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de destruction dont jé m’environnois à
mon g r é , avec une poignée, d'hommes ,
quelques armes misérables , le mince attirail
d’un brigand, tout cela reportoit souvent
ma pensée en arrière, et me rappe-
loit les histoires dé ces brigands bien plus
fameux , bien plus illustres, bien plus honorés
, et bien autrement impérieux ;
portés à la domination, insolens dans leurs
volontés, remplis de caprices ; et je m'éton-
nois de ce que , dans ce ferment da passions
qui agitent les hommes, on ne vît pas plus
souvent des villes entières livrées aux flammes
avec leurs habitans, leurs richesses et
leurs arts, et de grands poètes, à la suite
de ces grands spectacles, érigeant en héros
les furieux qui s’en amusent,. et les
proposant pour modèles aux furieux qui
leur succéderont. (
Ma promenade du matin n’offrit rien,
de nouveau à mes recherches. Mais en
longeant le bois du rivage, je fus, fort étonné
d’entendre quelques coups de fu s il, et
je demandai à Sclioenmaker, qui m’accom-
pagnoit, de quelles mains ils pouvpient
partir. Lui , qui avoit demeuré sur les
bords
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bords de la Grande-Rivière, et qui par com
sequent connaissait la contrée , me dit que
ces tireurs étaient prùb'làblement Mathys
Moodel etBérnfby, qui chassoient auxhyp-
popotames.
Je connoissois de norh ces deux hommes,
dont l’u n , comme Schoeirmaker , étoit un
déserteur de la Compagnie. Mais je savois
aussi, què bien différèns de’ ce brave homme,
c’étaient les scélérats les plus détermines
I peut-être qu’eut toute * l ’Afrique^
J avois entendu parler de leurs forfaits,
et je n’ignbrois pas que leur nom étoit cri
telle exécration, qu’on lés avoit proscrits
jusque dans les Colonies mêmes.
D ’après ces connQissances, je ne çonee-
voîs pas trop çomnient ils s’étoient procuré
de la poudre. Il ést vrgi que, pour dé
pareilles gens rien ne devoit être sacré j et
qu’ils pduvoient en avoir eu par quelque
vol ou quelque assassinât nouveau. D ’un
autre cote, il etoit possible qu’ils eussent
rencontre Pinard ; et qne, par crainte ou
par avarice, il leur en eût vendu pour du
bétail.
Tandis qu’en marchant nous raisonnions
Tome I I . Q