
manière un peu confiante, parce que l’état de
la plante, de l’eau , & l’action du foleil varient
beaucoup.
Quoi qu’il en foit, il en réfulte toujours que les
tiges lucen t de l’eau, quoique les feuilles foien t fous
l’eau ; que les plantes fucent de l’eau chargée d’air
fixe par leurs tiges comme par leurs feuilles3 que
les feuilles élaborent cette eau fucée, puifqu’elles
fourniffent de l’air pur en plus grande abondance,
quand la tige plonge dans cette eau, que lorf-
qu’elle eft dans un vafe plein d’air. Mais ces
expériences demandent à être pouffées beaucoup
plus loin, & je vais m’en occuper.
J ’ai éprouvé qu’une tige avec la racine tiroit
beaucoup plus, qu’une racine fans tige , parce
que la ludion eft pour l’ordinaire proportionnelle
au nombre des feuilles. Mais la tige fans racine,
quand elle eft-égab à la tige qui a des racines,
tire ‘autant d’eau que cette dernière.
Une tige de vigne dont les-feuilles avoient été
huilées avec foin , tira la moitié moins d’eau
qu’une tige de vigne femblable qui n’avoit pas
été huilée.
Une tige de framboifîer plongeant dans l’eau
par le gros bout avec fes feuilles, a tiré un
peu plus d’eau qu’une tige pareille , plongeant
dans l’eau par fon petit bout. Elles ont toutes
deux tiré une égale quantité d’eau pendant la
nuit • & cette quantité d’eau tirée alors étoit
à - peu - près la quatorzième partie de l’eau
tirée au foleil pendant dix heures. Si la tige plongée
dans l’eau par le petit bout, a tiré pendant
le jour moins d’eau que la tige plongeant dans
l’eau par le gros bout -, cela pourroit venir de
ce que la lumière du foleil agit d’une* manière
délétère fur la furfaee inférieure des feuilles,
comme M. Bonnet l’a obfervé.
Je cherchai quelle étoit la partie d e là tige
qui tiroit l’eau ; j’ai trouvé que c’étoit feulement
le bout ; car li l’on maftique la feélion de
la tige avec de la cire d’Efpagne , & li l’on
maftique de même toutes les mêlions des feuilles
qu’on ' retranche, alors la tige ne tire prefque
point d’eau ; ou du moins la quantité d’eau tirée
parla tige eft li petite, que je foupçonne fort
que l’eau qui s’élève dans la tige , eft encore
palfée par les ouvertures qui n’ont pas été fçru-
puleufement fermées avec la cire : ainli, par
exemple, fi une tige tire au foleil 150 grains
d’eau , une tige femblable dont le bout fera
maftiqué, n’en tirera que 8 grains : & li l’on
maftique une tige pareille dans un tube de verre,
de manière que le bout feul déborde le tube ,
& touche feul par conféquent l’eau de la bouteille
dans laquelle cette tige fera plongée, elle
tirera dans cet état amant d’eau, que fi eib
avoit touché l’eau dans toute fa furfaee. Mais
je n'entre pas dans de plus graiids dé rails 3 il
■ itiffit d’obferver que l’épiderme ne laifle pas
pafiër l’eau, & que la force fuçante fe trouve
feulement placée dans les fibres lign'eüfës; êâr
fi l’on enlève l’écorce fans entamer le bois, la
fuélion n’eftpoint diminuée,- mais il arrive même
que fi l’on néglige de mafiiquer le lieu où étoit
l’infertton des feuilles, qu’on a été forcé de
retrancher pour faire entrer la tige de la bouteille
pleine d’eau , alors ces infertions laiflent
paflèr l’eau, comme l’extrémité de la feélion :
ce qui eft produit fans doute par Tàélion des
fibres ligheufes, qui ont été rompues, qui font
à découvert , & qui agiffenr pour tirer l’eau
comme celles de la feélion ; aufii en couvrant
de cire d’Efpagne les infertions des feuilles re~
tranchéës , alors la tige ne tirera pas plus d’eau,
que fi les feuilles fuffent reliées à leur place.
M. Bonnet avoit montré que les pétioles des
feuilles ne tiroient l’eau que par leur feélion.
Il paroît donc que la fuélion des feuilles eft
produite fur-tout par l’aélion de la lumière
fur les feuilles ; qu’elle fe fait pendant la nuit,,
mais dans une quantité beaucoup moindre que
pendant le jour ; que l’eau tirée pafîe au travers
de la partie ligneufe, qu’elle eft proportionnelle
à la quantité & à la fanté des feuilles.
Enfin que, toutes chofes d’ailleurs égales en apparence,
la fuélion eft beaucoup moindre en Automne
que dans le Printems. Je publierai, dans
un Mémoire particulier, tous les’ détails de ces
expériences, qui feroient trop longs & trop
minutieux pour être placés ici. Je vais m’occuper
à préfent de la Tranfpiration des feuilles.
J ’ai fait de nouvelles expériences fu r la fuélion
des plantes, & leur Tranfpiration 3 mais elles
ne font pas allez completres pour les raconter ;
quoiqu’elles foien t à préfent allez concluantes
pour rendre très-probable l’irritabilité çb toutes
les parties des végétaux , ou plutôt une propriété
qui remplace dans le végétal l’irritabilité obfer-
vée dans les animaux.
Les rapports que nous avons vus entre la
fuélion des plantes, & l’augmentation de leur
poids, montrent évidemment que cerre eau tirée
par elles ne féjourne pas dans leur fubfiance :
il s’agir donc de s’affurer de la réalité de cette
Tranfpiration; d’établir fes relations avec la fuc-
tion ; & de découvrir, s’il eftpofiible, les organes,
par le moyen defquels elle s opère.-
Si l’on pèfe une branche coupée à un arbre ,
après avoir maftiqué avec foin la feélion, & fi
on la laifle au grand air , on voit en la repe-
fant quelques jours après, qu’elle a perdu une
partie de ion poids ;màis, comme on n’apperçoit
aucune déperdition, il faut que la matière qui
a dilparu fe foit échappée d’une manière m-
fenfiblé.
Cependant comme il pourroit y avoir quelques
doutés, M. Halés a montré, pàf une voie
très-rigbureufe, que cette perte devoir fë faire
dans les plantes entières qui végétoient vigoureu-
fement : il a fait voir au poids, & après avoir
écarté toutes; les caufes d’erreur quun tourne-
fol de trois pieds de hauteur, perd oit dans douze
heures d’un jour fort fec & fort chaud, une
livre & 14 onces ; que fa perte moyenne étoit
1 livre 4 onces. Mais, comme cette Tranfpiration
devoir être proportionnelle aux organes Tranfpi-
rateurs il s’apperçut, par un moyen particulier,
que cette matière qui fepcrdoit étoit une humeur
qui tranfpiroit hors des plantes : il la recueillit
dans des vaiffeaux : & en continuant fes expériences
d’après ces idées, il chercha les rapports
de la perte que fouffroient les plantes avec leur
furfaee, & trouva quelle étoit proportionnelle
à leur furfaee , ou à celle de leurs feuilles : il
découvrit par des calculs ingénieux, que ce foleil
dont la furfaee étoit de 5616 pouces quarrés,
tranfpiroit dix-fept fois plus qu un homme.
Haies répéta cette obfervation fur un ch o u ,
dont la furfaee de la tête avoit 2736 pouces
quartés, & il obferva que la Tranfpiration
* moyenne étoit de 15? onces t & comme la fur-
face des racines étoit de 25 6 pouces quarrés , &
l’aire de la coupe horizontale de jg | pouces
quarrés , il conclut que la sève entre dans les
'racines avec 1 ï fois plus de vitefle quelle n en
fort par les feuilles. .
Haies a complété, comme je l’ai d it, la dé-
monftration de la Tranfpiration des plantes,
en la raffemblant dans lin ballon difpofè pour
cela. M. Guettard & moi, nous avons-répété
ces expériences, & nous les avons confirmées en
• les' fuivant dans des buts différens.
On voit bien-tôt, par ce moyen, que la Tranfpiration:
eft d’abord beaucoup plus grande ,
toutes chofes d’ailleurs égales, quand le terrein
eft plus humide, & quand fon humidité fe ma-
nifefte à une diîlance 'affez grande de la plante.
L ’heure du jour influe beaucoup fur la Tranfpiration,
par la chaleur dé l’air, & fur-tout par
l’aélion direéle de la lumière: fimerpofition
-feule.d’un papier, d’un linge, en diminue con-
fidérablement la quantité: aufii la Tranfpirarion
des plantes, pendant la nuit, eft très-petite, en
comparaifon de celle qu’elles éprouvent pendant
le jour.
Les feuilles font les organes qui donnent
paffage à l’eau évaporée; aufii plus le nombre
des feuilles fera grand , pins les feuilles feront
faines, plus aufii la Tranfpiration fera grande.
Enfin-, le vent & lé$ vents chauds favorisent
encore cette Tranfpiration infenfible; & la rendent
plus confidérable.
11 faut obferver que cette Tranfpiration, tontes
chofes d’ailleurs égales, eft bien plus grande
au mois de Mai, qu’au mois de Septembre, parce
- que les feuilles endurcies, racornies; prêtés à
tomber, tranfpirent moins; quand les' vaifleaux
font pleins, la plante ne fuce plus ; pour que
la fuélion ait lieu, il faut que la Tranfpiration
Yviide les vaiffeaux; les feuilles en Automne
commencent à fe détacher de la plante, elles
font moins faines: j’ai eu occafion de b remarquer
, pendant deux années de fuite; j’ai vu
pareillement que la quantité d’air pur, produite
par les feuilles des mêmes plantes, ayant
une furfaee égale , expofées fous les mêmes eaux
au foleil, pendant le même tems, étoit beaucoup
moindre en Automne, que dans le mois
de Mai.
Haies remarque que. le poids des plantes aug-
mentoit fouvent pendant la nuit ; mais cela
arrivoit, parce qu'elles fe pénétroient d’humidité,
& qu’elles ne tranfpiroient pas.
Il réfulte de-là qu’une Tranfpiration trop abondante,
doit fatiguer les plantes fans les nourrir:
parce qu’elles rendent autant ou plus d’eau
qu’elles n’en reçoivent. Par la même raifpn,
une fève trop abondante, dont la Tranfpirarion
n’enleveroit pas une quantité fuffifante d’ea u ,
occafionneroit des engorgemens funeftes.
Ces expériences apprennent qu’il faut Jaift-er
des boutons aux greffes & aux boutures, pqnr
attirer la fève & favorifer la végétation : mais il
faut prendre garde que le nombre des boutons
laiffés ne foit pas trop grand , parce que c^s
boutons trop nombreux épuiferoient la.plante.
M. Guettard a ’obferyé que les plantes graffes
tranfpirent communément peu ; que les fruits
fuccubns tranfpirent beaucoup moins, relativement
à leur malle, que’ lés. feuilles des mêmes
plantes; qu’il eft probable que les fleurs à maffes
' égales, tranfpirent moins que les feuilles ; enfin
que la Tranlpiration des branches, quand elles
fe font endurcies, eft très-petite.
Il eft affez difficile d’eftimer la Tranfpiration,
parce'qu’il eft très-difficile de pouvoir tenir
compte de tout ce qui influe fur elle ; cépen-
■ dam, on trouve qu’une- jeune pomme pelant
vingt-cinq grains, '& une jeune plante d’ofeille
• pefant quarante - trois grains, avoient évaporé
chacune une quantité d’eau é g a le à une furfaee
de foixame-dix pouces quarrés.'
Le Père Jean-Baptifte Saint Martin a entrepris
quelques expériences curieufes fur ce fujet: on
les trouve dans Vefprit des Journaux pour le
mois d’Avril 1700: on y apprend qu’une branche
de noyer pefant 576 dragmes fut expofée pendant
tout l’Eté au foleil avec fes feuilles, qu’on
conferva lorfqu’elles tomboient, & que le .poids
de cette brandie fut alors réduit à 65 dragmes
& 17 grains. L’eau de ce végétal qui s étoit échappée
étoit donc à la partie folide qui reftoit
comme 9 : 1^ En brûlant cette brandie, ,il ne
relia que du poids. Mais , dans ce cas,
les huiles, les parties volatiles difpaçoiffent encore
avec l’eau.
Le même Narùralifte a trouvé que, dans les
plantes herbacées, la partie folide croit à l’eau
comme 12 , comme 15 , & quelquefois comme
20 ; 1.