
inquiétudes désespérantes qui m’avoient affligé
si long-tems, furent pour moi unè distraction
si puissante qu’à peine m’apper-
çusqe de la rigueur du ciel.
Je ne revis le soleil qu’en arrivant dans
cette vallee qu’arrose la Rivière-Verte. Là,
ranime par la vue de cet astre bienfaisant,
rechauffe par ses rayons , je marchois gaiement
sous son influence salutaire , quand
tout-à-coup ma troupe fut arrêtée par des
cris qui paroissoient partir du haut de la
montagne. Nous jettâmes les yeux de ce
côté , et nous vîmes une douzaine de zè*
bres qui, réunis au pied d’une roche , à
l ’abri du vent, s’y chauffaient au soleil.
L ’espace qui nousséparoit d’eux étoit extrêmement
escarpé, et nous ne pouvions les
approcher qu’en faisant un long détour qui
eût exigé une marché trop longue et trop
pénible, et consumé inutilement un tems
que je n’àvois point envie de perdre. Néanmoins
, pour leur faire peur et me donner
le plaisir de les voir courir, je tirai un
coup de fusil. Le lieu où nous nous trouvions
étoit très-favorable à une répercussion
d’écho 5 et en effet, l’explosion, après
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avoir retenti à nos côtés, alla frapper la
roche au, pied de laquelle étoient les zèbres,
et revint se répéter à nos oreilles.
• Les zèbres, qui , trompés par la répercussion
du bruit et croyant qu’il venoit du
haut de la montagne , descendirent de leur
roche au grand galop, et accoururent vers
nous, en cherchant à fuir par la vallée.
Cependant, quand ils nous eurent apper-
çus, ils se détournèrent, firent un crochet 5
puis , gagnant le côté de la montagne opposé
à celui qu’ils venoient de descendre ,
ils disparurent.
• Une femelle seule , ou moins effarouchée
sans doute , ou trop fatiguée pour gravir la
hauteur, abondonna la troupe et continua
de suivre le vallon. Jusque-là j ’avois, quoiqu’avec
peine, retenu mes chiens. Mais
quand je vis. l’animal à portée d’être chassé,'
je les lâchai, et bientôt ils l’eurent atteint.
Jager sur-tout la joignôit de si près
que, de tems en teins, il lui mordoit les jarrets
et les cuisses 5 et comme c’étoit le plus
grand et le plus fort de ma meutte , à chaque
coup de dents il emportait la chair ou
la peau. Van der Westhuysen fils et moi