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Mais comment s’opère cette fécrétion ? Nous
femmes ici couverts par les ténèbres les plus
épaiffes. Quant-à-préfent on ne connoît aucun
moyen pour décompofer l’air fixe que ceux par
lequels il' eft réduit à l’état d’immilcibilité avec
l’eau : à moins que cet état d’immilcibilité ne
foit celui où il eîl privé de fon oxygène • mais
il n’y a rien de commun entre ce fait & celui
que la végétation nous préfente. Il fuffit de fa-
voir qu’il y a une très-grande affinité entre
l’oxygène & la lumière, der! même qu’entre le.carbone
& le parenchyme -, que ces affinités peuvent
...déterminer la décompofition de l’air fixe , dans
les circonftances où cet air fe trouve , lorfqu’ii
eft placé dans le parenchyme des végétaux. Ces
données font fuffifantes pour compléter la. probabilité
de cette opinion, jufques à ce que l’expérience
la détruife ou l’établiffe. D’ailleurs
comme il eft prouvé que les feuilles épuifées
d’air par la pompe pneumatique fourniflent de
l’air pur quand elles font placées au foleil dans
l’eau chargée de l’air fixe , & comme ces feuilles
ne'donnent point de l’air pur quand elles font
placées dans l’eau bouillie ou diftillée , on ne
peut douter que l’air fixe n’ait été décempofé
par la lumière dans les feuilles épuifées de
tout autre a i r , comme je l’ai déjà fait re-
’ marquer.
Dans les Mémoires de V Académie des Sciences
de P ans , pour iy86, on lit que M. Chaptal ayant
analyfé des Byffus formés dans des fouterreins
de charbon-, ils lui donnèrent un liquide fortement
chargé d’acide carbonique : le principe ligneux
ne formoit que de la totalité de ces
plantes. Mais ces Biflùs ayant-été expofés graduellement
à la lumière pendant 50 jours , ils
fournirent une quantité d’acide carbonique beaucoup
moindre : & la partie ligneufe s’augmentant
conlîdérablemem , elle devint ~ du total. Sans
doute les éléments de ces Byffus fe combinoient
différemment à la lumière : le principe charbonneux
augmentoit à mefure que l’acide carbonique
diminuoit ou fe décompofoit ; fon oxygène
fe portoit fur le principe huileux-pour
former les réfines qui jauniffoient la maffe ; tandis
que le principe charbonneux uni avec un
peu d’air vital augmentoit le principe ligneux.
M. Succow, dans les Annales de Chimie de Crell,
part. 1 V , 1789 , rapporte des expériences qu’il
a faites furies champignons expofés à la himière : &
il apprend qu’ils y fourniflent de l’air fixé avec de
l’air inflammable, qu’ils fe confervent frais dans
T air pur dont iis ablorbent une grande quantité,
& qu’ils deviennent bruns dans l’air inflammable.
JLa production de cet air inflammable annonce-
roit ici la décompofirion de l’eau : elle mon-
treroit en même-tems la combinaifon de fon
oxygène avec le carbone, qui fe dégage de la
plante fermentante , & qui donne naiffance à
J’air fixe.
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On trouve peut-être cet article trop long :
mais je fuis tellement convaincu du rôle important
que la Lumière joue dans l’hiftoire de la
végétation, que je voudrois y porter les. yeux.
C’eft probablement la combinaifon particulière
de la Lumière avec toutes les autres parties de
la plante qui donne, naiffance aux différences ob-
fervées entre les végétaux. Elle leur donne au
moins cette couleur vive , ce goût décidé, cette
odeur tranchante qui diftinguent les plantes étiolées
de celles qui ont profité du bénéfice de la
Lumière.
LYMPHE. Humeur qu’on trouve dans toutes
les plantes qu’on peut retirer facilement de plu-
fleursefpècesd’entr’elie9îquand elles fonten pleine
sève, & particulièrement de la Vigne, de l’Erable
du Bouleau & du Noyer.
Cette Lymphe ne s’échappe hors de la'vigne,
ni pendant l’Hiver, quoiqu’elle foit dégarnie de
les feuilles, ni pendant l’E té , iorfque fes feuilles
la couvrent,- mais, au commencement du Printems;
avant Le développement des boutons : on
voit alors fortir beaucoup d’eau de tous les far-
mens coupés fraîchement. On appelle cette eau,
les pleurs de la vigne. Ces pleurs Portent dans une
quantité affez grande, tant qu’il fait chaud ; lorf-
que l’air fe refroidit, ces fleurs ceflent de couler,
pour couler de nouveau, quand l’air fe réchauffe.
Mais il fembleroit fouvent que les vaiftçaux, qui
laiffent échapper cette Lymphe, fe ferment : il
s’y forme, comme je l’ai obfervé, un dépôt gommeux
qui empêche quelquefois cette Lymphe
de s’échapper : car, fi l’on coupe la branche qui
ceffe de fournir des pleurs un demi-pouce plus
bas que la première feélion, la Lymphe recommence
à couler comme auparavant. Auffi j’ai
vu que cette Lymphe expofée à l’air s’évaporoit
en partie & Iaiffoit fur la tranche de la fouche
le dépôt gommeux qu’on y trouve, & que l’a^
nalyfe des pleurs de la vigne nous fera remarquer.
On ne rencontre, il eft vrai, cette gomme que fur
les feclions horizontales dès vieilles fouches -, où
les pleurs féjournent., d’où elles ne peuvent pas
facilement s’écouler -, ce qui n’empêche pas de
diftinguer cette -gomme defféchée par fon brillant
fur la feélion des autres branches ; fi l’on ne
peut pas à la vérité la recueillir, on peut au moins
manifeftement l’obferver.
M. Muftel remarque que cette Lymphe’coule
diverfement dans les différons arbres. Mais il a
vu que cet écoulement varie fuivant les circonftances
dans lefqueftes l’arbre peut être.-Il dit
que fi l’on perce un gros orme dans une de
fes exoftofes, il en fort beaucoup de Lymphe,
& qu’il en fort pendant toute l’année. Je le
crois, parce que ces exoftofes deviennent des
magafins de la Lymphe que les racines apportent.
Ces pleurs qui font pourtant le fuc de la plante
montent depuis les racines au fommet du ra+
J meau. Il paroît auffi que ce fuc defeend, en forte
que
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true ces pleufs font afeendantes & defeettdarites;
comme les entailles faites aux plantes permettent
de le croire. Mais les fucs afeendans font-ils
dans les mêmes vaiffeaux que les defeendans.
Je ne le crois pas, parce que la circulation de
la fève doit fe faire alors comme dans la plante
couverte de feuilles % & on peut affurer que les
vaiffeaux propres, qui ramènent la fève élaborée,
contiennent alors une liqueur quoique ce loit
dans une quantité bien petite relativement a
celle qui eft fournie par les vaiffeaux Lymphatiques.
,
M. Duhamel a fait voir que cette Lymphe
en s’écoulant', ne fatigue point l’arbr.e qui la
fournit : & celaBoit être, puifque cette Lymphe
eft une eau afpirée par les racines, qui traverle
l ’arbre en baignant fes boutons. Ce rfleft pas
comme fi cetécoulement étoit celui d’une Lymphe !
digérée. Il y a plus-, dans ce moment, il faut que
cette Lymphe fùrabondante s’échappe : elle ne
fauroit être élaborée par les feuilles qui ne font
pas encore développées ; elle ne pourroit pas
le diftiper par les organes évaporatèurs que les
feuilles lui préfentent pendant l’Eté ; les boutons
font trop jeunes pour employer une auffi grande
maffe de fluide deftinée à nourrir une foule de
boutons que la ferpe du vigneron a retranchés.
L ’érable, le bouleau, le noyer, le charme,
foùrniffent de la Lymphe au Printems comme
la vigne. Mais pourquoi la Lymphe de ces
plantes ne s’écoule-t-elle pas en Eté comme au
Printems ? Cela vient, je crois, de ce que la
tranfpiration infenfible eft alors très-confidérable ;
les feuilles offrent une très-grande furface à 1 air
pour favorifer cette tranfpiration : au lieu qu au
Printems comme il n’y a point de feuilles, il
n’y a point ou prefque point d eau, qui puiffe
s’échapper par cette voie. M. 1 Abbé Bertholon
ù trouvé que la plus grande tranfpiration de
la vigne, pendant le mois d’Août étoit par jour
pour * un fep de cinq onces & deux cent quarante
grains. '-.1') .* . •
Pourquoi encore toutesles plantes ne donnent-
elles pas leur Lymphe au Printems comme la
vigne ? Ceci doit dépendre de l’organifation des
plantes, du nombre de leurs boutons, de la
quantité de nourriture qti’ils prennent, de
celle qu’ils rcfpirent. Je Crois que la vigne
en donne moins quand elle eft taillée moins
court. -
Mais il eft important de fuivre avec.JVl. Duhamel
les circonftances de la fortie de cette, fève.
Il faut 4 ’abord que l’entaille faite à l’arbre pour
lui ouvrir une iflue, pénètre le bois : autrement ;
fi elle fe bornoit dans l’écorce, la Lymphe ne \
couleroit pas ou couleroit mal. Ce qui prouve
que cette Lympher s’élance des racines au travers
des fibres ligneufes. Et cela eft d’autant plus
vrai nue la quantité de la fève produite eft plus
grande quand l’entaille eft fai te plus profondément
Phyjiologie végétale. Tome J.er I*erJ Partie•
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dans le bois. On a même obfervé qu’il ne s’é-
chappoit point de Lymphe entre l’écorce & le
bois.
Cette Lymphe commence à couler quand le
; dégel eft accompagné par la chaleur du foleil.
Les canaux de la fèvè fe rouvrent fans doute
alors en fe dilatant, & la Lymphe les remplit.
Auffi cette Lymphe coule fur-tout abondamment
quand un grand dégel fuit une forte gelée. Il
: faut excepter de cette règle le palmier qui fournit
fa Lymphe pendant toute l’année.
L ’écorce eft adhérente au bois quand la Lymphe
coule avec abondance. La quantité de la
Lymphe diminue quand les boutons des feuilles
commencent à s’otivrir ; & elle finit de couler
quand les feuilles font développées. Mais, quand
la végétation devient forte , la Lymphe prend
un goût herbacé , que les fucs propres qui fe
préparent & qui fe mêlent avec elle doivent
fans douté lui donner.
Entre les arbres de même efpèçe il y en a
quelques-uns qui rendent plutôt & plus abondamment
leur fève que d’autres. Les gros arbrçs
vigoureux croiffants encore & plantés dans ua
terrein gras foùrniffent plus’ de Lymphe que
les arbres plantés dans un terrein maigre & f e c ,
ou lorfqu’ils font foibles, trop jeunes ou trop
vieux.
La Lymphe fc montre fur-tout dans les
entailles faites aux parties les plus baffes des arbres ;
quoiqu’on en voie couler auffi hors des entailles
faites dans les parties les plus élevées. Si l’on
coupe une racine, les deux parties coupées
laifferont échapper cette Lymphe. Sans doute
celle qu’on voît couler dans la partie de la racine
attenant à l’arbre a été apportée par les
autres racines, & elle redefeend après avoir circulé
dans l’arbre. Ilparoît.au moins, par les
expériences de M. Duhamel, qu’il découle beaucoup
de Lymphe de la partie füpérieure des
arbres. Mais c’eft par la raifon que j’ai dite, elle
fuit la route qui lui eft.tracée, quand rien ne
soppofe à l’impulfion qu elle reçoit.
Je ne parle point ici de la tranfpiration' des
plantes. Voye[ T ranspiratioist > m de la force
de la sève, pour s’élever dans les plantes. Voyeç
Seve. Mais ilfaudroit, s’il étoit poffible, fuivre
cette sève dans fes premiers momens , épier fa
route , profiter de cet inftant pour effayer des
injeélions végétales ; on apprendroit. peut-être
alors des chofes curieufes. ■ : ■ g ; - -,
Voici un fait qui me paroît remarquable. Pen-»
dant'lé tems des pleurs de la vigne , je coupai des
rameaux pleuranY, les uns avoient une longueur
de plufieurs pieds, les autres d’un feul ;
je les mis dans l’eau ; mais, dès ce moment,. ils
cefl’èrent de pleurer. Ils ne périrent pas néanmoins,
car les boutons fe. développèrent &.ils étoient
couverts de feuilles & de fleurs au commençe-
, ment de Juin. Mais ils afpirèïent très-peu d’eau ,