A n X.
Brumaire.
' absolument inhabitée il y a dix-huit ans(i);
Des ehèvres sauvages, quelques autres animaux
et les noirs marrons y vivaient seuls en
liberté. Tout semblait devoir perpétuer cet
état d’abandon : une mer furieuse et des côtes
inabordables, des escarpemens dont on n’avait
pas encore trouvé les pa s, le manque absolu
de sources, d’immenses nappes de laves in-r
fertiles, un terrain ingrat et pierreux qui ne
produisait que par caprice des fougères et des
forêts, tels étaient les obstacles, en apparence
, insurmontables, que les premiers h a -1
bitans de Saint-Joseph eurent à vaincre.
L e quartier commença à se pèupler de
chasseurs de marrons, et de ces hommes de
couleur, sans propriétés j nés libres de père
en fils , qui achètent une esclave dont ils font
leur femme, et dont ils ont des enfans noirs,
mais libres comme eux. Trop fiers pour
s’abaisser à des travaux qu’ils croient désho- ,
norans, et habitués aux privations de toute »
espèce, ces hommes actifs, ; ipfajtigab les et r
paresseux tout-à-la-fois , ont un caractère
particulier. Ils se croient blancs j extrêmement.
( i ) M . H u b e r t f y t ,n om m é e n ] 7 $ $ . c om m a n d a n t d $
q u a r t ie r p o u r é t a b l i r la p a r o is s e , . . , 1 , É
¡susceptibles sur ce p oin t, ils regarderaient x ‘
comme un outrage le nom d’hommes de couleur B
ou de noirs libres, sous lequel on désigne les mairev
affranchis a l’Ile-de-France. Ils sont gens à
ne pas pardonner une méprise que leur teinte,
leur langage et leur costume rendraient cependant
très — excusable. Justes , mais sévères
envers leurs esclaves, quand ils en ont, ils
sont inflexibles et cruels pour les marrons ,
quand ils en prennent ; du reste, francs, pleins
de candeur, incapables de soupçonner la fraude,
hospitaliers et généreux. Presque livrés à l’état
de nature , ils savent à peine qu’il existe une
métropole. Les commotions révolutionnaires
qui ont ébranlé l’univers, et qui, dans Bourbon
même, ont causé des mouvemens funestes,
pnt respecté les forêts profondes dont les
racines du volcan ionl ombragées.
D ’abord ces blancs très-foncés ne vécurent
que du produit de leur pêche et de leur
chasse ; ils s’y livrèrent avec tant d’activité . 7v
qu’ils eurent bientôt exterminé les animaux
des bois et une partie des poissons du rivage.
C’est alors que plusieurs espèces propres à
l’île de Bourbon y furent to u t-â - fa it détruites
: les individus de ces espèces , qui
avaient fui devant Vbo&me à mesure que l’île