Les Supplices, depuis l'avénement de l’Impératrice Elifabeth au
Trône deRuffie , font réduits à ceux des batogues (n° . XII ) & du
knout (n° .X I I I ) .
Les batogues font regardées en Ruflie comme une fimple correction
de police que le Militaire emploie vis à-vis du Soldat , la No-
blefle envers fes Domeftiques, Se ceux à qui elle confie fon autorité,
fenvers tous ceux qu’ils commandent.
J’ai été témoin de ce fupplice pendant mon retour de Tobolsk a
Saint-Pétersbourg. Je me plaçai à une fenêtre , aux cris que j entendis
dans la cour : je Vis deux Efclaves Ruffes qui entraînoient par
les bras une fille de quatorze à quinze ans ; elle étroit grande & bien
faite! J’imaginai à fa parure qu’elle appartenoit à quelque famille
diftinguée. Sa tête , eoëffée en cheveux , ëtoit penchée en arriéré j.
fes yeux, fixés fur une peifonne , imploroient fa clémence ; fa
beauté fembloit la lui affurer, & les larmes qu’elle répandoit paroif-
foient un charme foperflu. Les Ruflès la conduifirent cependant au
milieu de la cour, & dans un inftant ils la deshabillerent toute nue
jufqu’à la ceinture ; ils la couchèrent par terre fur le ventre, & ils
fe mirent à genoux ; le premier tenoit fa tête ferrée entre fes genoux
, & le fécond l’autre extrémité du corps : on leur apporta des
verges, dont ils ne cédèrent de fouetter fur le dos cet enfant, qu’au
moment qu’on cria, t e f i afifi{. O n releva cette viétime infortunée :
elle n’étoit plus reconnoiffable j fon vifage & tout fon corps étoient
couverts de fang & de boue. Je jugeai à ce dur traitement, que
cette jeune fille avoit commis quelque grand crime : j’appris quelques
jours après, quelle étoit Femme de Chambre', & que le mari
de fa Maîtreffe avoit ordonné ce châtiment, parce qu’elle avoit
manqué à quelques devoirs de fon état. Par-tout ailleurs on l’auroit
'peut-être renvoyée, fi fa Maîtreffe avoit été de mauvaife humeur-
Les Ruffes prétendent qu’ils font obligés de traiter ainfi leurs Do-
meftiques, pour s’aflurer de leur fidélité. Cette conduite eft caufo