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étoit donc de faire chercher de nouveau
un canton qui fut moins brûlé. J’envoyai
tout mon monde à la recherche ; et vers le
soir on revint m’en annoncer un où. l’herbe
des Eoschjesrnan étoit un peu moins
desséchée qu’ailleurs. Il est vrai qu’il fal-
loit deux heures aux bestiaux pour s’y rendre
y mais n’ayant: point à choisir, je me
Vis forcé , pour quelques jours au moins ,
d’user de ce secours, tout pénible qu’il
étoit y et en conséquence je réglai que tous
les matins huit de mes gens, bien armés r
iraient conduire le troupeau et le ramèneraient
le soir. Il ne fut pas nécessaire d’y
envoyer mes chevaux. Le fleuve nourrissoit
en quelques endroits une sorte de roseaux
dont ils mangeoient avec grand appétit les
sommités et les jeunes pousses. J’avois trouve
aussi de petits concombres épineux, de
la grosseur d’un oeuf de poule , qui nous
faisoient une nourriture excellente , et dont
les feuilles étoient pour eux une friandise.
Bientôt même ils surent les trouver sans
moi. Quant à mes chèvres et à mes moutons,
ils s’accommodoient très - bien des
feuilles et de l ’écorce des arbrisseaux qui
e n . A f r i q u e . 2 .3 i
croissoient à l ’ombre des grands arbres. Il
n’y avoit que nos boeufs et mes vaches que
je ne pouvois soustraire aux effets de 1 intempérie
de la saison y et de tous les bestiaux
c’étoient pourtant les plus nécessaires
.P
our nous, le voisinage de la rivière attirait
dans la plaine une quantité considérable
de gibier qui nous promettoit une
nourriture suffisante. Nous avions en
abondance des gazelles spring-bock , des
zèbres, des coudoux, des autruches et des
oiseaux de toute espèce. D ’aflleurs, la pêche
nous offrait encore une ressource.
Il est vrai que, n’ayant fait pecher qu a
la ligne , nous ne prîmes que deux especes
de poissons : l’u n , seinbable à nos carpes du
Rhin; l’autre noire, sans écailles, longue
de quinze à dix-huit, pouces, et de la forme
du barbeau. Le fleuve en avoit beaucoup
d’autres espèces plus petites que nous
prenions avec notre filet et qui nous faisoient
d’excellentes fritures.
Cette rivière contenoit aussi beaucoup
d’hippopotames ; de tout côté je les enten-
dois mugir et souffler. Curieux de les ob—
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