A l’égard des pièces courbes, il vaut mieux prendre
des arbres de brin, de la groffeur néceffaire pour faire
une feule pièce courbe, que de fcier ces courbes dans
de plus greffes pièces « celles-ci font toujours tranchées
& foibles, au lieu que les pièces de brin étant courbées
dans du fable chaud, confervent prefque toute la force
de leurs fibres longitudinales ; j’ai reconnu en faifant
rompre des courbes de ces deux efpèces, qu’il y âvoit
plus d’un tiers de différence dans leur force; que les
courbes tranchées caffoient fùbitement, & que celles qui
avoient été courbées par la chaleur graduée & par une
charge conftamment appliquée, fe rétabliffoient prefque
de niveau avant que d’éclater & fe rompre.
V I.
O n eft dans l’ufage de marquer avec un gros marteau,
portant empreinte des armes du Roi ou des fèigneurs
particuliers , tous les arbres que l’on veut réferver dans
les bois qu’on veut couper ; cette pratique eft mauvaife,
on enlève l ’écorce & une partie de l’aubier avant de
donner le coup de marteau ; la bleffure ne fe cicatrifè
jamais parfaitement &fouvent elle produit un abreuvoir au
pied de l’arbre. Plus la tige en eft menue, plus le mal
eft grand. On retrouve dans l’intérieur d’un arbre de
cent ans, les coups de marteau qu’on lui aura donnés à
vingt-cinq, cinquante & foixante-quinze ans, & tous ces
endroits font remplis de pourriture, & forment fouvent
des abreuvoirs ou des fùfées en bas ou en haut qui
gâtent le pied de l’arbre. Il vaudrait mieux marquer
P a r t i e e x p é r i m e n t a l e . 301
H• Hi
avec une couleur à l’huile les arbres qu’on voudrait
réferver, la dépenfe ferait à peu-près la même, & la
couleur ne feroit aucun tort à l’arbre, & dureroit au
moins pendant tout le temps de l’exploitation.
V I I.
O n trouve communément dans les bois deux efpèces
de chênes, ou plutôt deux variétés remarquables & différentes
l ’une de l’autre à plufieurs égards. La première
eft-lé chêne à gros gland qui n’eft qu’un à un, ou tout
au plus deux à deux fur la branche ; l’écorce de ces
chênes eft blanche & liffe , la feuille grande & large , le
bois blanc, liant, très-ferme, & néanmoins très-aifé à
fendre. La féconde efpèce porte fe s glands en bouquets
ou trochets comme les noifettes, de trois, quatre ou
cinq enfemble ; l ’écorce en eft plus brune & toujours
gerfée, le bois auffi plus coloré, la feuille plus petite,
& l’accroiffement plus lent. J ’ai obfervé que dans tous
les terreins peu profonds, dans toutes les terres maigres
on ne trouve que des chênes à petits glands en trochets,
& qu’au contraire on ne voit guère que des chênes à
gros glands dans les très-bons terreins. Je ne fuis pas
affuré que cette variété foit confiante-& fe propage par
la graine, mais j’ai reconnu après avoir femé plufieurs
années une très-grande quantité de ces glands, tantôt
indiftinélement & mêlés, & d’autres fois féparés , qu’il ne
m’eft venu que des chênes à petits glands dans les mauvais
terreins, & qu’il n’y a que dans quelques endroits de
mes meilleures terres où il fe trouve des chênes à gros
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