 1710 (i)1,
que la Marine de Ruiïie a diminué depuis ce temps. On conC-
truit cependant prefque tous les ans quelques Vaiffeaux dans les
différents Ports de Ruffie ; mais il en faut réformer dans la même
proportion, par les raifons qu’on verra par la fuite. Les Vaiffeaux
de guerre fe tiennent à Revel & à Cronftat, & les petits Bâtiments
à Saint-Pétersbourg; mais ces Ports ne font point bons. Le Port de
Cronftat a trois grands inconvénients, fuivant M. de Scrahleri-
berg (z). » La Mer n’eft pas affez large devant le Port, ni bien sûre,
» à caufe de quantité de Rochers & de Bancs de Sable cachés qui
»environnent ce Port; enforteque les Vaiffeaux ne peuvent etl
»fortir qu’avec certains vents favorables. Secondement, les glaces
»y relient trop long-temps , & la Mer n’en eft débarraffée que
»vers la fin du mois de Mai. Troifiemement , les Vaiflèaux fe
» pourriffent promptement dans ces Ports, parce qu’ils y font toii-
» jours dans l’eau douce : (on m’a affuré qu’ils ne duroient pas plus
» de dix ans ). Le Port de Revel eft trop, expofé aux tempêtes , &
»les Vaiffeaux n’y font pas en fureté, puifqu’un jour il en périt
» trois des plus confidérables dans le Port même ».
Du temps de Pierre Ier, beaucoup dé Vaiffeaux étoient construits
de fapins ; préfentement les parties principales au-moins, font
L’efpece mon noyé eft rare en Ruffie , non-feulement faute de nratiere première j
mais parce que, le nombre des roubles diminue annuellement. Cet objet ayant paru mé'-
riter l’attention du Gouvernement, on en chercha la fource. On a reconnu que les P&y-,
fans 8c les Commerçants qui vont dans les Villes , emportent chez eux en argent le
produit de la vente de leurs Denrées 8c de leurs Marchandifes , ils enfouiffent leur
fortune dans la terre, pourles mettre à couvert de ceux dont ils dépendent, & la plupart
mourant fans publier leur fecret,' cet argent-eft perdu pour l’Etat. Les tentatives
qu’on a faites pour remédier à cet inconvénient ont été inutiles 3 il fubfiftera tout le
temps que ce Peuple fera dans l’efclavage.
(1) L’Auteur écrivoit en 1730. Tome I I , pag. 115 8c 113.
(2) Strahlenberg, Tom. Ï I , page 1 ¿7. Ce's inconvénients font confirméis par tous ceux
qui ont été à Saint-Pétersbourg.'