« De la ville des Lampades, dit Scymnus, au
promontoire élevé de la Tauride, qu’on appelle
Krioumétôpon (le Front du bélier), on compte
120 stades (c’e s t-à -d ire une quinzaine de
verst). »
Dans un rayon pareil il n’y a et il ne peut y
avoir que l’Aïoudagh ou Grand-Kastèle qui réponde
à cette position. D’ailleurs, lisez Strabon:
« En avant de la côte Taurique, dit-il, se détache
fortement vers le midi, dans la mer, un
promontoire qui se dirige vers la Paphlagonie et
la ville d’Amas tris ; on l’appelle Krioumétôpon.
Au cap correspond celui de Carambis en Paphlagonie,
au moyen desquels le Pont-Euxin est
comme partagé en deux. »
Peut-on désigner plus clairement cette montagne
isolée qui se détache en promontoire bien
loin dans la mer? et qu’on trouve un seul point
de la Crimée qui réunisse aussi bien tous les caractères
voulus, forme, position et distance
relative (1).
( i) Ptole'mée place le Krioumétôpon à peu près à moitié
de distance entre Théodosie et Chersonesus 5 Pline compte,
pour la première moitié de Théodosie au Krioumétôpon,
122 mille pas romains, et pour la seconde i45 mille pas.
Quoique vagues, ces deux mesures conviennent très-bien
a 1 Aïoudagh, mais ne peuvent s’accorder avec aucune des
hypothèses de Pallas, du marquis de Kastelnau ou de
M. Montandon.
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Je regarde donc comme certain que XA'iow-
dagh ou montagne de l’Ours est le Front du bélier
ou Krioumétôpon des anciens, et c’est autour
de cette montagne classique des Taures que
je transporterai le théâtre des récits d’Hérodote
et de Scymnus.
. « C’est là (au Krioumétôpon), dit Scymnus,
qu’on prétend qu’arriva Iphigénie, lorsqu’elle
disparut autrefois de l’Aulide. Les Taures y abondent
et leurs tourbes nombreuses mènent dans
ces montagnes une vie errante. Barbares par
leurs cruautés et par leurs meurtres, ils adorent
eux-mêmes une divinité qui leur ressemble
par ses crimes impies. »
Au Krioumétôpon aborda donc Iphigénie, et
là se trouve le temple de cette cruelle Diane
Taurique ; et comme pour certifier le fait, le
village tatare qui est bâti au pied de la montagne,
porte encore le nom de Parthénith en
l’honneur de la Divinité vierge.
Maintenant que nous connaissons la localité,
il est intéressant de lire ce qu’Hérodote nous a
transmis des moeurs et des sacrifices des Taures.
« Les Taures , dit-il, habitent la partie montagneuse
de la Tauride, jusqu’à la Chersonèse
âpre ( Trachée) qui appartient à la mer qui est
sous le vent d’est. Les Scythes, par contre, occupent
la steppe sur les Taures et les pays qui
s’étendent vers la mer de l’est, ainsi que les