1 1 6 Histoire Naturelle.
qui vont toujours en diminuant vers les arêtes de la pièce;
ainfi une poutre quarrée efl compofée d’un cylindre
continu de bon bois- bien folide, & de quatre portions
angulaires tranchées , d’un bois moins folide & plus jeune.
Un barreau tiré du corps d’un gros arbre ou pris dans
une planche, efl tout autrement compofé ; ce font de
petits fogmens longitudinaux des couches annuelles, dont
la courbure ell infonfible; des fogmens qui tantôt fo trouvent
pofés parallèlement à une des forfaces. du barreau,
& tarftôt plus ou moins inclinés, des fogmens qui font
plus ou moins longs & plus ou moins tranchés, & par
conféquent plus ou moins forts ; de plus , il y a toujours
dans un barreau deux pofitions, dont l’une ell plus avan-
tageufo que l’autre, car ces fogmens de couches ligneufos
forment autant de plans parallèles. Si vous pofoz le barreau
de manière que ces plans foient verticaux, il réfiflera
davantage que dans une pofition horizontale ; c ’efl
comme fi on faifoit rompre plufieurs planches à la fois,
elles réfifleroient bien davantage étant pofoes for le côté
que for le plat. Ces remarques font déjà fontir combien
on doit peu compter for les tables- calculées , ou for les
formules que différens Auteurs nous ont données de la
force du bois, qu’ils n’avoient éprouvée que for des
pièces, dont les plus grolfes étoient d’un ou deux pouces
d’épaiffeur, & dont ils ne donnent ni 1e nombre des
couches ligneufos que ces barreaux contenoient, ni la
pofition de ces couches, ni le fons dans lequel fe font
trouyées ces couches lorfqu’ils ont fait rompre le barreau ;
circonflances cependant elfentielles, comme on le verra
par mes expériences & par les foins que je me fois donné
pour découvrir les effets de . toutes ces différences. Les
Phyficiens qui ont fait quelques expériences for la force
du bois, n’ont lait aucune attention à ces inconvéniens,
mais il y en a d’autres peut-être encore plus grands qu’ils
ont auffi négligé de prévoir ou de prévenir. Le jeune bois
ell moins fort que le bois plus âgé; un barreau tiré du
pied d’un arbre réfifte plus qu’un barreau qui vient du
fommet du même arbre ; un barreau pris à la circonférence
près de l’aubier, ell moins fort qu’un pareil morceau
pris au centre de l’arbre ; d’ailleurs le degré de defféche-
ment du bois fait beaucoup à là rélîltance, le bois vert
caffe bien plus difficilement que le bois foc. ; enfin le temps
qu’on emploie à charger les pièces pour les faire rompre,
doit auffi entrer en confidération , parce qu’une pièce qui
foutiendra pendant quelques minutes un certain poids !, ne
pourra pas foutenir ce poids pendant une heure, & j’ai
trouvé que des poutres qui avoient chacune fopporté làns
fo rompre pendant un jour entier neuf milliers, avoient
rompu au bout de cinq ou fix mois fous la charge de. lîx
milliers ,i.c’e fl-à -d ire, qu’elles n’avoient pas pu porter
pendant fix mois, les deux tiers de la chargequ elles avoient
portée pendant un jour. Tout cela prouve affez combien
les expériences que l’on a faites for cette matière!, .font
imparfaites / & peut-être cela prouve auffi qu’il n’eft pas
trop aifo .de , les bien faire.
Mes premières épreuves, qui font en très - grand