la négligence de nos gens; et malgré ma reeom-'
m an dation, il n’y avait plus d’eau dans les cale*
basses ! elle avait été consommée à la montée
des Sueurs ; je donnai ordre d’en chercher aussitôt,
dans les environs.
A mesure que le jour disparaissait , le ciel
deyenait plus pur ; les nuages avaient fui vers
la mer , la température était douce. Après le
coucher du soleil le thermomètre fut trouvé à
i 3 ° $ tout nous faisait espérer le plus beau
lendemain; il eût été cruel de renoncer à un
voyage dont je me promettais d’heureux résultats.
Je me vis cependant au moment d’y être
réduit. Les nègres rentrèrent en nous annonçant
qu’ils avaient inutilement cherché; nulle
source n’existe dans ces régions calcinées. Je
passai la nuit dans l’inquiétude ; Jouvancourt
qui, pour économiser l’eau, n’avait pas bu
depuis l’instant où nous avions quitté la ravine
du Bois-Blanc, commençait à souffrir de
la soif.
A trois heures du matin je sortis du camp
pour aller regarder le thermomètre : il était
suspendu à un tronc un peu éloigné de notre
gîte, et marquait n ° . L a lune répandait son
éclat mélancolique sur des lieux déjà sauvages;
le plus majestueux silence régnait autour de
moi. J ’admirai long-tems ces sites solitaires ou Ak
personne n’avait encore pénétré ; je pensai BrUJ
que, rendu: sur les lieux plus élevés de la mon- —
tagne , je trouverais encore plus de motifs de
contemplation: la négligence de Cochinard ai-*
lait peut-être m’empêcher de m’y élever ; je
rentrai au camp fort en colère contre lui ; je
le soupçonnai de mauvaise volonté ; il n’avait
pas marqué de zèle dans cette occasion. L e
mal-aise de mon compagnon que la soif empêchait
de dormir , justifiant mon humeur, je
réveillai tout le monde ; je fis rallumer les
feux qui s’étaient éteints; et j ’ordonnai. que
chacun se remît en quête sur-le-champ pour
trouver de l’e au ; j ’annonçai que la privation
d’une chose si nécessaire ne serait pas un obstacle
à mes desseins, et que, quelqu’un dût-il
mourir de soif, nous partirions à six heures
précises pour la Fournaise.
Mais je ne voyais pas Cochinard contre lequel
j ’étais outré : où pouvait-il être ? Je m’entretenais
avec Jouvancourt de la crainte où
j ’étais qu’il ne nous eût abandonnés , quand je
l ’entendis arriver en criant à boire, à boire ; il
avait une de nos calebasses à la main. Touché
de la situation où il nous avait réduits, et pour
réparer sa faute , Cochinard, avait profité du