L A C L Ü P É Ë F E I N T E ’ ,
• ET
L A C L U’P É E ROUS S E *.
L e citoyen Noël , notre savant correspondant de
Rouen, nous a envoyé des notes très-intéressantes sur
cette dupée que l’on a souvent confondue avec l’alose,
et que l’on pêche dans la Seine.
La chair de la feinte, quoiqu’agréable au goût, est
très-différente de celle de l’alose. Les femelles de cette
espèce sont plus nombreuses, plus grandes, plus
épaisses, d’une saveur plus délicate, et plus recherchées,
que les mâles, auxquels on a donné un nom
-particulier, celui de cahuhau.
La feinte remonte dans la Seine comme l’alose; elle
-s’avance également par troupes : mais les habitudes
de cette espèce diffèrent de celles dé l’alose, en ce que
les plus-grands individus quittent la mer les premiers ,
1 Clupea fallax.
Serpe. -
Cahuhau (nomdontié àtfx mâle« de cfçtée espèce par les pêcheurs delà
Seine inférieure.)
a Clupea rufa.
%
au lieu que les aloses les plus petites-,les. plus maigres,
et les moins bonnes, sont celles qui se montrent les
premières dans la rivière. On a remarqué à Villequier
que ces premières .feintes, plus grosses que les autres,
ont aussi 1 oeil beaucoup plus gros;et la peau plus brunâtre;
ce qui les a fait appeler feintes au gros ail, et
feintes-noires. Elles sont non seulement plus grandes,
mais encore plus délicates que les individus qui ne paraissent
qu à la seconde-époque , et sur-tout que ceux
de la troisième, que l’on a désignés .par la dénomination
dé feintes bretonnes.
Ces feintes bretonnes ou noires, et en général tous
les poissons de l’espèce qui nous occupe, aiment les
temps 'chauds et orageux. On en fait la pêche depuis
l'embouchure de la Serne, jusqu’aux environs de Rouen.
On»les prend avec des guideaux ou avec des seines *,
qu’on appelle quelquefois feintières.
Le citoyen Noël nous assure que les feintes sont
aujourd’hui beaucoup moins nombreuses qu’ii y a
vingt ans. Il attribue cette diminution ;à la destruction
du frai de ces chipées, -occasionnée par les guideéux
du bas de la Seine, et aux qualités malfaisantes pour ces
animaux, que communique à l’eau dé ce fleuve le suint
des -moutons que l’on y lave., aux époques et dans les
endroits préférés pàr ces osseux.
* Voyez, pour Je guideau, l ’article du gade colin; et pour la seine ou
saine , celui de la raie bouclée»