nous avons choifi cinquante ormes qui avoient été élevés
dans une vigne, & non pas dans une pépinière touffue,
afin d’avoir des fujets dont l ’expofition fût bien décidée.
J ’ai fait, à une même hauteur, élever tous ces arbres,
dont le tronc avoit douze à treize pouces de circonférence,
& avant de les arracher, j ’ai marqué d’une petite
entaille le côté expofé au midi, enfùite je les ai fait
planter fur deux lignes ; obfervant de les mettre alternativement,
un dans la fituation où il avoit été élevé, &
i ’autre dans une fituation contraire, en forte que j ’ai eu
vingt - cinq arbres orientés comme dans la vigne, à
comparer avec vingt-cinq autres qui étoient dans une
fituation toute oppofée : en les plantant ainfi alternativement,
j ’ai évité tous les fbupçons. qui auroient pu
naître des veines de terre, dont la qualité change «quelquefois
tout d’un coup. Mes arbres font prêts à faire
leur troifième pouffe, je les ai bien examinés, il ne me
paroît pas qu’il y ait aucune différence entre les uns &
les autres; il efl probable qu’il n’y en aura pas dans la
fuite, car fi le changement d’expofition doit produire
quelque chofe, ce ne peut être que dans les premières
années, & jufqu’à ce que les arbres fè foient accoutumés
aux impreffions du foleil & du vent, qu’on prétend être
capables de produire un effet fenfible fur ces jeunes
fojets.
Nous ne déciderons cependant pas que cette attention
efl fiiperfïue dans tous les cas, car nous voyons dans
les terres légères, les pêchers & les abricotiers de haute
P a r t i e e x p é r i m e n t a l e . 307
tige, plantés en efpalier au midi, fe deffécher entièrement
du côté du foleil, & ne fubfifler que par le côté du
mur. 11 fembie donc que dans les pays chauds, fur le
penchant des montagnes, au midi, le foleil peut produire
un effet fenfible fur la partie de l ’écorce qui lui
efl expofée, mais mon expérience décide incontefla-
blement que dans notre climat & dans les fituations
ordinaires, il efl inutile d’orienter les arbres qu’on tranf-
plante; c ’efl toujours une attention de moins, qui ne
laifferoit pas que de gêner lorfqu’on plante des arbres
en alignement ; car pour peu que le tronc des arbres
foit un peu courbe, ils-font une grande-difformité quand
on n’eft pas le maître de mettre la courbure dans le fe ns
de l ’alignement.
A l ’égard de l’excentricité des couches ligneufos
vers le midi ; nous avons remarqué que les gens les plus
au fait de l’exploitation des forêts, ne font point d’accord
fur ce point. T ou s, à la vérité, conviennent de l’excentricité
des couches annuelles, mais les uns prétendent
que ces couches font plus épaiffes du côté du nord,
parce que, difent-ils, le foleil defsèche le côté du midi,
& ils appuient leur fentiment for le prompt accroiffement
des arbres des pays feptentrionaux qui viennent plus vîte,
& groffiffent davantage que ceux des pays méridionaux.
D ’autres, au contraire, & c ’efl le plus grand nombre,
prétendent avoir obfervé que les couches font plus epaiffes
du côté du midi, & pour ajouter à leur obfèrvation un
raifonnement phyfique, ils difènt que le foleil étant le
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