lxiv DISCOURS'
gaz inflammable ou hydrogène, s’échappoit dans l'eau
et ensuite dans l’atmosphère, ou, dans certaines circonstances,
parvenoit par l’oesophage et l’estomac jusqu’à
la vessie natatoire, lagonfloit, et, augmentant-la
légèreté spécifique de l’animal, facilitoit sa natation.
Nous avons parlé, à l’appui de cette opinion, du gaz
inflammable que nous avions trouvé dans la vessie
natatoire de quelques tanches.
Une conséquence de cette conjecture est que les
poissons doivent vivre dans l’eau qui contient le moins
d’air atmosphérique répandu entre ses molécules.
Le citoyen Buniva, président du conseil supérieur
de santé à Turin, vient de publier un mémoire dans
lequel il rapporte des expériences qui prouvent la vé-,
rité de cette conséquence.
Ce savant physicien annonce que des cyprins tanches,
et par conséquent des individus de l’espèce de poisson
dont la vessie natatoire nous a présenté de l’bydrogène,
ont été mis dans une eau que l’on avoit fait bouillir
pendant une demi-heure, et qui s’étoit refroidie sans
contact avec l’air atmosphérique, et qu’ils y ont vécu
aussi bien que dans de l’eau du Pô bien aérée.
Cette faculté qu’ont les branchies de décomposer
l’eau, fend plus probable la vertu que nous avons attribuée
à plusieurs autres organes intérieurs des poissons,'
et par le moyen de laquelle ces animaux peuvent altérer
ce fluide, le décomposer, se l’assimiler et s’eu
nourrir.
SUR LA PÊCHE. lxv
Ces derniers faits sont d’ailleurs prouvés par l’expérience.
On sait que l’on peut faire vivre pendant
long-temps des individus de plusieurs espèces de poissons,
en les tenant dans des vases dont on renouvelle
leau avant que des exhalaisons malfaisantes l’aient
corrompue, et cependant sans leur donner aucun autre
aliment.
A la vérité, le citoyen Buniva nous apprend dans
son mémoire que ces animalcules, si difficiles à voir
même avec une loupe, que l’on nomme infusoires, et
qui pullulent dans presque toutes les eaux, servent à
la nourriture des poissons. Mais les faits suivans, dont
nous devons la connoissance à cet habile naturaliste,
ne prouvent-ils pas 1 action directe et immédiate de
l’eau sur les organes digestifs et sur la nutrition des
espèces dont nous achevons d’écrire l’histoire?
Une dissolution de certaines substances salines dans
l ’eau qui renferme des poissons, altère et détruit les
couleurs brillantes de ces animaux.
Et de plus, une quantité de soufre mise dans quarante
huit fois son poids d’une eau assez imprégnée
de gaz funestes pour faire périr des poissons, conserve
leur vie en neutralisant ces gaz.
Nous avons vu aussi dans le premier Discours, ou
dans plusieurs articles particuliers de cette Histoire,
que les poissons supportoient sans mourir le froid des
contrées polaires, qu’ils s’y engourdissoient sous la
glace, qu ils y passoient l’hiver dans une torpeur pro-
IOME y. j