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enfin fi la police des bois n’eft pas réformée, il eft à
craindre que les forêts, cette partie la plus noble du
Domaine de nos Rois, ne deviennent des terres incultes,
& que le bois de fervice, dans lequel eonfifte une partie
des forces maritimes de l’Etat, ne fe trouve confommé
& détruit fans efpérance prochaine de renouvellement.
Ceux qui font prépofës à la conforvation des bois,
fe plaignent eux-mêmes de leur dépériffement ; mais ce
n’efl -pas aflèz de fo plaindre d’un mal qu’on reffent
déjà, & qui ne peut qu’augmenter avec le temps; il en
faut chercher le remède, & tout bon citoyen doit donner
au Public les expériences & les réflexions qu’il peut avoir
faites à cet égard. T e l a toujours été le principal objet
de l’Académie, l’utilité publique eft le but de fes travaux.
Ces raifons ont engagé feu M. de Reaumur, à nous
donner en 1 7 2 1 , de bonnes remarques for l’état des
bois du royaume. II pofo des faits inconteflables, il
offre des vues faines, & il indique des expériences qui
feront honneur à ceux qui les exécuteront. Engagé par les
mêmes motifs, & me trouvant à portée des bois, je les
ai obforvés avec une attention particulière ; & enfin animé
par les ordres de M. le comte de Maurepas, j ’ai fait
plufieurs expériences for ce fojet. Des vues d’utilité
particulière, autant que de curiofité dePhyficien, m’ont
porté à faire exploiter mes bois taillis fous mes yeux ;
j ’ai fait des pépinières d’arbres foreftiers, j ’ai femé &
planté plufieurs cantons de bois, & ayant fait toutes
ces épreuves en grand, je fois en état de rendre compte
du peu de foccès de plufieurs pratiques qui réulfiffoient
en petit’ & que lès auteurs d’Agriculture avoient recommandées.
Il en eft ici comme de tous les autres
Ar ts , le modèle qui réuffit le mieux en petit, fouvent
ne peut s’exécuter en grand.
Tous nos projets for les bois, doivent fe réduire à
tâcher de conferver ceux qui nous relient, & à renouveler
une partie de ceux que nous avons détruits.
Commençons par examiner les moyens de conforvation,
après quoi nous viendrons à ceux de renouvellement.
Les bois de forv.ice du Royaume, confident dans les
forêts qui appartiennent à Sa Majefté, dans les réforves
des eccléfiaftiques & des gens demain-morte, & enfin
dans les baliveaux que l’Ordonnance oblige de laifler dans
tous les bois.
On fait, par une expérience déjà trop longue, que
le bois des baliveaux n’eft pas de bonne qualité, & que
d’ailleurs ces baliveaux font tort aux taillis. J ’ai obfervé
fort fouvent les effets de la gelée du printemps dans
deux cantons de bois taillis voifins l ’un de l’autre. On
avoit conforvé dans l ’un tous les baliveaux de quatre
coupes focceflives, dans l’autre, on n’avoit conforvé
que les baliveaux de la dernière coupe ; j’ai reconnu que
la gelée avoit fait un fi grand tort au taillis fùrchargé
de baliveaux, que l’autre taillis l’a devancé de cinq ans
fur douze. L ’expofition étoit la même; j’ai fondé le
terrein en différens endroits, il étoit femblable. Ainfi
je nç puis attribuer cette différence qu’à l’ombre & à
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