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deviendroit c e lle - c i, fi lç premier avoit une
énergie fnffifante pour pouffer des jets dans une
année fept ou huit fois plus grands que ceux
de l’autre ? la Greffe n*auroit pas dans ce cas
line ©rganifation fuffifante pour un développement
de cette efpèce, elle ne pourroit fupporter
l ’aéUon de la fève, elle périroit néceffairement
par une fuite de cette violence. Lamêmechofe
arriveroit fi la végétation du fujet étoit fort
lente, tandis que celle de la Greffe feroit vi—
eoiireufe ; dans ce cas la Greffe mourroit par
défaut de nourriture.
5.0 Il faut dire les mômes chofes pour les
rapports de la grandeur du fujet & de la Greffe :
parce que le fuccès de la Greffe fuppofe, à cet
égard, une reffemblance d’organifarion qui ne
peut plus avoir lieu lorfque les différences dans
la taille feroient trop grandes. Audi ces Greffes
difproportionnées durent peu. t e coignafiier,
qui eft un arbre nain vivant très-long-tems dans
un terrein fcc, a une vie fort abrégée, Iorfqu’on
greffe fur lui un poirier, qui eft un grand arbre
par rapport au coignaftier * quoique ce poirier
greffé fur un poirier fauvageon vive très-long-
téms.
En général, fi les rapports entre les Greffes
& les fujets font trop éloignés ou incomplets,
les Greffes peuvent réuflir ; mais elle ne durent
pas : il y a une trop grande déviation dans la
fè v e , & il en réfultc une maladie mortelle pour
la Greffe ou pour le fujet, ou pour tous les
deiuç.
La Greffé a une influence manifefte fur les
fujets, pwifque les fruits des arbres greffés fur
eux-mêmes, font meilleurs, & puifque les poi«
riers pierreux perdent alors leurs pierres. Mais
les fujets ont aufli une influence manifefte fur
le s Greffes, les fruits des arbres entés font meilleurs
que ceux des arbres fauvageons. Outre
cela la Greffe influe encore fur l’état de la
plante greffée : Iç pêcher qui pouffe plus de
branches qu’il ne peut en nouirir, eft un arbre
délicat qui voit périr une partie de fes branches :
d’un autre côté , le prunier , qui eft un grand
arbre , qui ne pouffe que les branches qu’il peut
alimenter, influe fur les Greffes du pêcher qu’on
ente fur lui $ le pêcher greffé de cette manière
conferve fon bois, il végète avec plus de vigueur
& ne pouffe dehors que les- branches qu’il peut
alimenter : tandis que le prunier greffé fur un
pêcher donne peu de bois & beaucoup de
fruits.
La diffeéfion du bois & de l’écorce de quelques
arbres greffés prouvent que le bois n’eft point
changé par cette opération. M. Cabanis croit
que les graines font modifiées par la Greffe : il
a remarqué que les pépins, noyaux ou bayes
provenant d’arbres greffes , ont donné plus de
variétés dans leurs produélions que les femences
cueillies fur le franc ; auffi les jardiniers re*-
G R E
butent les noyaux de pêches provenant de péchera
greffés pour leurs femis.
On comprend à préfent comment il y aune
foule de Greffes qui né réuffifient jamais, &
comment il y en a qui réuffiffent un inftant pour
périr au bout de deux ou trois années.
On aura fans doute fenti que les Greffes, qui
pouffent fortement, ont befoin d’appui pendant
la première, la fécondé , & même la rroifième
année ; ce tems eft néceffaire pour rendre l’union
de la Greffe avec le fu je t, aufli imime qu’il
faut, afin de les mettre en état de fupporter le
poids de leurs jets, & de réfiflerà faétiondes vents
fur eux.
Mais on fe tromperoit fi l’on imaginoit que
la Greffe change les efpèces ; c’eft le bouton qui
fait l'arbre, & ce bouton ne fauroit faire autre
chofe que l’arbre auquel il appartient. Auffi, dans
les arbres greffés, le fujet fert à nourrir la Greffe
aux dépens de les propres produélions qu’on
retranche & qu’on empêche de reparoître. Mais
la Greffe, qui efl un arbre, planté fur le fujet
paraît profiter fouvent beaucoup de cette transplantation
; comme on peut en juger par le fruit,
qui eft pour l’ordinaire plus beau & meilleur,
& par fe port de la plante qui a été changé.
Seroit-ce parce que la Greffe reçoit auffi une
nourriture particulière? Je ne le crois pas ; toutes
les plantes doivent retirer de la terre une nourriture
femblable ; mais fon paflàge au travers des
racines y apporte un léger changement, comme
on l’obferve dans les pleurs de la vigne. Vayei
Pleurs d e l a v ig n e . Les ehangemens ob-
fervés dans les fruits des arbres greffés font
donc peut-être produits par la. préparation particulière
que les fucs de la terre ont reçu
dans les racines ; mais fur-tout par l'élaboration
que fouffrenr ces fuçs dans la Greffe, ou dans
le bourrelet qui s’y forme. Ce qu’il y a de fû r ,
un citron nouvellement noué lorfqu’il eft greffé
par fa queue fur un oranger, donne un citron qui
mûrit très-bien, & qui n’a aucun rapport avec
les oranges.
Il eft pourtant certain que la Greffe adoucit
les^ fruits, qu elle diminue les pierrçs des poires
qui en ont de remarquables, qu’elle rend les
fruits meilleurs,
Il eft encore certain que la Greffe ne change
pas l écorce, les feuilles, & les fruits quant à
leurs qualités cffentielles. On ignore cependant
l'influence de la Greffe fur le nombre & la direction
dçs tiges, fur la quantité du fruit, &
fur les racines. Mais fi la partie greffée produit
plutôt des racines eh terre que les autres parties
de l’arbre ; c’eft fans doute, à caufe du bourrelet
qui accompagne les Greffes. Voyez Bourrelet.
R acines,
Le fujet n’eft pas altéré par la Greffe ; car
fi on laiffoit pouffer fà tige & fes branches,
il fourniroit également & «le la même manière
GRE
fa tige, fes branches, fes fruits & fes feuilles.
Cependant on ne peut fe diffimuler que la Greffe
affaiblit la végétation en ralentiffant peut-être
le cours des fucs ; il eft au moins certain que
les arbres greffé- s’élancent moins hauts que ceux
qûi n’ont pas été greffés, St qu ils -deviennent
moins vieux. Malgré tout cela la Greffé fournit
feulement des variétés qui ne fauroient être des
efpèces nouvelles; & il eft démontré, contre
l ’obfervation de Lemcri, qu’un coignaftier fur
lequel on a enté un prunier donne des prunes
dont le noyau contient plus d’un pépin ; tout
comme il n’arrive pas qu'un jafmin blanc fur
lequel on a greffé un jafmin jaune donne au-
deffous de l’ente des tiges portantes des fleurs
jaunes commme Haies prétend* l’avoir vu.
Comment donc agit la Greffe pour améliorer
les efpèces ? Je crois q u e , dans l’union de la
Greffe avec le fujet, il y a une altération ma-
nifefle dans le fyfième vafculaire de tous les
deux, ou dans la difpofitiqn de leurs fibres;
if faut néceffairement que les fibres du fujet
s’abouchent avec celles de la Greffe , qu’elles fe
fondent, quelles faffent corps; & cela ne peut
guères s’opérer fans gêner plus lu 1 moins le
cours des fluides ; la partie du bois où la Greffe '
s’eft faite eft au moins plus denfe que les autres.
Malgré cela M. Bonnet y a vu paifer l’encre
fans altération. Il feroit poffible que cette différence
ohfervëe dans le plan de la réunion deJa
Greffe & du fu je t, foit la caufe des effets produits
par les Greffes. Mais jufqu’à ce. que l’on
conçoive quelque chofe à la mutation des plantes,
aux mouvemens de leurs fluides, on ne pourra
rien prononcer qui foit un peu plus folide fur
ce fujet que ce que je viens de dire.
Il réfplte pourtant de tout cela que l’analogie
parfaite entre les Greffes & le fujet promet
des avantages affurés; on peut encore profiter
des différences qu’il y a dans ces analogies,
pour trouver les Greffes les plus convenables
à des cas donnés; par exemple , fi une fève trop
•yigoureufe empêche la production des fruits, .
il faut offrir à la Greffe un fujet dont la fève
foit moins abondante, & réciproquement. On
rendrait de cette manière les efpèces plus utiles
au cultivateur. En fuivantee principe on pourvoit
peut-être affaiblir les arbres en multipliant
les Greffes comme M. Duhamel lefoupÇonne;
.& il y a des circonftances où cela pourrait être
xès-convenable. •
L ’avantage que la Greffe procure efl immenfe,
.elle multiplie les bonnes efpèces fans perdre
J’arbre qui les fournit: les Greffes font les graines
des branches qu’on place fur d’autres pieds, •
Pourquoi y a-t-il des arbres qui ont befoin
d ’être greffés’ pour donner de bons fruits & en
donner beaucoup, comme on l’oBferve pour les
pêchers & les abricotiers ; tandis que le figuier
» ’a pas befoin de cette opération ?
H A B t î t
Gette queftion me paraît difficile à réfoudre.
Il me femblequela nature de l’arbre, fia patrie,
doivent être les élémens de la réponfe qu’on
pourroit faire. Mais il faut l’avouer, on ne trouverait
dans ces élémens qu’une réponfe tout-à-
fait incomplette.
Je finis en racontant un fait qui a de très-
grands rapports avec la Greffe. On accéléra
la fruélification dçs arbres pareffeux, en leur
enlevant circulairemcnt fur la tige un lambeau
d’écorce de quatré ou cinq lignes de largeur,
& .en lui fubftituant un lambeau, égal d’une
efpèce différente d’arbres portant les mêmes
fruits : il faut cependant que ce nouveau lambeau
recouvre parfaitement le lambeau enlevé.
Mais qu’arrive-t-il à ce lambeau ? Il fe greffe
parfaitement, il fe forme un bourrelet comme
dans toutes les Greffes, la fève defeendanre eft
arrêtée; elle reflue vers les branches Si développe,
fans doute , les germes des fruits qui ne fe feroient
pas développés fans cette nourriture fur-
abondante que le ralentiffement dans le cours
de la fève lui fournit. Ce changement qui
influe, fans doute, fur le cours des fluides de
l’arbre, met, comme difent les jardiniers , l’arbre
à fruit. Koyeç Ma tu r it é , Pl a ie .
H.
HABITATION DES PLANTES. Quandon
jette un coup-d’oeil fur les différentes parties
de la terre qu’on eft appellé à parcourir, on voit
bien-tôt qu’elles font toutes plus ou moins ta-
piffées de verdure ; & on remarque enfuite quand
on y f ait plus d’attention encore, que les mêmes
plantes ne forment pas par tout ce tapis. Quand
on veut enfuite expatrier les plantes qu’on ob-
ferve quelque p art, pour les habituer dans des
lieux où elles ne fe trouvent pas naturellement,
on s’apperçoit qu’elles ne peuvent pas toutes
occuper indifféremment toutes les parties de la
terre ; on voit fouvent ces plantes s’altérer,
périr même quand on les arrache à leur terré
natale. Une plante aquatique ne fauroit vivre
dans 1 air & fur la terre , ni quelques plantes
des alpes dans nos jardins ; Sl réciproquement.
11 paraît de-là que les plantes diffèrent plus
entr’eiles qu’on ne le foupçonne par leur or-
ganiiatisn & la place qui leur convient. Il y
en a au moins qui fe prêtent difficilement à des
ehangemens trop grands, & il y en a d’autres
qu’on y accoutumepeu-à-peu. Airfi, parexemple
l’abricotier & le pêcher, qui viennent d’A fie’
périraient fi on les. faifoit paffer fubitement
de ces beaux climats dans b s nôtres : mais ils
s’y habituent peu-à-peu , ou plutôt ils fe préparent
àux ehangemens de température qu’ils y
éprouveront, en s’approchant infenfiblement
des climats où l’on veut les fixer, jnfqu’à ce
qu’ils arrivent ainû par nuances dans des