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parlait de ses projets d’embellissements. — En
1834, il n’existait pas encore de palais pour la
famille impériale : on avait construit sur une
superbe terrasse, la maison du directeur du domaine
, reconnaissable à sa tour blanche. Il eût
été essentiel de ménager le reste de la terrasse ,
dont la vue résume tout ce qu’il y a de plus pittoresque
dans le paysage d’Orianda et des alentours.
Le directeur d’alors, qui visait plus à
l’utile qu’au beau , l’a sacrifiée pour y creuser
et pour y bâtir une cave , dont la voûte est en
bois. A ce crime de lèze bon goût, je ne puis
m’empêcher de pousser un soupir ; et j ’espère
que son successeur plus avisé, aura rendu la
terrasse à sa destination.
Dans ses projets de retraite, l’empereur
Alexandre avait songé à réunir ses favoris autour
de lui : il avait donné au comte Diébitch
une propriété de 47 dessétines de terrain qui
joint celle du jardin impérial. La mort de l’empereur
retarda bien des projets , et le comte est
mort, laissantes» terre inculte à ses héritiers
qui ont alors songé à en profiter en y plantant
de la vigne et des oliviers.
Sur la limite des deux domaines s’élève, entre
la grand’routé et la mer, un amas d’énormes
blocs de calcaire noir entassés les uns sur les
autres, figurant-une colline élevee de i 5o toises
au-dessus de la mer. Elle est escarpée et inabor-
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dable de toutes parts et présente l’aspet le plus
bizarre. Autour du sommet s’était groupée une
population taure ; vraisemblablement elle avait
établi ses demeures entre les blocs, réservant
pour son acropolis la partie la plus élevée, qui
n’avait d’autre porte qu’une fente de 3 pieds de
large entre deux blocs de 15 pieds de haut. Cet
espace entier est recouvert de débris de briques
et de poterie grossière; les murs étaient en
pierres brutes grossièrement entassées sans
chaux. Je n’ai pu retrouver les traces d’une chapelle
, édifice essentiel dans toutes les constructions
grecques en Grimée : d’où je conclus que
ces ruines sont antérieures au christianisme.
Le pied du rocher du côté du nord ou de la
route actuelle, était défendu par une muraille
avancée qui en masquait l’approche. Deux autres
murailles encore visibles s’étendaientcomme
deux bras du pied de cette espèce d’acropoiis à
la muraille principale du mont Mégabi. L’intervalle
embrassé par ces deux murs est rempli de
traces d’anciennes habitations (1). Sur le principal
emplacement du rocher-acropolis croît un
genevrier oriental qui a au moins 3oo ans d’antiquité
, et qui prouve que cet endroit est abandonné
depuis bien des siècles. Pallas cite aussi
(1) On trouvera dans la série géographique un plan
d’Orianda, pl. 17.