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courroies, les pieds et la tête en dessus;
Dans cet -état il formoit un paquet de six
pieds carrés sur trois pieds et demi d’épaisseur.
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L ’embarras de traîner avec moi un pareil
fardeau pendant toute ma route, me fournit
d’abord l ’idée de le laisser en,dépôt chez
mes bons voisins les Caminouquois, poùr
le reprendre à mon retour. Mais dans l'hypothèse
où je réussirois à traverser l ’A frique,
il n’y avoit point de retour pour
moi ; et dans celle où les événemeîis me
forceroient de revenir sur mes pas, pou-
vois-je espérer qu’ils me permèttroient de
repasser par la horde j et puis j.’aurois voulu
le confier, et en même tems le couver de
mes yeux. Je portois un trop vif attachement
à ce trésor précieux pour l’abandonner.
D ’un autre côté, j ’avois à craindre que
la peau ne se gâtât faute de soins";‘pendant
mon absence ; et je sentois combien il me
seroit difficile d’en avoir une- autre-, si je
perdois celle qu’un si heureux hasard m’a-
voit procurées T o u t , jusqu’aux soins que
je venois de prendre pour la préparer, me
la rendoit précieuse.. Ainsi donc je ne songeai
geai plus qu’à la conserver, et voici le parti
que je pris.
En reflechissant sur maroute et en m’orientant,
il me sembla que je ne .devons pas être
éloigné de plus de dix-huit ou vingt lieues
de mon camp sur la rivière d’Orange, et
que par conséquent fine me.falloit que quatre
jours pour m’y rendre en ligne droite.
P P # ven té , des deux motifs qui m’a-
voient déterminé à ma petite exclu sion , ie
n .cn voyois qu’un de rempli; et ce n’étoit
point assez d’avoir connu Ja giraffe, fi me
a estoit encore à acheter des boeufs pour mes
voitures; mais le pays étoit trop stérile et
les CaminQuquois trop misérables pour four-
nir a de pareilles emplettes. Je me proposais
de tenter , dans d’autres contrées voisines,
quelque autre course excentrique du
meme genre , qui peut-être seroit plus heureuse;
en attendant, je ne, m’occupai qu’à
mettre en sûreté ma girafïe.
Mon plus grand embarras étoit de savoir
comment je l ’emporteroisv Sans voiture et
meme sans possibilité d’en fkire arriver une
jusqu’à nous, je n’avois pour cette expédition
que mes boeufs. Mais indépendant
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