qui lui tenaient lieu de boeuf pendant toute la
mauvaise saison ; car elles donnent un fort bon
bouillon.
La chasse des cailles se fait de meilleure heure,
en automne, lorsqu’elles quittent les steppes
pour émigrer sur l’autre rive de la Mer Noire
en Anatohe. Trop grasses alors pour voler facilement,
elles se logent sous les pierres et les genévriers
de la cote , où elles attendent un bon
vent qui les pousse sur l’autre rive. Les Ta-
tares se munisseht alors de racines de genevriers
coupés, dont on a laissé la souche exprès se
cuire et se sécher au soleil pendant deux ans :
ces morceaux allumes brûlent comme des flambeaux
, et chaque Tatare ayant le sien, va dénicher
les cailles parmi les rochers, où il les prend
avec la main, tant la lumière les éblouit et leur
ôte toute espèce d’intelligence. M. Compère faisait
aussi provision de cailles qu’il salait par 4
ou 5 mille : on les mange rôties ; elles sont
bonnes quoique grasses.
Aïa. — Kokia-Issar.
Laspi est un bien aimable séjour ; mais un
voyageur est condamné à rompre chaque jour
les liens que lui tend l’amitié, pour se rejeter
dans l’abandon et dans l’isolement, pour s’enfoncer
dans des déserts : aujourd’hui c’est bien
le cas de le dire; je voulus visiter le cap Aia
et le Kokia-lssar qui terminent la pointe sud-
ouest de la Crimée, pays ignoré et inhabité aujourd’hui,
si jamais il en fût. Rien ne fera mieux
comprendre le fil de cette excursion importante,
que le panorama de la Ve série, pl. 10, et surtout
que le dessin de ia vue du cap Aïa, que j ’ai
mentionné plus haut (1).
La dépression de la vallée de Kaïtou, ramification
de celle de Baïdar, est la suite d’une dislocation
transversale de la chaîne calcaire qui a
été largement entr’ouverte, laissant voir le
schiste au fond comme base calcaire. Comme
sur l’isthme de l’ancien Laspi, il est resté ici sur
le schiste quelques gros fragments de calcaire,
qui relient les deux tronçons delà chaîne. Les
fentes qui séparent ces fragments s’appellent des
bogazes (bouches), et je tenais à me convaincre
de la position isolée des massifs qui les formaient.
Je grimpai par les bogazes ; je les examinai successivement
et je vis qu’effectivement le schiste
se montrait dans toutes les fentes. Cette dislocation
transversale de la chaîne calcaire ne peut
s’expliquer que par la présence d’un jet igné
dans le fond de la vallée de Laspi : je n’ai pu le
trouver.
J’escaladai ensuite le dos de VA'ia, boisé de
(i) Atlas, IIe série, pl. 56.