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 «  tour du corps  ,  mais encore autour de la tête, du cou ,  des pieds  
 »  & des  mains ,  fe trouvent  d’abord  engourdis par le  froid, &  ne  
 »  peuvent rentrer dans  les lieux chauds  que  la peau de leur vifage  
 »  &   de  leurs  mains  ne  s’enleve,  & qu ils n ayent quelquefois les  
 »  doigts des pieds gelés. 
 x  L ’on peut encore juger  de la rigueur du froid extérieur, fur ce  
 »  que le Capitaine  Midleton  rapporte que les lacs  d’eau dormante  
 »  qui  n’ont  que  dix ou douze pieds de profondeur j  fe gelept juf-  
 »»  qu’au fond ; ce qui arrive auffi à la M e r , qui fe gele de la même  
 ..  hauteur  que  l’on  vient de dire , quoique la glace ne foit que  de  
 n'  neuf à  dix pieds d’épaiffeur dans  les  rivieres qui font le plus près  
 »  de la Mer ,  & ou la marée eft  forte. 
 »  Le  grand  froid  fait  fendre  quelquefois  cette  glace avec  un  
 v   bruit  étonnant,  auffi fort que  celui du canon. 
 »  À  l’égard de  la  Terre, M. Midleton croit qu elle n’eft jamais  
 »  dégelée jufqu’au fon d ,  parce que l’ayant  creufée  jufqu’à la pro-  
 »>  fondeur de cinqàfîx pieds pendant les deux mois que  dure l’été,  
 »  il l’avoit trouvée encore gelée & blanche comme de la neige. 
 »  Voilà  des  effets  plus  grands  que  ceux que l’on éprouve ordi-  
 »  nairement  en  Sibérie ;  ce qui  feroit croire que  les  froids  de  lâ  
 »  Baie de Hudfon & du voifinage,  font pour le moins auffi grands  
 »  que  les  plus  grands  de  la  Sibérie.  C ’eft  ce dont  on  ne pourra  
 «  s'affûter exactement que par des obfervations faites avec des ther-  
 «  mOmètres réglés comme l’ont été ceux  dont  on s’eft  fervi en- Si-  
 «  bérie ». 
 Ces dernieres obfervations1 conftatent de plus en plus que le froid  
 augmente à mefure  qu’on  s’avance  à  l’E ft, &  ce  fait  devient une  
 vérité des plus  décidées. On a  cru  trouver la eaufe principale de ee  
 phénomène  en  Sibérie ,  dans la prodigieufe hauteur, qu on  a  fup; 
 E  If  S  I  !   !   H  1  E.  
 pdfée  âu  terrein de  cette  contrée ,  & à  la quantité de  fel qu’on y   
 tfoitve.  La difpofition du terrein de  la Sibérie a  été encore  envifa-  
 gée fous un nouveau rapport. Cette contrée forme un  plan  incliné  
 depuis la Mer Glaciale  jufque vers les frontières de la Chine, où le  
 terrein  eft  le  plus  élevé  ,  parce  que  des  chaînes  de  montagnes  y  
 féparent  ces  deux  Empires.  Le Soleil  fitué  vers  l’horifon  de  ces  
 montagnes ne peut donc, lorfqu’il éclaire cet hémifphere, échauffer  
 que foiblement ce terrein incliné. Ses rayons ne font qu’effleurer la  
 furface du Globe. La combinaifon  de  ces  différentes caufes  explique  
 parfaitement que cette  contrée  doit  être  très  froide. Mais dans  
 quel rapport chacune de -ces caufes influe-t-elle fur cet effet général ?  
 le terrein  de  la Sibérie eft-il auffi  élevé qu’on l’a cru  jufqu’ici  ?  Ces  
 objets  méritent  quelques  difeuffions. Laurent  Lange  attribue à la  
 chaîne de montagnes qui fépare  laRuffie de la Sibérie une hauteur  
 de plus de  deux lieues (i). 
 •>  Les montagnes  de Werchatourie , dit-il,  font entre cette der-  
 »  niere Place  &  Solikamskaïa. Nous les traversâmes pendant un ii  
 »  grand froid,- que  les- couvertures de nos  traîneaux ne  fuffifoient  
 »  pas pour nous en  garantir ;  &  nous  courions  tant  de danger de  
 »  perdre le nez, que nous ne pouvions pas faire plus de vingt werfts  
 »'  fans  nous  arrêter. Nous  en avions cinquante à faire à travers ces  
 »  montagnes,  qui, je crois, en ont neuf dans leur plus grande hau-  
 »  teur ». 
 C ’eft par de femblabies obfervations que les premiers Voyageurs,  
 ont déterminé la grande élévation de ces montagnes & de la Sibérie.'  
 La plupart de  ceux qui  les ont fuivis ont  adopté ces'premiers  préjugés, 
  les  ont  confirmés,  & ils n’ont plus été confidérés que comme  
 des faits connus  : mais on voit parle  nivellement que  j’ai fait dansfi) 
  Journal du Voyage de Laurent Lange a la Chine, Tome V, pag. 378 du Recoeuil des*  
 Voyages au Nord, édition d’Amfterdam, chei Jean-Frederit Bernard.