boulangers , brasseurs de bière, en un mot gens
de métier. C’est chez l’un d’eux, nommé Jeaiï
JVetzler, que je trouvai à me loger pendant les
dix semaines que Sévastopol, à diverses reprises 4
a été le centre de mes explorations. C’est dans là
plus modeste des chambres que pendant le printemps
de i 833, je me trouvai réuni avec les
professeurs Ratké de Dorpat et Nordmann d’Odessa,
qui étaient venus, l’un étudier la faune
de la Mer Noire, l’autre suivre l’embryologie
des crabes, si je ne me trompe. M. Ratké désirait
surtout connaître le fameux Teredo navalis,
ce ver rongeur, le fléau des vaisseaux 5 ce fut
avec beaucoup de peine qu’il put y parvenir.
Que de plaisir j ’eus à revoir le brave et infatigable
Nordmann, avec lequel j’avais suivi des
cours de géologie et de chimie à Berlin. Attentifs
aux doctes leçons de nos professeurs, nous ne
pensions guère que nous nous retrouverions
plus tard sur les ruines de Cherson ; qu’à mon
retour du Caucase, j ’irais le voir à Odessa ; que
l’en vie lui prendrait aussi d’aller visiter les rives
du Phase , et qu’il viendrait me raconter à Neu-
châtel, chez M. le professeur-Agassiz, que malgré
toutes les mesures de précaution que je lui
avais indiquées, parti lui neuvième pour l’Ab-
khasie et l’Iméreth, au mois d’avril 1-835, il était
rentré au mois de novembre de la même année
à Odessa avec un seul compagnon, les sept
autres ayant succombé pendant çe court voyage.
Ce qui m’avait le plus frappé à Sévastopol, c’était
de voir ce port de guerre si fortifié du côté
de la mer, tandis que du côté de terre il n’était
pas à l’abri du plus faible coup de main. La ville,
flans tout son pourtour, était complètement ouverte
; pas une porte, pas le plus léger petit
rempart. Toutes les rues débouchaient sur une
immense place vague, et pour ainsi dire dans
la steppe où s’égaraient maints chemins, maints
sentiers, à. Balaklava, à Tchorgouna, au monastère
de Saint-George. A gaucbe se présentait
le réservoir nouvellement établi des fontaines de
Sévastopol, dont l’eau venait des sources que j ’ai
indiquées plus haut. Ce réservoir était appuyé
contre le mur d’enceinte d’un jardin public récemment
établi sur les hauteurs qui terminent la
baie du Sud. La vue plongeait sur la baie qui
présentait d’ici un aspect fort extraordinaire,
avec ses vaisseaux de guerre qui semblaient être
arrivés là par enchantement, personne ne pouvant
soupçonner que ce long étang est en communication
avec la mer. Vis-à-vis du jardin auquel
on a donné le nom de Boulevard, un peu
sur la droite , s’étend le vignoble Bardac.
Aujourd’hui, je suppose que tout ceci a changé,
et que l’idée qui était venue, que les Anglais en
cas de guerre pourraient opérer une descente
sur un point quelconque de la Chersonèse et