et la cruelle tyrannie des colons, étoient
l ’unique cause de la guerre, et que le bon
droit étoit du côté des Caffres; ils m’apprirent
que les Bossismans, espèce de vagabonds
déserteurs, qui ne tiennent à aucune
nation, et ne vivent que de rapines, profi-
toient de ce moment de trouble pour piller
indistinctement, et Caffres, et Hottentots,
et colons; qu’il n’y avoit que ces misérables
qui eussent pu engager les Caffres à com-
prendre dans la proscription générale tous
les Hottentots, qu’ils regardoient comme des
espions attachés aux blancs, et dont ceux-ci
ne se servoient que pour leur tendre des
pièges plus adroits : ce dernier trait n’étoit
pas dénué de fondement, mais ne pouvoit,
dans aucun cas, s’étendre aux hordes les
plus éloignées. Ainsi l’innocent suivoit le
sort du coupable. Eh ! comment des sauvages
eussent-ils été capables de faire d’eiix-
memes une distinction que les peuples civilisés
ne font pas ! Ils m’apprirent enfin que
les Caffres s’étoient procuré quelques armes
à feu , enlevées dans ces habitations ravagées
, ou dérobées à ces Hottentots-cûlons
surpris à la découverte.
Je fus instruit enfin, dans le plus grand
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détail, de tout ce qui s’étoit passé , des attaques,
des combats qui s’étoient donnés, et
dans lesquels, tout en faisant de grands ra-
Vages, les Caffres cependant avoient toujours
eu le dessous ; ce qui ne me parut pas
étonnant : la sagaye, leur arme la plus
meurtrière, et qu’ils manient avec la plus
grande adresse, ne saur oit soutenir la comparaison
avec nos armes à feu, employées
par dés chasseurs qui ne manquent jamais
leur coup. Tout ce que j ’apprenois m’inté-
ressoit fo r t , la plus légère circonstance ne
pouvoit m’être indifférente ; je me trouvois
engagé, pour mon propre compte, dans les
©vcnemens et les hasards de cette guerre,
puisque j’étois actuellement, pourainsi dire,
sur le champ de bataille, et que je touchois
au moment où, navré jusqu’au fond de l’arne
du spectacle affligeant que j’avois incessamment
sous les yeux, pénétré du plus ardent
désir de rendre service à dès infortunés que
je ne connoissois "point, que je n’avois jamais
vus, que je ne reverrais jamais , mai,g
dont le triste sort excitoit ma compassion,
j’allois, si tout ce monde eût voulu me
suivre, traverser cinquante lieues de la Caf-
frerie, au risque de tout ce qui auroit pu