Sur le second plan, s’étend le coteau de vigne
qu’a planté la princesse ; il contient 5o,ooo ceps.
Au-dessus l’on voit au milieu des jardins l’élégante
maison qu’elle s’est bâtie et qu’elle habite
été et hiver. L’église la sépare de la grand’route
ombragée de vieux noyers qui prospèrent rafraîchis
par* de belles fontaines. Le rocher auquel
la maison est adossée est historique comme épi—
thète. Au-dessous, un château gothique avec
deux tours carrées qui flanquent la porte, devrait
loger quelque seigneur vassal et ne loge
que les tonneaux de la princesse. L’autre château
avec ses tours crénelées est celui du prince
A. N. Galitzin à Gaspra (1).
Miskhor où me menait M. Marko, est un domaine
de 3oo dessétines dont il avait la direction.
L’établissement est placé à peu de distance
du rivage au milieu des parcs et des jardins. Les
plantations de Rissling que M. Léon Narichekine
à fait faire , donnent un vin d’un goût fin, agréable,
sans avoir tout-à-fait le goût des vins du
Rhin. Mais, je le répète, il faudra encore bien
des années pour que la côte de Crimée produise
des vins d’une qualité arrêtée. Le sol du domaine
est un schiste mêlé de débris calcaire.
(1) L’arbre couronné de vigne sauvage qui ombrage
le premier plan, donnera une idée de la force de la végétation
sur la côte de Crimée.
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J’avais déjà suivi plusieurs fois la chaussée qui
contourne bien haut au-dessus d’Aloupka ; cette
fois-ci, M. Marko me mena tout droit à la célèbre
habitation du comte Vorontzof, par un
sentier qui longe le rivage de la mer en serpentant
sur les falaises. Ici le schiste qui a été ca-
ehé sous le promontoire de l’Aïthodor, renaît et
monte insensiblement à plus de i 3oo pieds d’élévation,
se cintrant pour porter sur sa voûte
la haute muraille à pic couronnée des aiguilles
de l’Aïpétri ; leur hauteur absolue est de 3,798
pieds de roi (1). Un pareil soulèvement pour
celui qui connaît les allures de la chaîne Tauri-
que, annonce le voisinage d’un foyer pluto-
nien, et mes yeux attentifs scrutent le sol que
masquent souvent de grands amas de débris calcaires.^
Avant d’arriver au ravin Khastava,
M. Marko me montra quelques tombes grecques
■anciennes $ puis nous traversons une grosse
digue de blocs calcaires descendus du rocher
Issar : on la prendrait pour une grande moraine.
Au-delà de la digue commencent les blocs
erratiques d’ophitone, et leur profusion excite
ma surprise^ car ils sont entassés confusément
les uns Sur les autres , depuis le bord de la
(1) Cette hauteur a été mesurée trigonométriquement
par M. de Chatillon.