I
Selon Blumenbach et plusieurs auteurs, « la dégé-
nération des animaux domestiques et les diverses
variétés qu’ils présentent expliquent parfaitement
les différences qu’on remarque chez les différents
peuples qui composent le genre humain ; il leur
paraît alors inutile d’y reconnaître plusieurs espèces.
»
Il nous semble que cette comparaison entre les variétés
des animaux domestiques et celles que présente
le genre humain n’est ni exacte ni logique. En effet,
ces dernières sont isolées les unes des autres ;
elles occupent de grands espaces sur le globe, des
continents entiers, avec tous leurs caractères propres.
Les animaux domestiques, au contraire, présentent
toutes les variétés dont ils sont susceptibles, dans le
même lieu, dans le même coin de terre. On voit donc
que, pour que la comparaison fût exacte, il faudrait
qu’on rencontrât à la fois en France, par exemple, à
côté de ses habitants actuels, des nègres, des Malais,
des Américains, des Aiongols ; de plus, la plupart des
animaux domestiques produisent des petits qui offrent
h la fois la réunion de plusieurs couleurs, telles que
le noir elle blanc ; chez l’homme, le noir ne produira
jamais que des noirs, et le blanc que des êtres de sa
couleur.
Alais poussons ce système dans ses dernières conséquences.
On connaît les types dont la plupart des
animaux domestiques sont descendus. Plusieurs de
ces types existent encore à l’état sauvage. Alors ie
type dont sont descendues toutes les variétés b u -
maines doit exister aussi, ou du moins, s’il est éteint,
on peut rechercher au milieu de toutes les races celle
qui s’en rapproche le plus. Ce n ’est point au milieu
des nations les plus civilisées qu’on cherchera ce type,
car plus que toutes les autres elles sont soumises aux
causes de dégénération, mais bien plutôt parmi les
peuples sauvages, les plus voisins de l’état de nature.
Les hideux sauvages de la Nouvelle-Hollande, quelques
tribus du sud de l’Afrique ou de l’Amérique nous
paraissent les plus propres à remplir ce rôle.
Il nous semble que Blumenbach eût été davantage
dans le vrai, s’il eût comparé les dégénérations des
animaux domestiques, à celles que présente chaque
espèce ou chaque race d’hommes en particulier. Chez
chacune d’elles, en effet, on trouvera tous les phénomènes
que présentent les animaux domestiques,
et pour prendre nos exemples sous nos yeux, en
France on trouvera à la fois des hommes petits et
grands, maigres ou chargés d’embonpoint, cle structure
et cle conformation variant à l’infini, cle formes
cle crâne et de visage très-diverses, cle cheveux touffus
ou clair-semés, lisses ou frisés enfin on
trouve également des mélis à différents degrés.
Les variétés des animaux domestiques ne sont pas
autre chose que cela.
Et au-dessus de toutes ces dégénéralions, oeuvres
de l’homme, s’élèvent et persistent h travers les
siècles les caractères spécifiques, oeuvres immuables
de la nature.