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tomber; & j’ai obfervé que les feuilles firent
«lors beaucoup moins d’eau; de forte qu’il eft
poflible que cet état des feuilles influe fur le
fruit, en fai fan t réagir plus fortement le fruit
fiir lui-même, en changeant moins fes opérations,
par les fucs nouveaux qui lui font
fournis avec plus d’économie. Peut-être aufli
que l'état des fruits, qui ont reçu toute la fève
qui leur étoit néceflaire, n’en reçoivent plus,
& que les vaiffeaux qui lui portoient la nourriture,
s’obftruent & occafionnent une pléthore
dans les feuilles, qui accélèrent leur fin. Peut-
être aufli la faifon feule agit fur elles. Quoi
q u’il en foit, on affure q u e , lorfque le fruit
de l’opuntia efl prêt à mûrir, le fuc verd des
feu jle s , ou plutôt la glue verdâtre, qu’on recueille
en les pilant, devient rouge; la cochenille
qui fe nourrit de ce fuc, y prend alors
fa belle couleur.
' Les plantes,'qui fleuriffent au Printems, fructifient
communément dans l’Eté, fuivant l’ob-
fervgtion de M. Adanfon; celles qui fleuriffent
en Eté, fructifient en Automne; & celles qui
fleuriffent en Automne, fructifient en Hiver, li
îes gelées ne les font pas périr en pleine terre,
ou dans les ferres. Les -plantes qui fleuriffent
endant n»tre Hiver, comme celles du Cap de
onne-Efpérance, fructifient au Printems dans
la ferre.
Nous voyons des herbes annuelles périr au
moment qu’elles ont donné leurs graines ; &
tandis que les épinards femés en . Automne,
vivent fept ou huit mois, pUlrce qu’ils ne fleu-
riffent point; ceux qui font femés au mois de
Juillet vivent à peine un mois, parce qu’ils
fe couvrent d’abord de fleurs & de graines.
Le terme de la màtùrité des fruits pour les
plantes herbacées, relativement à celui de la
germination, & pour les plantes vivaces, relavement
à cefcüi de la feuillaifon, efl celui de
la durée de la vie, ou de la végétation apparente
des plantes. Le tems de la vie des plantes
herbacées efl d’autant plus court, que le pays
où elles croifienr efl plus chaud. Outre cela,
plus la chaleur efl égale & continue, & plus
le tems. qui s’écoule entre la germination & la
fleuraifon égale celui qui s’écoule entre la fleu-
raifon & la maturité. Cela efl vrai pour notre
climat, où la vie des plantes efl plus longue
en Été que pendant les autres faifons. Cela efl !
vrai pareillement pour les climats plus froids:.
Les arbres offrent quelques exceptions à eette
règle; il y en a qui renouvellent leurs feuilles
peu de tems avant leurs fleurs , ou même après
la fleuraifon, & ils laiffem un intervalle plus
grand entre la fleuraifon & la maturité du fruit.
On ne voit jamais le fruit fe mûrir quand
les arbres font en fèv e, & quand ils pouffent
du nouveau bois ; aufli l’on hâte cette rïiaturité
ijuand on ôrç une partie des feuilles c|ui dunj-
M A T
nuo le mouvement de la fève. Mais tes fruits
tombent, quand on leur ô t e trop tô t toute*
les feuilles qui les avoifinent.
M. Adanfon, dans l’ouvrage intitulé : les famille»
des plantes, donne un tableau de la maturité
moyenne des fruits à Paris, & le terme moyen
des degrés de chaleur néceffaires pour les mûrir.
On y remarque que le climat d’Upfal efl d’uni
mois plus t(ardif pour la maturité des fruits que
celui de Paris, comme on l’avoit déjà remarqué
pour la feuillaifon & la fleuraifon.
J ’ai lu trop tard dans le Dictionnaire «TAgrt*
culture, qui fait partie de cet ouvrage, l’excellent
article Bourrelets , qui efl rempli d’obfervationa
capitales ; on y rappelle un excellent moyen de
mettre les arbres à, fru it, découvert par M. dé
Buffon ; ce moyen confifle en’une plaie, foit annulaire
, foit fpirale, faite autour de leur tige. L ’Auteur
croit que le ralentiffement de lafèvedefcen-
danteefl alors laeaufe de cette féconditéprécocc ;
l’expérience paroît juflifier la véri té de cette idée j
mais je renvoie à l’ouvrage même ceux qui voudront
recourir à ce procédé.
On prouve encore, dans cet article, que fa
' plaie annulaire faite à la tige ou à une branche
d’un arbre , avance au moins de quinze jours
la maturité des fruits qui fe développent
au—deffus de cette p la ie ; on le fa voit déjà;
maison ne le favoit pas avec les détails qu’en a
donné cet Auteur, qui croit même que la
groffeur du fruit efl augmentée quand la plaie efl
faite au moment de la floraifon, ou du moins
quand le fruit efl noué. On trouvera dans l’ou--
vrage cité, les raifons qui autorifent cette méthode
& la manière de la'pratiquer. Il fembleroit
que la fève defeendante forcée de refluer dans
le fruit lui offre une nouvelle occafion pour fe
développer. Mais il faudroit favoir quel efl l’état
de la végétation des feuilles, du développement
des boutons ; ce qu’il arriveroit en retranchant
les feuilles près du bouton dans tous les momens;
du développement.
Il refteroit à tracer les procédés delà Chymie,
de la nature pour mûrir les fruits & les graines,
c’eft^à-dire pour amener les fruits de l’état d’un
parenchyme vert & dur, à celui d’une poire ou
d’une pêche mûre: Ce qu’il y a de v ra i, c’eff
qu il fe fait de très-grands changeniens dans leur
volume qui groflit beaucoup ; on voit que ce
tiffu de petites pierres ou de petites glandes, ce
faifeeaude fibres qui çonflituentle fruit s’écartent,
& que leurs intervalles, fe rempliffent d’une
matière parenchymateufe, qui deviqnt tous les
jours plus blanche & plus inolle.
Le goût, qui étoit d’abord très-acerbe, devient
acidq ; il fembleroit que le principe aftringent
fé change en acide végétal, & que ceç acide
végétal ou tartareux, en fe combinant avec la
la partie huileufe ^ fe métamorphose en fficrç,
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alors le fruk devient fermentefcible , & il commence
peut-être à fermenter ; c’eff alors aufli
que l’odeur & le goût fe développent peu-à-peu;
c ’efl encore dans ce moment que le folcil qui
a peint d’abord ,1e fruit en vert lui imprime ,
d’autres couleurs. On fait que les pêches & les
cerifes, qui mûriffent fous les feuilles, font blanches, ,
& quelles ont moins de goût 6c de parfum j
que les autres. •
Les fruits mûrs font pleins d’un fuc fucré
qui efl prêt à paffer à l’aigre, & qui y pafferoit
fi l’on îfarrêroit -pas cette fermentation quand
on veut qu’elle foit fpiritueufe. M. Rîgby , dans
un livre, intitulé ’.Chemical obfervations onfugar,
cherche l’origine du fucre dans les végétaux, &
il, conduit ainfi à l’hiftoire de la maturité. Il
croit que le fucre efl1 un acide, mafqué par Je
principe inflammable; cet acide fe forme par
la décompofition dé l’eau ou de l’air fixe qui
fournit l’oxygène au fucre & qui le change en
acide comme on le voit dans la préparation de
l ’acide faccharin. Les mucilages contiennent déjà
ce fucre qui les rend diffoiubles dans 1 eau. La
douceur des fruits, des plantes tropiques, montre
l’énergie du foleil pour produire le principe inflammable
, & pour le combiner avec « 1 acide
végétal. L e fucre de plomb efl un vrai fucre
produit par la combinaifon du plomb avec 1 acide
végétal, & par la perte d'une partie de fair
pur que ce dernier contenoit. La cerufe,qui n’efl
qu’une chaux de plomb imparfaite, .contient
moins d’acide végétal, ou l’acide, végétal y a
perdu moins d’air pur. En forte que le fucre
de plomb contient la chaux de plomb avec
l’acide du fucre qui étoit dans le vinaigre , ou
plutôt le vinaigre dégagé d’une partie de fon
air pur. Mais la diflillation du fucre de faturne
donne l’air inflammable qui étoit une partie
conflituame de l’acide végétal, àc l’acide du
fucre , du fucre lui-même ; puisqu’on ne fauroit
obtenir l’efprit ardent d’une diflolution du plomb
dans l’acide vitriolique comme on l’obtient du
fucre J e faturne. On fait que la chaleur feule
réduit le fucre de plomb en chaffant l’ air fixe.
Il paroît aufli que l’on adouciroit peut-être les
vins en leur ôtant l’air pur qu’ils ont abforbé.
Les phénomènes de la Maturité du fruit font
précisément les mêmes que ceux qu’on a obfer-
vés dans la Maturité de la canne à fucre, fuivant
la remarque de M. Dutrofne : on fait que
les fruits muqueux, doux & fucrés , ne tiennent
à l’arbre que par un péduncule formé par des
vaiffeaux féveux , des vaiffeaux propres & par
l ’écorce : cês vaiffeaux forment l’ébauche vaf-
culaire du fruit : le bourrelet , qui efl à la queue,
cft un organe particulier où ces fucs s’élaborent :
ils paffenr dans Je fruit de .l’état muqueux herbacé
à l’état muqueux doux & fucré : les différentes
modifications éprouvées par ce ■ corps
fnuqueux font dues à une matière glutineufe
M A T «*ï
qui, par l'aéHon de l’air , de la lumière 8r du fo-
le ïl, fe combine dans la peau du fruit de d i-
verfés manières & dans des proportions différentes
avec le principe de la couleur, de l'odeur,
,& de la faveur. M. Dutrofne croit q nec ’e f t i
j la faveur de. ce principe .que cette matière
i paffe dans la fubflance parenchymateufe du
fruit dont lés qualités ont d’autant pins d’éner-
| gie que l’aélion du foleil fur ce fruit a été
plus confiante & plus forte ; comme on l’obferve
dans la faveur ik la fineffe du parfum des fruits
que donnent les arbres à haute tige , & à plein
v en t, qui font plus expofés à l’aétion de la lu-
- mière que les petits. . . .
M. Dutrofne a fuivi le corps muqueux de i la canne à fucre dans lès différens états. L o r f-
' qu’il eft herbacé i f eft acide & fe moitié L o r f-
! qu’il eft muqueux doux la partie glutineufe fe
: combine avec les principes de la couleur , de
la faveur & de l’odeur ,■ il a une couleur citrine
& ambrée ; fa faveur eft douce & fon odeur
celle des pommes reinettes ; fa décompofition,
fuivant les circonftances,, eft ou acide ou fpiritueufe.
Enfuite la partie du corps muqueux
doux devient réfineufe; f ° n odeur eft balfa-
mique, fa douceur- fera fucrëe *, il eft muqueux
fucré ; fa décompofifion fpontanée eft acide ou
fpiritueufe , fuivant les 'circonfiancès. Enfin ce
GOrps muqueux perd la couleur citrine , fon
odeur balfamique & fa faveur fucrée fe développe
davantage ; il devient fel effentiel renfermé
(M H M cellules que forme la fub-
ftance médullaire du noeud canne où il paroît
parfaitement clairV .Comme il feroit très-difficile
dé fuivre avec nos fruits toutes ces modifi*
cations, j’ai cru qu’il feroit utile de fournir le
taÙeau que la canne à fucre préfente avec facilité.
Lorfque les fruits mûrs ont pris tout le volume
qu’ils peuvent avoir, les vaiffeaux devenus
fans ufage, s'engorgent ; ceux du péduncule
fe rompent ; la ftagnation dés fucs , dans lés fruits
mûrs, augmente leur, fermentation , &ils font fur1
le point de fe pourrir.
La faveur àcei-be des fruits', qui ne font pas
' mûrs, eft probablement dûe, comme M. Eer-
thollet le croit, à (’oxygène foiblemenr combiné.
Mais le fruit en mûriffant fe ramollit , il le
forme de l’eau ,,çe fuc devient abondant & fu-
cré, le fucre contient beaucoup de charbon.
Quand la Maturité eft trop! avancée.,. & que les
fruits s’altèrent, leur couleur indique la fura-
bondance de la matière1 charbonneiüè, de même
que l’air fixe qui s’en échappe. Le fumier , feul
ou mêlé avec la paille, fe convertit en terre
par une Çombnftipn accompagnée de chaleur;
le charbon devient alors furab’ondant. On1 voit
ici comment pliVlieurs-phénprnè'nes ’dé la végétation
s’expliquent élégamment d’après les principes
de la noùv'ellè'théofïe.