
mais histoire ne fut comptée plus longuement
y et d’après le service qu’il venoit de
me rendre, je me voyois pourtant obligé
de l ’écouter.
A l’entendre, il se rendoit chez les grands .
Namaquois sans autre projet que celui de
chasser les éléphans et de faire le commerce
de l ’ivoire. Mais je connoissois assez
l ’aventurier, pour me défier de ses déclarations.
J’avois vu d’ailleurs de quoi étoit
composée sa pacotille j et je n’ignorois pas ,
moi, qui voyageois aussi, que ce n’est point
avec des quincailleries, du tabac et des liqueurs
fortes qu’on tue des éléphans. Son
seul et véritable but étoit l’achat et le com-
merce des bestiaux ; et s’il annonçoit avec
tant d’affectation de prétendus projets de
chasse, ce n’étoit qu’un prétexte pour détourner
loin de lui les soupçons et les yeux,
de l’administration. Ceci exige une explication.
' Les bestiaux sont un des objets dont la
Compagnie s’est réservé exclusivement le.
commerce avec les Sauvages ; elle en dé-,
fend le trafic sous des peines très-rigoureuses.
Mais dans des contrées aussi éloignées
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de la surveillance du gouvernement, comment
l’empêcher ? et quand il manque de
force pour faire exécuter même ses loix
judiciaires, où en. trouveroit-il pour l’observation
de ses loix fiscales ? La prohibition
dont il s’agit est d’autant plus facilement
éludée, que personne n’est Spécialement
chargé de la maintenir, que tout le
monde est intéressé à la frauder, et qu’avec
l’assurance de l’impunité on a de plus
celle du bénéfice.
Encore, si les fraudeurs n’étoient coupables
qu’envers le gouvernement ! mais
que d iniquités ! que de crimes et d’horreurs
! Quelques colons, bien armés, se
reunissent ensemble puis, tombant tout-à-
coup sur une horde isolée, ils obligent
ceux qui la composent de leur amener
tous leurs troupeaux, y choisissent les bêtes
qui leur conviennent, et en donnent
le prix qui leur plait. Que peuvent, contre
ces brigands redoutables, de malheureux
Sauvages a qui les armes à feu sont inconnues
! S ils entreprennent de résister, s’ils
se permettent meme quelques murmures ,
leur vie n’est pas en sûreté. Aussi, à peine
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