z 6 o H i s t o i r e N a t u r e l l e .
défricher, qui non-feulement étoient de qualité à produire
de bon bois, mais même des grains de toute efpèce. Il
ne s’agiroit donc que de femer ou de planter ces terreins,
mais il faudrait que cela pût fe frire fans grande dépenfe,
ce qui ne laiffe pas que d’avoir quelques difficultés, comme
on jugera par le détail que je vais faire.
Comme je fbuhaitois de m’inftruire à fond ffir la
manière de fèmer & de planter des bois, après avoir lu
le peu que nos auteurs d’Agriculture difent ffir cette
matière, je me fuis attaché à quelques auteurs Anglois,
comme Evelyn, Miller, &c. qui me paroiffoient être
plus au fait, & parler d’après l ’expérience. J ’ai voulu
d’abord ffiivre leurs méthodes en tout point, & j’ai planté
& fèmé des bois à leur façon, mais je n’ai pas été longtemps
fans m’apercevoir que cette façon étoit ruineufè,
& qu’en ffiivant leurs confeils, les bois avant que d’être
en â g e , m’auroient coûté dix fois plus que leur valeur.
J ’ai reconnu alors que toutes leurs expériences avoient
été faites en petit dans des jardins, dans des pépinières,
ou tout au plus dans quelques parcs , où l’on pouvoit
cultiver & fbigner les jeunes arbres; mais ce n’eft point
ce qu’on cherche quand on veut planter des bois ; on
a bien de la peine à fe réfoudre à la première dépenfe
néceffaire, comment ne.ffi reffiferoit-on pas à toutes les
autres, comme celles de la culture, de l ’entretien, qui
d’ailleurs deviennent immenfes lorfqu’ on plante de grands
cantons! j’ai donc été obligé.d’abandonner ces Auteurs
& leurs méthodes, & de chercher à m’inftruire par
d’autres moyens, & j ’ai tenté une grande quantité de
façons différentes , dont la plupart, je l ’avouerai, ont été
fans fuccès, mais qui du moins m’ont appris des faits,
& m’ont mis ffir la voie de réuffir.
Pour travailler, j ’avois toutes les facilités qu’on peut
fouhaiter, des terreins de toutes efpèces, en friches &
cultivés. Une grande quantité de bois taillis, & des pépinières
d’arbres foreftiers, où je trouvois tous les jeunes
plants dont j ’avois befoin ; enfin j’ai commencé par vouloir
mettre en nature de bois une efpèce de terrein de quatre-
vingts arpens, dont il y en avoit environ vingt en friche,
& fbixante en terres labourables, produifant tous les ans
du froment & d’autres grains , même affez abondamment.
Comme mon terrein étoit naturellement divifé en deux
parties prefque égales par une haie de bois taillis , que
l’une des moitiés étoit d’un niveau fort uni, & que la
terre me paroiffoit être par-tout de même qualité, quoique
de profondeur affez inégale, je penfai que je pourrais
profiter de ces circonftances pour commencer une expérience
dont le réfoltat eft fort éloigné, mais qui fera
fort utile, c ’eft de lavoir dans le même terrein la différence
que produit ffir un bois l ’inégalité de profondeur
du fo l, afin de déterminer plus jufte que je ne l’ai fait
ci-devant, à quel âge on doit couper les bois de futaie.
Quoique j’aie commencé fort jeune, je n’efpère pas que
je puiffe me fatisfàire pleinement à cet égard, même en
me fuppofant une fort longue vie ; mais j ’’aurai au moins
le plaifir d’obferver quelque choie de nouveau tous les