néceffaire. On pourroit donc en régler les coupes à
cinquante ans dans un terrein de deux pieds & demi de
profondeur, à foixante-dix ans dans un terrein de trois
pieds & demi, & à cent ans dans un terrein de quatre
pieds & demi & au-delà de profondeur. Je donne ces
termes d’après les obforvations que j ’ai faites, au moyen
d’une tarière haute de cinq pieds, avec laquelle j’ai
fondé quantité de terreins, où j ’ai examiné en même
temps la hauteur, la grolfeur & l ’âge des arbres ; cela
fe trouvera alfez jufte pour les terres fortes & paitriffables.
Dans les terres légères & fablonneufes, on pourroit fixer
les termes des coupes à quarante, foixante & quatre-
vingts ans; on perdrait à attendre plus long-temps, &
il vaudroit infiniment mieux garder du bois de fervice
dans des magafins, que dé le laifïer fiir pied dans les
forêts, où il ne peut manquer de s’altérer après un
certain âge.
Dans quelques provinces maritimes du royaume,
comme dans la Bretagne près d’Ancenis, il y a des
terreins de communes qui n’ont jamais été cultivés, &
qui, fàns être en nature de bois, font couverts d’une
infinité de plantes inutiles, comme de fougères, de
genets & de bruyères, mais qui font en même temps
plantés d’une affez grande quantité de chênes ifolés. Ces
arbres fouvent gâtés par l’abroutiffement du bétail, ne
s’élèvent pas, ils fe courbent, ils fe tortillent; & ils
portent une mauvaife figure, dont cependant on tire
quelqu’avantage, car ils peuvent fournir un grand nombre
de pièces courbes pour la Marine, & par cette raifon
ils méritent d’être conforvés. Cependant on dégrade
tous les jours ces efpèces de plantations naturelles ; les
feigneurs donnent ou vendent aux payfans la liberté de
couper dans ces communes, & il eft à craindre que
ces magafins de bois courbes ne foient bientôt épuifés.
Cette perte forait confidérable, car les bois courbes
de bonne qualité, tels que font ceux dont je viens de
parler, font fort rares. J ’ai cherché les moyens de faire
des bois courbes, & j ’ai fiir cela des expériences commencées
qui pourront réulfir, & que je vais rapporter en
deux mots. Dans un taillis j’ai fait couper à différentes
hauteurs, favoir, à 2, 4, 6, 8, 1 o & 1 2 pieds au-deffus
de terre, les tiges de plufieurs jeunes arbres, & quatre
années enfuite j ’ai fait couper le fommet des jeunes
branches que ces arbres. étêtés ont produites ; la figure
de ces arbres eft devenue par cette double opération fi
irrégulière, qu’il n’eft pas polfible de la décrire, & je
fois perfoadé qu’un jour ils fourniront**du bois courbe.
Cette façon de courber le bois, forait bien plus fimple
& bien plus aifée à pratiquer, que celle de charger d ’un
poids, ou d’affujettir par une corde la tête des jeunes
arbres, comme quelques gens l’ont propofé (c j.
Tous ceux qui connoiffent un peu les bois, favent
(c ) Ces jeunes arbres que j’avois
fait étêter en 1734, & dont On
avoit encore coupé la principale
tranche en 1 73 7, m’ont fourni
en 1769 plufieurs courbes très-
bonnes, & dont je me fuis fervi
pour les roues des marteaux & des
foufflets de mes forges.