2o6 H i s t o i r e N a t u r e l l e .
d’autres cantons de la province, où il n’y .a point de
forges, & où les villages éloignés les uns des autres
ne font que peu de confommation, tout le menu bois
tomberait en pure perte fi 1 on n avoit trouve le moyen
d ’y remédier en changeant les procédés de l ’exploitation.
On coupe ces taillis à peu-près comme j’ai confeiilé
de couper les bois de pins, avec cette différence qu au
lieu de laiffer les grands arbres, on ne laiffe que les petits :
cette manière d’exploiter les bois en les jardinant, efl en
ufàge dans plufieurs endroits ; on abat tous les plus beaux
brins, & on laiffe fubfifler les autres, qui dix ans'après
font abattus à leur tour, St ainfi de dix ans en dix ans,
ou de douze en douze ans, on a plus de moitié coupe,
c’efl-à-dire, plus de moitié de produit. Mais cette manière
d’exploitation, quoiqu’utile , ne laiffe pas d’etre fojette à
des inconvéniens. On ne peut abattre les plus grands
arbres fans faire foufffir les petits. D ’ailleurs le bûcheron
étant prefque toujours m a l-à -l'a ile , he peut couper la
plupart de ces arbres qu’ à un demi | pied, & fouvent
plus d’un pied au-deffus de terre, ce qui fait un grand
tort aux revenues ; ces fouches élevées ne pouffent jamais
des rejetons aufft vigoureux ni en auffi grand nombre
que les fouches coupées à fleur de terre; & l ’une des
plus utiles attentions qu’on doive donner à l’exploitation'
des taillis, efl de faire couper tous les arbres le plus
près de terre qu’il efl poffible.
1 V -
L es bois occupent prefque par- tout le haut des
coteaux
coteaux & les fommets des collines & des montagnes
d’une médiocre hauteur. Dans ces efpèces de plaines au-
deffus des montagnes il fe trouve des terreins enfoncés,
des efpèces de vallons focs & froids, qu’on appelle des
combes. Quoique le terrein de ces combes ait ordinairement
plus de profondeur, & foit d’une meilleure qualité
que celui des parties élevées qui les environnent, le bois
néanmoins n’y efl jamais auffi beau, il ne pouffe qu’un
mois plus tard, & fouvent il y a de la différence de plus
de moitié dans l’accroiffement total. A quarante ans le
bois du fond de la combe ne vaut pas plus que celui
des coteaux qui l ’environnent vaut à vingt ans. Cette
prodigieufo différence efl occafionnée par la gelée qui,
tous les ans & prefqu’en toute faifon, fo fait fentir dans
ces combes, St fùpprimant en partie les jeunes rejetons,
rend les arbres raffaus, rabougris & gaileux. J ’ai remarqué
dans plufieurs coupes où l’on avoit laiffe quelques
bouquets de bois, que tout ce qui étoit auprès de ces
bouquets & fitués à l’abri du vent de nord étoit entièrement
gâté par l’effet de la gelée, tandis que tous les
endroits expofés au vent du nord n’étoient point du
tout gelés ; cette obforvation me fournit la véritable
raifon pourquoi les combes & les lieux bas dans les
bois, font fi fùjets à la gelée, & fi tardifs à l ’égard
des terreins plus élevés, où les bois deviennent très-
beaux , quoique fouvent la terre y foit moins bonne
que dans les combes ; c ’efl parce que l ’humidité & les
brouillards qui s’élèvent de la terre, féjournent dans les
Supplément. Tome I I . P p