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les arbres font plantés pour venir au-devant de
la lumière ; & que , lorfqu elles font élevées dans
un lieu obl'cur, elles le tournent vers le plus
petit filet de lumière qui peut y pénétrer. Ces
rapports des Feuilles avec la lumière| confirment
encore ce que j’ai d it , que la lumière favori-
foi t la fuéliôn & l’évaporation des plantes.
Voyei L um iè r e , Suction.
Mais il y avoit une ai tre découverte à faire
pour compléter cette théorie. Onconnoilfoit lés
rapports des différentes furfaces de Feuilles avec
la lumière, il falloir encore découvrir ceux quelles
avoient avec l’eau. M. Bonnet nous a appris que
la plupart des plantes herbacées tiroient également
l’eau par les deux furfaces de leurs Feuilles ;
mais que la plupart des Feuilles des arbres &
des arbufles tiroient fur-tout l’eau par leur fur-
face inférieure, qu’elles en tiroient beaucoup.,
quelles pouvoient vivre ainfi long-tems , qu’elles
pouvoient nourrir de cette manière d’autres
feuilles, & même-des fruits. Cette expérience
explique d’abord laj pofition des branches & des
Feuilles-, on y voit clairement qu’elles font dif-
pofées de manière qu’elles ne peuvent s’intercepter
l’influence immédiate de la lumière & de
l’humidité qui s’élève de la terre; que les herbes
qui font très-petites & très-baffes, qui habitent
la région de l’humidité fortie de la terre'',, pompent
également l’eau par les deux furfaces ; enfin
l’on voit combien les Feuilles font dès-organes
nourriciers & importais dans les plantes,
puifque c’eft eux qui paroiffent fournir ainfi au
végétal tous les fucs qui le pénètrent, & qu’il
élabore. Voje^ L umière , Nutrition 5Suction
& T r anspiration.
Le phénomène de l’héliotropifme des, fleurs !
qui fui vent le fo le il, s’explique par ce moyen. ,
Le foleil., par fon aélipn , occafionne un deffé-
çhement particulier dans la. partie de la fleur
qu’il éclaire, & par cette contraction accidentelle
momentanée & locale des fibres, il force la
fleur à le fuiyre. .. ,
Il en efi de même dès Feuilles qui s’ouvrent
au lever du fole il, & qui fe ferment quand
le foleil fe c cuché, comme on Fobferve dans
les arbres à Feuilles conjugées, & fur-tout dans
l ’acacia : ces folioles font fur un plan horizontal;
fi 1 air s’échauffe, les folioles s’élèvent d’autant
plus au deffus de la nervure, que l’air efi plus
chaud ; elles s’élèvent même ainfi, jufques à ce
qu’elles fe touchent ; fi l’air fe réfroidit, elles
fuivent la route inverfe. L ’on produit cet effet
fur les Feuilles en approchant d’elles un corps
chaud , & en l’éloignant. M . Bonnet a expliqué
ce phénomène' d’une manière complette ; il a
vu que- la furface fupérieure1 fe contractait par
la chaleur & la lumière, tandis.que la furface
inférieure fe contraCtoit par l ’humidité. Il fit
des Feuilles fur ce principe , dont la furface
fupérîeure étoit de vélin, & l’inférieure de toile,
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& il produit?!: le jeu dés Feuilles de l’acacia,
Les ' découvertes qu’on a faites fur les gas:,
ont conduità une nouvelle-propriété des feuilles:
M. Prieflley vit que les plantes amélioraient l’air
: gâté, dans lequel on les plaçoit. M Ingenhcus
découvrit 'que les plantes avoient cette propriété,
quand elles étoient expofées au fole il, ou elles
reudoient un air très—pur - mais qu'elles gâtoient
l’air commun , par un air empoifonné qu’elles
lailfoient échapper pendant la nuit. Et moi, après
avoir confirmé la plus grande partie de ces découvertes
, je crois avoir démontré que les plantes
ne rendoient aucun gas empoifonnant dans l’obf-
curité. Voyt{ L umière.
Enfin , les Feuilles fourniffent non-feulement
de l’eau & de l’air pur , elles donnent encore des
fucs propres, comme les gommes, iesréfines, l’ef-
prit- reéleur, une matière fucrée. Ainfi, l’on trouve
la manne fur les Feuilles de pin , de fapin, dé
chêne, de genevrier, d’érable, de faule, d’olivier
, de figuier ; mais fur-tout de frêne nain &
de frêne à Feuilles rondes. Il y a donc des organes
pour ces fécrétions & pour ces, excrétions.
Mais il efi certain qu'en mâchant les Feuilles ,
on -leur trouve un goût bien décidé ; les unes font
amères, les.autres douces, les autres acides, les
autres fucrées. La Feuille reçoit fia nourriture
qu’elle élabore , elle fe déharrafle de cette pro-
digieufe quantité d’eau qu’elle fuce, & elle forme
les. fucs propres qui nourriffent la plante, & qui
lui donnent fon odeur & fon goût:
Je crois avoir montré que l'air fixe étoit encore
un aliment des végétaux que la. sève l’amène aveC
elle ; qu’il efi porté jufqqes dans les Feuilles ;
qu’il les pénètre avec la rofée par leurs pores ;
qu’il y efi élaboré dans leur parenchyme ; que
le fo k il favorife fa déeompofition, de manière
que l’air pur s’échappe hors de la Feuille , &
que la partie inflammable , où le carbonné
qui forme avec lui l’air fixe' fe combine avec
la plante. C’eft ainfi que les végétiaux reçoivent
avec les fluides qui arrofent toutes leurs parties,
lés fels, l’air fixe, la terre & toutes les molécules
cHffolubles dansjreau, & dans l’eau chargée
d’air fixe. Alors en vertu de leur affinité
avec ces fubfiances, & par un effet de leur or-
ganifation, Tes plantes s’approprient les matières
différentes de la manière la plus'convenable,
pour développer leur bois, l’écorce, les boutons,
’ lés Feuillés, les fleurs & les fruits.
Malgré tous ces ufages des Feuilles, elles ne
' font pourtant pas d’ttne utilité indifpenfable :
& l’on peut aifément le préfumer quand on
confidère combien les Feuilles font différentes
entr’elles par leur figure & leur forme , ce quï
fait au-moins fuppofer des ufages différents. Mais
il y a des plantes fans Feuilles, comme les cham-
. pignons , les agarics , les fungi :' il y a même
des arbufles comme l’éphédra qui en font
privés,
Les Feuillet
Les Feuilles font fujcttes'â des maladies qui
One des caulès, ou internes ou externes ; dans
le premier cas, l’abondance oü le défaut de,la
sève lès vices particuliers peuvent produire l’altération
des Feuilles. Un terrein trop gras; une
quantité d’eau trop grande, développent trop
■ deFeuilles, & donnent naiffanceàla phyllomanie.
La féchereffe, l’aridité du fol lailfent lortir des
Feuilles petites à moitié développées. La,rofée,
le froid, certains vents, le g e l , le dégel affectent
les Feuilles d’une manière fenfible , épaiflif-
fent leurs humeurs, en dérangent la tranfpira-
tion. Les infectes, gâtent auffi les Feuilles par
leurs piquures, y font des galles, des rugofités-,
y occasionnent des excroiftances. Les infèéces mineurs
leur ôtentfleur parenchyme. Enfin, le
plus grand nombre des arbres, & des arbufles^
quittent leurs Feuilles en Automne. Quelle en eft
la caüfe ? Ce phénomène annuel eft toujours,
très-difficile à expliquer ; après avoir médité tout
•ce qu’on a fait fur ce fujet , on defire encore
la lumière. Duhamel, dans là Phyfique des arbres,
Mm ray dans une Dijjertation de VAcadémie de ,
-Gotçingue, offrent tout ce qu’on peut favoir
à préfent fur ce fujet.
Toutes les années dans nos climats, la plupart
des arbres & des arbufles perdent leurs Feuilles
, Â il v a cette différence: en tr’eux & les
plantes herbacées , que les arbres & arbufles
perdent’ leurs Feuilles long-tems après la floraifon
& la fructification , tandis que la plupart des
plantes herbacées périffent, après avoir donné
leur fruit ; la caufe de cette différence feroit-
elle dans la nature des plantes ■? Les herbacées
©nt un tiffu plus lâche , plus fpongieux, des
vaifleaux plus grands., leurs Feuilles rirent également
l’eau par les deux furfaces ; mais, malgré
cette facilité d’être humeCtées , les'plantes
^annuelles perdent leurs Feuilles. ^ ’
Il faut obferver pourtant, que la chute des-
Feuilles eft dans la plupart des herbes, une fuite
du defféchement total de la plante qui p érit, ,
parce quelle a reçu tout le développement quelle
pouvoit avoir. Quant aux plantes herbacées vivaces,
la tige périt, &. avec elle , les Feuilles
qu’elle p o ïto it, parce que le froid arrête favé--
•gétation , & Ta vie recelée dans la racine qui
couve les boutons propres à la reproduire.
L a durée dés Feuilles fur les arbres eft très-
variable ; il y en a qui les gardent pendant l’hiver,
comme les aloës, les oliviers,les citronniers,
les mirtes dans les pays méridionaux de l’Europe
, les pins & les genévriers font toujours
verds dans les climats feptentrionaux, leurs Feuilles
prennent feulement une nuance plus obf-
cure :
Il rie faut pourtant pas croire que les Feuilles
des arbres toujours verts ne tombent jamais ,
fur-tout dans nos climats; on voit clairement
qu’ils les perdent après un tems plus ou moins
Phyfiohgie végétale-, Tome I.“ ' J.ere Partie,
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long. L ’olivier, le lentifque les perdent toutes
les années, dans la ferre , fur-tout lorfqu’elles
commencent à pouffer ; cela arrive à la même
époque aux pins, aux buis, &c.
Il y a des arbres, dont les. Feuilles féchent
en Automne, & qui relient attachées à d’arbre
jufqu’au Printems, comme on le voit dans le
chêne & le charme. Enfin , il y a des arbres qui
perdent toutes leurs Feuilles.
On eft frappé en Automne du fpeCtacle dès
arbres, dont les Feuilles perdent leur coulai r ,
& changent leur nuance verte , pour en prendre
une rouge, comme le fumac, quelques chênes,
la vigne de canada, le forbier , &c. ; il y en a
qui tombent vertes comme celle du ceriiier,
du frêne & de quelques autres.
En général, îlparoît que la furface fupérieure
des Feuilles eft la première , dont la vraie couleur
change ; .les'Feuilles qui tombent-deviennent
haines, rouges, jaunes, tachées ; fouvent la
furface inférieure eft alors verte ; la cîme,de
la Feuille , les bords changent les premiers y c’eft
pour cela que tant de Feuilles font alors bigarrées
de mille couleurs. Cela viendroit-il de-la propriété
, que la furface inférieure peut avoir de
mieux s’imprégner d’humidité ? .;
La couleur la plus commune aux Feuilles qui
tombent, eft la couleur jaune. Il feroit difficile
de définir les autres couleurs qu’elles peuvent
prendre, parce qu’elles font très-variables. 11 y
a pourtant des plantes dont le pétiole & les vaif-
feaux rougiffent avant MM chute des Feuilles ,
comme dans différens rofiers, le -platane occidental
: ce feroit peut-être uns efpèce de pana-
chure, comme en Eté.
Il y a d’autres prognofiies de là chûte des Feuilles,
’ la plupart font concaves , quand, le foleil tombe
fur elles ; en Automne au contraire,leur furface
fupérieure eft convexe, ce qui annonce un changement
confidérable dans le tiffu de la Feuille.
Murray l’a obfervé, ^quoique lé froid n’eût pas
été confidérable dans Pcp/i/ès, evonymus europeus,
le ribes niger, X&vitis laciniofa ; le bord des Feuilles
femble s’être rétréci , & cet effet ne paroîtroit-
il pas la caufe du phénomène ? Ou bien feroit-
ce l’affaifferijent produit par la foibleflè qui prë-
| cède la mort de îa Feuille, & qui feroit1 tomber
f fes bords, ou qui feroit mourir fes extrémités
I avant le corps? Il eft certain que fi une Feuille,
fur-tout une grande Feuille, eft encore adhérente
à fon pétiole , & fi elle eft en même-tems morte
& flafque, fes bords doivent pendre & la rendre
5 convexe du côté du Ciel.
Quelques Feuilles féchent avant de tomber ;
; d’autres font encore affez.fucculentes avant leur
ehute ; la direction des Feuilles paroît suffi changer
, & abandonner peu-à-peu la ligne horizontale
pour pendre. Murray a obfervé fur — tout
cela, dans le meurier blanc. Enfin, la plupart des
Feuilles lorfqu’elles font tombées , & pendant
N