
ïdd V O Y À O E
paille, j ’en pris, à la surface du bassin,
une goutte que je mis sur ma langue. Elle
m’y causa cette sorte de douleur, semblable
à la brûlure , que cauSe un caustique.
Je pris ensuite, dans le creux de ma main ,
de l ’eau du réservoir ; puis, après avoir eu
soin d’ecarter, en soufflant, la liqueur huileuse
qui la surnagedit, j’y plongeai le bout
de ma langue, et ne pus y discerner aucune
saveur étrangère. '
Cependant, toute' hardie qu’étoit mon
experience, je n’osai éh pousser la témérité
jusqu’à boire et avaler cette eau; mais
je la présentai à Keès, qui j par la finesse
de son odorat, pouvoit m’indiquer, d’une
manière sûre, si elle avoit du danger. 11
la flaira, et s’éloigna aussitôt. Cette épreuve
ne me satisfaisant point encore , et voulant
réussir à tromper, s’il étoit possible,
les sens exquis de mon singe , j ’exprimai
une certaine quantité de suc d’euphorbe et
la jettai dans du lait que je lui présentai
à boire. Pour le coup, il y auroit été pris ,
car non - seulement il goûta le lait sans
montrer la moindre répugnance ; mais il
l ’auroit probablement tout avalé, si je ne
» w l lW w » X m I 'm m p i t l s
e u A f r i q u e . 167
l ’eusse retiré de devant lui ; il n’en fut
même pas incommodé.
A la vérité , la dose étoit peu considérable
, parce que je ne voulois pas risquer
la vie d’un animal qui m’étoit utile. Peut-
être aussi le lait devient - il l’antidote de
l ’euphorbe, et Kees avoit-il avalé à la fois
et le poison et son remède. Si ce fait étoit
vrai, il deviendroit une découverte intéressante.
Au reste, j’aurois désiré la confirmer
par plusieurs expériences, en faisant
avaler successivement à un animal et du
suc d’euphorbe en quantité suffisante et du
lait. Mais dans ces déserts et avec des projets
d’un aussi long voyage, je n’avois ,
parmi mes,animaux, aucune bête qui ne
ine fût nécessaire. II me fallut donc remettre
l’epreuve à d’autres tems ; et à ce
dessein, j ’emplis un flacon d’une certaine
quantité de lait d’euphorbe que je gardai
pour des circonstances plus favorables.
L’opinion générale des colons sur le suc
de cette plante , est qu’il donne la mort en
Coagulant le sang, et que par conséquent
c’est un poison stupéfiant et narcotique.
Pour moi , j*en doute fo r t, d’après les corn*
L 4