Grèce, servant de matériaux bruts, à côté des
colonnes grêles et des ornements sans grâce, de
marbre exotique, qui soutenaient les autels (1).
Ainsi les chrétiens, voulant construire une
église, démolirent un temple grec ; la profusion
des tambours et des chapiteaux qui remplissent
les murs , ne permet pas de douter que tout un
temple n’y ait passé. Ne serait-ce point le Par-
thénon, le temple de la divinité Vierge des
Taures ? Quoiqu’il en soit, la gravité mélancolique
du christianisme n’empêche pas qu’on ne
regrette les grâces et la poésie du paganisme,
et que n’aurai-je pas donné pour que ces colonnes
ioniques fussent debout et pussent se refléter
dans l’onde paisible du port voisin, en
attestant à travers tant de siècles la religion de
la colonie d’Héraclée !
Au reste,, tout ceci prouve que l’église elle-
même , bâtie avec de pareils matériaux, fut une
des plus anciennes constructions chrétiennes dé
Cherson, et qu’elle pourrait être, avec autant
de raison, la cathédrale de Notre-Dame, sans
les motifs que j ’ai allégués plus haut (2)*
( 1 ) Le col de la colonne avait 26 pouces de diamètre:
le module était de 15 pouces , et la colonne entière, avec
hase et chapiteau, avait près de 21 pieds de hau t, ce qui
donnerait 55 pieds de haut jusqu’au pignon du fronton
d’un temple tétrastyle.
(2) J’ignore laquelle de ces deux églises Bronovius a en
Les décombres voisins de l’églises sont entremêlés
de plusieurs fûts de colonnes cannelées,
vue, quand il dit : « Il existe dans la ville les restes d’un
grand monastère grec; les parois du temple existent encore;
mais elles n’ont nulle apparance, les superbes ornements
de cet édifice ayant été détruits et spoliés. Les annales
des Russes et des Polonais rapportent que Vladimir,
grand-duc des Russes et de Kiovie, emmena de ce monastère,
comme trophée, à Kiovie, d eux portes en airain de
C o r in th e , que les prêtres grecs appellent Portes roya les ,
ainsi que de fort belles images et quelques Grecs ; elles
ajoutent que Boleslas I I , roi de Pologne, transféra à
son toUr, aussi comme trophée, ces deux battants de
Kiovie à Gnesne : ce sont les portes de la cathédrale qu’on
voit aujourd’hui. »
D’autres auteurs prétendent que les vraies portes d’airain
de Cherson sont à Novogorod la Grande, dans la cathédrale
de Ste-Sophie. Ceux que cet antique monument
intéresse liront l’ouvrage de M. Fréd. Adelung : D ie
Korssunschen Thüren in der Kathedralhirche zu r h e il.
S op h ia in Novogorod. Berlin, 1823. Au reste, il n’est pas
question de portes dans Nestor. «Vladimir, dit-il, emmena
la tzarine Anasthase, des prêtres de Kherson, les reliques
de saint Clément et de son disciple Phiva, comme aussi
des vases et des encensoirs, ainsi que des images ; le tout
pour son salut. Il prit avec lui d eu x idoles d 'a irain et
quatre chevaux de métal qui sont aujourd’hui derrière
l’église de la Sainte Mère de Dieu, et que les ignorants
croient faits de marbré. » Saint Clément, évêque d’Ancyre,
avait été martyrisé et jeté dans la mer à Cherson, vers l’an
100 de J .-C . Il devait y avoir une église. Rubruquis,
P o y . en Tartarie (1253) , p. t . S ch iltb e rg e r ’s R e is e in deti
Orient, p. îoo.