
la violence de ses emportemens. Obligé de
ménager tous ceux avec qui et chez qui
j ’avois à vivre, j ’eusse désiré n’avoir à me
plaindre, ni de Schoehmaker, du zèle et
de la fidélité duquel je ne pouvois jusqu’à
ce moment que me louer, ni de Bernfry, dont
les crimes peut-être étoient exagérés. Je
pouvois me rendre maître et des uns et des
autres, et leur imposer à tous la loi. Mais
il eut fallu agir toujours, comme j ’eusse du
agir dans cette circonstance; et de promeneur
que je voulois être, me rendre dominateur
et chef dans ces contrées paisibles.
C’étoit beaucoup trop d’embarras pour
un chasseur d’oiseaux. J’aimois mieux traiter
cette affaire à l’européen e, par des procédés
civils et tout niaisv :
D ’après mes maximes, je fis inviter, le
lendemain màtin, Pinard et son camarade,
à venir déjeuner avec moi. Schoenmaker
fut de la partie. Les têtes s’étoîent un peu
calmées pendant la nuit. D’ailleurs, pour
ne pas les échauffer de nouveau, j ’eus soin
qu’on ne servît ni eau-de-vie, ni vin / et
ma précaution eût tant de-succès, que je
réussis à réconcilier les trois personnages,
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et à les déterminer à se toucher dans la main,
selon le protocole d’amitie hollandois.
Bernfry - avoit son domicile et ses trou-
' peaux dans une horde éloignée de quelques
lieues. Il me proposa d’y conduire les miens j''
m’assurant que nulle part dans lè canton,
jë ne trouvèrois p pour les rétablir, un
meilleur hérbage. Quelque intéressant que
fût-cet avis, je voulus lë vérifier, avant;
d’y donner confiance. Je me rendis sur les
lieux avec mon KlaaS et Bernfry, et vis
que celui-ci ne m’avoit point trompe. Nul
pâturage, depuis' le Namero, ne s’etoit
même montré encore aussi bon. A la vérité
, on n’y trouvoit que Xherbe des Bosch-
je s m a n , à laquelle mes animaux n’étoient’
point habitués. Mais le pays n’en fournit,
point d’autre , et cette-herbe au moins,
quoiqu’un peu sèche, ne laissoit pas d’être
abondante.
Bernfry resta dans sa horde , en attendant
que j ’y revinsse avec ma caravane.
Pour nous y rendre , il nous-avoit fallu six
heures de marche, quoiqu’à cheval ; et
par conséquent je ne pouvois regagner de-
jour mon camp. Dans la •crainte de rn’é -
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