
toit encore de sa liqueur favorite. Je recommençai
l’épreuve du jour précédent,
et elle réussit de nouveau. Cloete renou-
vella sa promesse ; mais, pour empêcher
qu’il ne l'a retirât encore, j ’exigeai, quand
il l’eut donnée, qu’il me conduisît dans
son parc , et que là je pusse choisir les
bêtes qu’il venoit de ine vendre. A l’inspection
des dents et de cornes, toutes me
parurent avoir plus de dix ans de service ;
et néanmoins j ’étois trop, heureux de les
trouyer.
De retour dans la cabane, je lui fis mon
obligation payable au Cap , et tirée, à l’ordre
d’un de ses amis, sur Serrurier, le
nouveau fiscal. Mais ces quatorze boeufs
achetés ne me formoient qu’un attelage ;
et j’eusse, bien désiré en avoir deux. Ainsi
donc, en écrivant le billet, je proposai à
mon homme de lui eh faire un du double ,
et de lui acheter par conséquent le double
d ’animaux. Pour donner du poids à cette
proposition, je l’accompagnai d’un grand
verre d’eau*-dervie.?Il avala tranquillement
la boisson ; puis il ajouta, sans s’émouvoir,
que non-seulement il ne me vendrait pas
une bête de plus, mais qu’il me conseil-
loit même avec franchise de lui laisser les
autres ; que je venois de faire un marché
de dupe ; qu’à six lieues plus avant dans
les montagnes étoit une horde hottentote
où j ’aurois trouvé à conclure des achats
bien autrement avantageux que le sien ; et
qu’au sur-plus il m’exhortdit lui-même à.
m’y transporter.
Cet aveu naïf, tout grossier qu’il étoit,
ne pouvoit manquer de me plaire , puisqu'il
m’indiquoit le moyen de completter
mes attelages. . Malgré la neigé qui tomboit
touffeurs très-abondamment, je donnai aussitôt
des ordres pour le départ, et je demandai
à Cloete des renseignemens pour
me rendre à la horde. Mais quand il fallut
nous mettre en route, je me sentis
tout-à-conp tellement transi, tellement pénétré
du froid, que la force et le courage
me manquant à la fois , je rentrai dans la
cabane et me contentai d’envoyer mes gens,
en leur livrant toute la quincaillerie que
nous avions apportée avec nous, et les
chargeant de l’employer pour acheter autant
de boeufs qu’ils pourraient en avoir,
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