tous leurs efforts sur leurs rames nombreuses
et agiles. Tout m’obéit, — loin des rochers qui
pleuvaient sur nous, mon navire a gagné la
plaine-liquide. Mais, hélas! les autres, sans qu’il
en échappe un seul, sont ensevelis au sein de ce
port dans une ruine commune.
« Poursuivant notre course, nous arrivons à
l’ile d’Aea (la Colchide) où régnait Circé,
etc. » (1)
Celui qui connaît le port de Balaklava, se représentera
facilement cette cruelle destruction
et jugera s’il y a rien d’amplifié dans le récit
d’Homère, rien qui ne s’accorde strictement
avec les localités, comme si Homère avait été
sur place pour décrire le combat,
D’ailleurs y a-t-il rien dans ce tableau des
barbares Lestrigons (Àyi<rriç, brigands, pirates),
qui ne soit d’accord avec les moeurs connues
des Taures barbares qui faisaient périr tout
étranger abordant par hasard ou échouant sur
leurs rivages, qui exposaient les têtes de leurs
ennemis sur les toits de leurs maisons, etc.
Strabon semble avoir deviné Homère, comme
je l’ai deviné, quand il dit en pariant du port de
( 0 Je renvoie mes lecteurs pour l’ensemble des voyages
d’Ulysse dans la Mer Noire, à ce que j’ai écrit t. I, p. 60
et 61 ; t. III, p. 53 et seq.; t. IV, p. 327 ; et t. V à l’article
Tamariy p. 4°-
Balaklava. « Après l’antique Chersonesus est un
port d’étroite entrée : c’est là surtout que les
Taures, nation scythique, ont établi leurs repaires
de brigandages (AnHpta), attaquant tous
ceux qui se hasardent sur leur territoire. On
l’appelle le port dès Symboles. »
Ce port est le Symbolon d’Arrien et de
Constantin Porphyrogénète, le Cembalo, Cim-
baldi des Génois, le Jamboldum ou Jamboli de
Bronovius.
On présume que Palakium, l’une des forteresses
de Skylouros, occupait l’emplaCement
actuel du château ruiné de Balaklava, dont le
nom dérive sans doute de là (1).
Le castrum de Cembalo fut pris par les Génois
en i 365, sur les ducs grecs qui possédaient
cette partie de la Crimée, chefs superbes, mais
lâches et sans union, qui se laissèrent dépouiller
ignominieusement de leur château. Les Génois
Construisirent alors le château àctuel, faisant de
Cembalo un port célèbre, commode et bien fortifié.
Mais en i 433, les Grecs qui étaient restés à
Cembalo, ayant ourdi une conjuration, en chas-
(1) Voyez sur l’origine du nom de Balaklava, les étymologies
de Martin Bronovius ou Bronevski, Tatarioe Description
p. 7 ; de Pallas, t. II, p. 136 ; P. de Koeppen,
Krimskii-Sbornik, p. 2i3, etc.