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Une Greffe eft donc un lambeau d’écorcê unie
à fon liber enlevé à un arbre, fans aucun deebi-
rement dans la pardg enlevée , & ayant.un bouton
dans le milietPs ou bien c’eft un morceau
de 1 arbre compofé de fon bois couvert d’éedree
ayant un bouton, & fe terminant en-pointe pour
favoriler fon infertion. Dans' le premier cas
grejf 'er, c’eft appliquer lé lambeau d’écorce avec
fon bougon , de la manière la plus convenable,
fur i’écorce écorchée de l’arbre, eu plutôt fur
fon liber, afin que ce lambeau fe foude fur cette
partie. Dans le fécond, c’efî placer le morceau
de bois & d’écorce avec fon bouton dans une
fente de l’arbre qu’on veut greffer, de manière
que des deux côtés, les différentes parties de la
Greffe correfpondenr aùffi bien qu’il fera poifii-'
ble aux parties fcrnb'lables de l’écorce de l’arbre
dans la fente où la Greffe fera mife.
Il reffe quelques obfervations à faire fur l’ein— j
ploi des Greffes, fuivant les différentes manières
de greffer ; elles feront les tqnféquences immédiates
de tout ce que je viens de dire.
Les branches de la dernière pouffe fourniffent
d’excellentes Greffes, parce cruelles ont une
écorce vigoureufe ; mais il faut prendre les
Greffes fur des branchés faines^ fortes s dont
l ’écorce foit fine & fans défaut: Les branches
chiffonnes donnent des Greffes languiffantes, lê~
parenchyme' de l’écorce y eff moins fucculent.
Les Greffes prifes fur lés branchés gourmandes'
font lentes à le mettre à fruit ; ce qui paroît venir
de leur ôrganifation particulière. Voye\ Br an ches.
Enfin, pour-greffer en fente, il fàut que
le bois foit bon*, iL conviendçoit qu’il eût deux
ans.
On ne peut greffer en fente que depuis la mi-
Février, jufqu a ce que les arbres foient en sève,
parce que l’écorce fe détache alors trop aifément
du bois, & parce que celle du fujet ne peut plus
s’appliquer aufîi exactement à toutes les parties:
de l’écorce de la Greffe. On greffe au contraire
en couronne, en écuffon , à emporte - pièce,'
quand, les .arbres font en pleine sève, parce *
• qu’il n’eft pas'nëceffaire de. ménager l’écorce,
puifqu’on eff obligé de l’ouvrir pour y placer
î’écuflbn qui doit fervir de Greffe; d’ailleurs, j
comme il faut détacher l’écorce du bois, cela ne j
peut fe faire que lorfque la sève de l’arbre eff
en mouvement.
Mais il faut obferver fur-tout que le bouton
de la Greffe foit bon ; il eft le fondement de
î ’efpérance de îa Greffe, il eff le germe de la
branche qui doit pouffer , ou de l’arbre qu’on 1
attend. On prendra donc garde que, comme
les écaiiies du bouton (brtent des couches corticales,
lé germe de la jeûné branche , ou bien le
fond du b'ouron foit entre l’écorce & le bois ;
c a r , li ce boèton reffoit adhérent au bois de
l’arbre dont la \ Greffe eff tirée, cette Greffe re-
prendroit bieii, comme dans les. expériences
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faités avec lès écorces feules, mais il n’en fortf-
roit point de branches, puilque le bouton ne
feroit pas reffé adhérent à la Greffe. Cela eft
fur - tout important pour les Greffes en écuffon
& en fifflet.
Je n entre pas ici dans d’autres détails fur cette
opération.. On trouvera toutes les explications
qu’on pourra defirer dans les principes que j’ai
pôles. Il feroit inutile de rapporter ici ce qu’on
n’y chcrcheroit pas, & de répéter ce qu’on dira
sûrement ailleurs. 11 me fuffira donc de fuivre
àp ré fen t l’union de la Greffe & du fujet, ■-
d’examiner la queftion fur la poffibilité on l’irn-
poifibiiité de faire toutes fortes de Greffes, enfin,
de rechercher ce qu’on peut éfpérer de la Greffe-
elle-même, quand on l’emploie.
Et d’abord , je veux voir fi la folution que j’ai
donnée du problème que je m’étois propofé eft
folide, &. fi les chofes fe pafient, comme je les-
ài décrites ; à eèt égard, M. Duhamel ne 1 aille
rien à defirér, il a examiné les deux efpèces de
. Greffes dans différentes circonffances, & il a vu
tout ce que j’ai décrit.
Quand il a obfervé des Greffes =en fente & en
couronne au bout de trois femaines, ou plutôt,
lorlqu’eUescommencèrent à pouffer, il a vu.que
toute la partie de la Greffe embraffée par l’écorce,
ainfi que les vuides entre la Greffe & lo
fujet , étoient remplis par une-Tubflance tendre
& herbacée : mais, dans la partie de ces Greffe»
qui repofoit k i r Taire de la coupe, du fujet , il
a remarqué un bourrelet propre à recouvrir faire*
de cette coupe : cependant, quoique le bois du
fujet touche le bois de1 la Greffe, il ne s’étoit
- formé entreux aucune union; elle étoit uniques
ment produite par .le moyen de cette matière
herbacée, qui a.voit tranfudé entre l’écorce & le
^bois : on peut fuivre ces productions herbacées
dans les petites branches : mais.il eft important
de'remarquer que cette fnbflànce herbacée,
qu.on voit dans les Greffes nouvellement faites,;
; s’étoif endurcie, droit ■ devenue une efpèce-de-.
bois dans les Greffes plus .avancées ; les lames
intérieures des écorces s’éroitnt au moins telle-:
ment unies, qu’un ne diftinguoit plus les lames:
de la Greffe de celle du fujet, -, que par leur,
couleur, lorfqu’elles étoient différentes; car
lorfque les bois du fujet. & de , la Greffe Tônt
colorés de la même couleur , on voit feulement
les fibres longitudinales du fujet s’incliner, vers
les Greffes, comme il arrive -aux branches ,, à
l’endroit de leur formation. Et il paroît de-là-
que la.branche placée entre l ’écorce & le bois *
eff précisément placée ..comme les bourgeons,.;
fortant d un arbre étêté. La Creffe, qui remplace
ce bourgeon, pouffe de la même manière ;& le
bourrelet qu’on obfeyye au bas des plaies des
Greffes fe préfente de même au bas.de ces bourgeons.
Dans les Greffes en écuffon, qu’on peut faci-
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lément difféquer , en les faifant bouillir dans
l’eau , on remarque, lorfque la Greffe commence
à pouffer, i.° Que lès borçisvde; l’ancienne écorce
qui-aéré détachée du bois du Tu j et, pour y placer
l’écüffun , ‘ étoient morts & defféchés. i.° Que les
bords de féeuffon étoient garnis de la fûbftance
herbacée dont j’ai parlé. $.° Quand.on obferve
l’écuffon, on trouve défions un feuillet ligneux
de la- même nature que celui qui appartient'- à
l ’écorte-de l’arbre de f écuffon ; Tô-h1 épaiffeur efi
propbrtidns$elle au te ms qui ‘s’efi écoulé depuis
le moment où l’écuffon a pouffé , jûfqu’à celui
de fobfervatipn.
4.0 On app érçoi,t,autour dé ce feuillet ligneux
des points d’adhérence avec la couche ligneufe
du fujet qui efi formée dans le même rems, en
forte que ces deux feuillets ligneux, nom elle-.
ment produits . femblcnt collés enfemble : niais
lé feuillet ligneux de l’écuffon n’adhère jamais
ail bois du fujet, à moins qu’il ne refie fur ce
feuillet ligneux quelques feuillets du liber. Enfin,
lorfqu’il y a beawcqup d'ar.alcgie entrer le fujet
& la Greffe , l’union devient fi intime, qu’on
ne peut plus difiinguer le lieu où elle s’efi faite
au bout de quelques années.
Il paroît que c’eft fpus cette fubflance herbacée
à demi-tranfparente, d’abord grife, puis verdâtre
& corticale, que Te forment les couches
ligneufés : on l’obferve clairement dans la réunion
dés plaies. Auffi, comme les Greffes offrent une
douille plaie à guérir, & comme on trouve cette
fûbftance' autour des Greffés, il efi bien probable
que la réunion de la Greffe & du fujet s’opère
par le moyen de cette gelée végétale ou cette
fûbftance cellulaire qui fe change peu-à-peu en
couches ligneufes, comme on le remarque dans
les plaies végétales.
Cette fûbftance cellulaire efi fournie par la
Greffe & par le fujet, quoiqu’il paroiffe étonnant
qu’un morceau, fi petit d’écorce, puifî'e
végéter fenfibiement féparé de la plante à laquelle
il appartient. Cependant, dans une Greffe dé
pêcher, dont le bois efi jaune, fur un prunier
dont le bois efi rongé, la différence de coilleur
dans le bois prouve fans répliqué que la Greffe
& le kijet ont également contribué -A la réunion
opérée entre les deux parties,qu’on vouloit unir,
& qu’elles ont par conféquent fourni femfcla-
blemcnt cette matière gélatinenfe qui a effectué
leur réunion. Mais, comme M. Duhamel dit
fort bien, la végétation de ce morceau d’écorcé
n’eft pas .plus furprenante que celle des boutures'
dont l’écorce végète d’abord pour produire les
racines 'qui lui manquent.
Enfin , M. Duhamel rnentre , par des expériences
, que lés écôrées iTorfqu’elles font formées,
ne font pas plus propres à s’unir entr’e lles,
que les couches ligneufes. Il fait voir enfuire que
l’union néceffaire pour le fuc^ès des Greffes,
ne peut s’opérer que par l’union réciproque des
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couches qui fe forment après l’opération. Il
prouve enfin que cette union ne peut rëuijïr que
lorfque ces couche*- font de la même fubfiance
que celle qui formé les couches ligneufés & '
corticales entre le bois &. l’ècorcé.
Nous avons des çonnoiffances trop légères fur.
Torganifation -des végétaux, & un trop petit
nombre d'expériences jiitn faites fur -es Greffés,£
pour parler ce leur influence fur la durée du
lu jet, & réciproquement-; mais on a pourtant
aflczdedorné.s pour auguret iefuccèsdes Greffes
qu’qn veut faire.
Quoique les végétaux fercffemblem à une foule
d’égards ; il y a une fou le de différences fenfiblcs
au milieu de ces refièmblancés. Auffi tomes les
Greffes font bien éloignées de réufiir fur tous les
Tujets, comme l’expérience 'l’apprend ; mais il
paroît clairement que les différences effentielles.
qui fe trouvent entre les plantes, empêchent ce ’
iuccès; oii fait d’abord que la Greffe & le fujet
doivent être de la même famille', fou vent du
même genre & d’efpèces rrès-voifvres p qu’il-doit
y avoir une reffemblance fuâïfaute en tic les
Trains' de leur bois, leur pdarfeur relative,
leur dureté , leur force, leur flexibilité , entre
la qualité de leurs fues., entre leurs odeurs & leurs
faveurs : tout cela permet d’imaginer des rapports
plus grands entre leurs vâiflèaux , leurs fé^
crétioms, &c.
2.0 Lesétorces des Greffes & du fujet doivent
offrir le même tiflu , être à-peu-près de même
nature.
3-° Le.tems où la Greffe & le fujet entrent en
fève ,. où ils fieuriîTetit, où leurs fruits font mûrs,
doivent être à-peu-près ies mêmes. Et cette remarque
eft bien importante; car fi une partie de
l’arbre efi mile en mouvement par-une certain«
impreffion de la chaleur, tandis que l’autre refie
2 m mobile , il eft évident ;qûe cette partie de
l’arbre qui bougeroit feule fans; communiquer
fon mouvement à l’au tre fan s obtenir d’elle de
nouveaux fu c s lan gu iro it néceffairement : & ft
la Greffe a reuffi au moment où elle a été faite,
elle fouffrira à la nouvelle pouffe , quand la
branche hâtive de la Greffe devroit végéter, parce
que le fujet fe refuferoit à Tés' efforts. Il arrivera
la même chofe fi le fujet efi plus hâtif que îa
Greffe; alors il fournira à la Greffe une quantité
de fucs qu’clie ne peut recevoir, ce qui donne
na-fiance à des dépôts dangereux. Cependant la
coédition feule du têms de la végétation feroit
infuffifante pour le fuccès des Greffes, puifque
les Greffes du feule fur ’’amandier & réciproquement
ne réiiffifient point , quoique ces deux
arbres .poiifient en méine-tems. Il efi vrai-que
l’Ameurdu’ Dictionnaire d’Agriculture nous-apprend
que l’ente du platane faite fur lui-même
périt.
4.0 11 doit y avoir encore de la reffemblance
dans la vigueur du fujet & de la Greffe. Que