
sur ces conjectures, nous apperçumes nos
deux chasseurs. .C’étoit Pinard lui-même ,
accompagné d’un homme que je pris pour
an Hottentot Baster , et que Schoenmaker
¡me dit être Bernfry.
La vue des deux lions dont la veille nous
avions apperçù les traces,. ne m’eut pas ins-;
piré plus d’horreur ; mais la présence de
Bernfry. su r-tout- fit pâlir Schoenmaker. Il
avoit été le voisin de ce bandit, lorsqu’il
îiabitoit les bords de la Grande-Rivière ;
e t, par les querelles journalières qu’il avoit
avec lui, il s’étoit vu obligé de s’en éloigner,
et d’aller fixer sa horde dans le lieu
où je l ’avois rencontré.
Les deux chasseurs nous avoient apper-
çus ; ils vinrent à nous*.. Schoenmaker, anb
mé de ressèntiment ù la vue de son enner
yni, et obligé de se contenir, n’eut que le
tems de me dire , en baissant la voix ; tenez
vous bien sur vos gardes, le malheureux
vous jouera quelque tour.
Pinard m’aborda, pour m’apprendre
qu’à une demirlieue plus loin je trouverais
un campement favorable pour mon monde
et mes bestiaux, et il s’offrit de m’y conduire.
La nouvelle me devenoit d’autant
plus agréable, que c’étoit précisément là
ce que je cherchais. Je m’y rendis, sous sa>
conduite , avec toute ma caravane ; mais il
ne m’avoit pas dit que j ’y trouverais sa voiture
, et l’idée de me voir condamné de
nouveau à son voisinage m’affligea beaucoup.
.Cependant , comme je lui devois une
sorte de reconnaissance pour l’avis, qu’il •
venoit de me donner , je le priai d’entrer,
avec son compagnon dans ma tente, quand
elle fut dressée ; et leur fis servir du th é ,
du caffé , du chocolat et deux bouteilles'
de vin. Mon intention, en leur procurant
ainsi une après-dînée à la hollandoise ,
étoit de les occuper et de les distraire jusqu’à
la nuit, et par-là d’éviter entre Schoenmaker
et Bernfry des démêlés qui auraient
été inévitables, s’ils n’avoient pas été tous,
deux sous mes yeux.
Mon espérance fut trompée ; et cedurent
les. précautions mêmes que j ’avois prises,
pour éviter une- querelle, qui la firent
naître,’
Pinard, mauvais plaisant et naturellement
grossier, voulut dans la conversai
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