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que ce ne fût pas l’air nitreux. Mais M. Ber-
thollet m’a aflitré que l’efprit de nitre fe coloroit
dans les flacons parfaitement pleins. J’ai vu constamment
la Lumière jaunir, l’efprit-de-vin verdi
par les feuilles vertes qu’on y avoit mifes en
digeftion, lorfqu’il y avoir de l’air dans le flacon :
mais il ne jauni ffoit point quand le flacon étoit
parfaitement plein. Quoi qu’il en Soit , je n’ai
point tenté la répétition de l’expérience de M. Gio-
b e r t , parce que ma pompe pneumatique ne
m’a pas paru anez parfaite, pour faire une expérience
aulli délicate. Cependant la coloration
dé la lune cornée fous l’eau bouillie , & l’air
fourni par la feuille dans l’eau bouillie chargée
d’âir fix e , prouveroient que . la Lumière peut
s’unir à l’oxygène fans l’intermède de l’air commun.
Il,eft vrai que l’on pourroit dire que la
Lumière déçompofe l’eau, & en foudre l’oxygène,
mais les plantes expofées fous l’eau bouillie au
foleil ne donnent point d’air pur : ce qui prouve
pourtant que l’eau ne fauroit y être alors dé-
eompofée.
Après ces principes & ces faits, qui m’ont Semblé
fondamentaux, je veux montrer l’influence direéte
de la Lumière fur les végétaux par des expériences
: & pour cela, je ferai voir que la Lumière
agit fyr la végétation , fur la couleur des végé-
laux vivants & morts , fur leur tranfpiration, fur
quelques-uns de leurs mouvements , fur l’air
qu’ils rendent. Ce font à-peu-près les phénomènes
généraux qui réfultent à préfent pour
nous, de la combinaifôn de la Lumière avec
les plantes. On ne peut pas douter qu’elle n’en
produife d’autres, peut être aufli remarquables;
mais ils nous font parfaitement inconnus.
i.° On fait quelle efi l’influence de la chaleur
fur la végétation, & comme cette chaleur dépend
beaucoup de la Lumière que le foleil vérfe fur
la terre, il me Semble naturel de confidérerd’abord
la Lumière , comme un corps échauffant. Peut-
être l’augmentation de la chaleur dans le corps
éclairé immédiatement par le foleil, efi produite
par l’effet de l’aélion des rayons qui tombent'
fur le corps qui les reçoit ; peut-être la Lumière
efi une Source de chaleur , parce qu’elle dégage
la chaleur elle — même hors des corps qu’elle
éclaire, ou peut-être encore, parce qu’elle développe
la chaleur ou le calorique qu’elle contient
; alors elle fert à former l’air, pur , en
combinant ce calorique avec l’oxygène quelle
enlève à l’eau , ou à l’air fixe dont il efi une partie
compofànte. Mais, quoi qu’il en foit, la Lumière
a la propriété d’échauffer les corps qui lui font
expofés, comme on s’en apperçoit avec le miroir
ardent, ou comme on l’éprouve lorfqu’on fe
promène au foleil, ou lorîqu’on y expofe un
thermomètre , que l ’interpofition feule d’une
feuille de papier fera bailler, ou que la teinture
de la boule en noir fera monter, quoique
îfetts uij baia d’eau cliaude il ne s’élève pas alors
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plus haut , que ceux qui ne feroient pas peinte
de cette couleur. D’ailleurs on fait que la chaleur
efi proportionnelle à la quantité de la Lumière
reçue ; à la direction de la Lumière quand elle
fe verfe fur la terre ; à la propriété des corps
pour la recevoir ou la réfléchir , ^tc.
L a L umière influe sur la couleur des
végétaux. Je l’ai prbuvéaux mots, couleur des
plantes, étiolement ; & , à cet égard, je ne crois
pas qu’il puiffe refier le moindre doute. Mais ce
"qu’il importe de remarquer, ce font les différences
qu’il y a entre les plantes privées de l’action
de la Lumière, & celles qui en ont reçu
l’influence ; parce que ces différences qui font
caraéfériftiques, montrent clairement que la Lumière
produit un changement fenfible dans leur
état conflitutionnel.
On voit d’abord que les plantes étiolées font
jaunes & très-effilées, que leurs feuilles font très-
petites, qu’elles ne vivent pas long - tems dans
cet état. On obferve encore , qu’une plante bien
portante, bien verte ^ peut avoir une partie étiolée
, fi cette partie feule végète à l’obicurité. On
y apprend que la couleur de plufieurs fleurs , &
de plufieurs fruits, fort du pinceau lui-même
de la Lumière ; tandis qu’il y a quelques fleurs
qui fe colorent fort bien à l’obfcurité.
Dans mes Mémoires Phvfico-chimiques, T. I l ,
publiés en 1782 , j’ait fait voir encore en traitant
ce fu je t, que le parenchyme étoit le fiège
de l’étiolement, que les plantes étiolées ne don-
noient point d’air au foleil, qu’elles fermentoient
plus vite que les plantes expofées à la Lumière ,
qu’elles avoient moins de faveur qu’on adou-
cifloit le goût infupportablé de quelques plantes
vertes comme le ceféri, en les privant de l’action
immédiate de la Lumière ; enfin , que les
fruits crûs à l’ombre étoient moins fapidés.
J ’ai fait voir enfuite dans une analyfe chimique
de ces plantes étiolées, & de celles qui ne
l’avoient pas été , que la couleur .des liqueurs
extraites hors des plantes étiolées, étoit moins
foncée , que ces plantes fourniflbient moins
d’huile, moins d’alkali volatil. J ’ai montré qu’elles
font plus aqueufes que les plantes vertes, qu’elles
donnent de l’air fix e , & prefque y moins d’air '
inflammable, la moitié moins de matière fixe, &.
beaucoup plus de parties vaporitabfes, qu’elles fon t,
à cet égard, dans le rapport de 13 à 5 ; mais leurs -
parties réfineufes font à celles des plantés naturelles
dans le rapport de 2 à 5 J ’ai trouvé
dans la dixième partie des. Annales de Chimie
de M. Crell, pour Z789, que M. Haffenfratz
avoit lu à l’Académie des Sciences de Paris, un
Mémoire ,. où il confirmoit ces expériences,
en montrant de nouveau que les plantes
étiolées, contenoient plus d’eau , moins de
charbon , & moins d’air inflammable que les
plantes bien portantes. fÈnfin , j’ai appris dans
1« même cahier des Annales de Chimie , une'
découvert©
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découverte de M. Vinrerl , qui a obfervé que
l ’air déphlogilliqué rend le bleu de Berlin vert : &
comme j’ai expliqué la couleur verte des feuilles,
en fuppofant quelle étoit une efpèce de bleu
de Prude ; j’ai penfé qu’il feroit poffible que
la Lumière tn décompofant l’air fixe., & en
formant l’air pur avec fon oxygène, opérât ce
changement de couleur, ou plutôt déterminât
cette couleur .verte.
Dans le III volume de mes Mémoires Phyfi-
co-chimiques , j’ai montré que la Lumière déco-
lorpit la teinture verte d’elprit-de-vin. faite avec
les feuilles, quand les vameaux qui la renferment
ont une libre communication avec l’âtinof-
phère , ou quand ils contiennent une certaine
quantité d’air pur. Cette expérience annonçoit
encore, comme toutes celles que j ai faites fur
ce fujet , que la Lumière agit fur la réfine de
la plante , puifque c’eft cette partie que l’efprit-
de - vin diffout ; elle fait connoître peut - être
encore comment le foleil ôte la couleur verte
aux feuilles sèches, qui font encore dans le cas
de cette matière verte difloute dans l’efprit-de—
vin. '
J ’ai fait voir enfin , que la Lumière altéroit
la couleur de tous lès. b ois , dune manière tres-
fenfible, .& fouvent très-prompte dans quelques
efpèces,. . comme dans le bois, d’épine vinette ;
mais j’ai démontré aufli que cette aétion de la
Lumière, fe portoit uniquement encore fur la
partie réfineufe. On en trouvera les détails dans
meS; Mémoires Phyjico-ckimiques , T . IL p • 3°4- ;
11 paroi t clairement de-là, que la partie réfineufe
qui efi verdie par la Lumière, efi cette même
partie que la Lumière décolore dans d autres
circonftances; & que c ’efi toujours lur la réfine
des végétaux que là Lumière exerce fon influence.
C ’efi donc cette partie qui fouffre dans les plantes
étiolées., c’eft donc elle qui efi alors- moins
inflammable , & qui contient par c o n fè ren t ,
moins d’alkali volatil, ou qui laifle moins tl hydrogène
pour fe Combiner avec la mofette.
Il me femble qu’on peut conlidérer aufli la
Lumière , comme an mordant dans la teinture
verte. La Lumière, en pénétrant la liqueur, oc-
çafiQnne un changement qui détermine la cou/
leur prête à fe manifefter, foit par une combi-
naifon réelle qui produit un précipité, foit par
fon aétion fur l’air, ou fur l’eau qui donne lieu
au jeu des doubles .affinités. Il efi pourtant vrai
que, dans les teintures faites avec l’efprit-de-vin,
le précipité n’eft pas teint de la couleur enlevée,
puifqu’il efi jaune-paille , comme les plantes
qui s’étiolent. Mais mes expériences ne permettent
pas de douter que l’air pur & la Lumière
ne jouent un rôle dans ce mélange : & que 1 air
pur en particulier dégagé de fon calorique par
la Lumière , n’agiffe puiflamment pour décolorer
ce précipité, en fe:combinant avec lui ; puifqwe
ce précipité & ' cette décoloration ne peuvent
Phyfiologie végétale. Tome L er J.cre Partie.
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avoir lieu , que lorfque l’air efi en_conta<2 avec
l’efprit-de-vin coloré. _ D’ailleurs on comprend
comment cet oxygène jaunit les parties vertes clés
végétaux , quand en eonnoît l’aélion de L acide
marin oxygéné fur elles. C’eft pour cela que les
feuilles vertes féchées à l’ombre, ne perdent pas
leur couleur , & quelles jauniffent. lorfqu elles
font féchées à la Lumière. Il arrive tans doute
ici ce qu’il arrive dans la teinture d efpru-de-vin,
avec la différence que le milieu efi différent ;
mais on y trouve toujours l’aélion de la Lumière
avec l’intermède de l’air. Et on peut léinmer
avec M. Bertholict , qu’il s’opère ici une elpece
de combuftion dont on obferve habituellement,
les effets fur l’écorce des arbres. . ,
La Lumière agit encore de même fur toutes
les plantes. Les parties vertes en reçoivent directement
l’influence l leur couleur & leur vigueur
en font 1-a preuve. Les fleurs ne font fécondes
qu’autant quelles éprouvent L’aélion de la.L umière.
Les fruits nouvellement formés, pénitent
s’ils font privés des rayons du foleil. Plufieuis
pétales lui doivent leurs nuances ; & tous les fruits
reçoivent de cet aftre leur couleur verte , & les
vives côuleurs qu’on admire enfuite dans quelques
uns, lorfqu’ils font murs. .
Si la Lumière ne paroît pas néceftaire pour
la coloration de tous les pétales , elle peut y
influer en pénétrant le bouton qui contient la
fleur même. Il efi certain que la Lumière agit
également fur les teintures à i’efprit-de-vin laites
avec les pétales, & quelle les décolore, comme
celles qui ont été faites avec ie-s feuilles.
Mais il y a un phénomène particulier dont
j’ai rendu compte dans mes Mémoire s fhyjico-chimiques
, T. I I I , p. 1 19> qui mérite quelqu attention.
Si l’on met dans l’efprit-de-vin, des pétales
de rofes de damas, ils le teignent en rouge-
briqueté, & cetre teinture colorée, paffe au
violet quand on l’expofe à l’action delaLumière,
mais elle fe détruit au bout d’un certain temps-.
Les pétales retirés alors de l’efprit-de-vin font
blancs. Cependant, fi on les expofe à la Lumière,
& à l’air, ils reprennent leur couleur au bout d un
1 quart-d’heure. Si l’on replonge ceux-ci dans 1 el-
| prit-de-yin , il s . y. perdent la couleur qu ils
avoient reprife ; & ils ne la retrouvent au loleii,
qu’au bout de deuxbeures. Après une décoloiauori
nquyelle , par l’efprit-de-vin , les,, pétales ne
reprennent au fo le il, & à l’a ir , une couleur
pâles, qu’au bout de fept heures. ^ . . .
Il paroîtroit que la Lumière ferviroit ici de
diffolvant à la matière colorante ; pu que la
couleur des pétales ne peut fe manifefier que
lorfqu’elle efi volatilifée par la lumière, qm ne
fauroit agir direéîcment fur elle , que lorfqu elle
efi à la furface du pétale / ou bien encore peut-
être efi-il néceftaire que la partie fpu îtueufe de
l.’efprit t de- vin foit abfolument vaporifée par
l’aélion de la Lumière fur elle. Mais je neutre