Environ à six cents mètres au-dessous du pic du Ca-
nîgou dans les Pyrénées, on voit un petit sommet dont
la forme est semblable à celle d’un ancien cratere de
volcan. Ce cratère se remplit de neige pendant 1 hiver.
Après la fonte de la neigé, le fond de cette sorte d entonnoir
devient un petit lac, qui se vide par l’évaporation
, au point qu’il est à sec à l’équinoxe d’automne. On
y pêche d’excellentes truites pendant tout l’été. Celles
qui restent dans la vase, à mesure que le lac se dessèche,
périssent bientôt, ou sont dévorées par des
chouettes. Cependant l’annéèsuivantë on retrouve dans
les nouvelles eaux du cratère un grand nombre de
truites trop grandes pour être âgées de moins d’un an,
quoiqu’aucun ruisseau ni aucune source d’eau vive ne
communiquent avec le lac.
Ce fait, dont le citoyen Duchesne a bien voulu me
faire part, prouve que le cratère est placé auprès de
cavités souterraines pleines d’eau, dans lesquelles les
truites peuvent se retirer lorsque le lac se dessèche,
et qui, par des conduits plus ou moins nombreux,
exhalent dans l’atmosphère les gaz dangereux pour la
santé et même pour la vie des poissons; et dès-lors il
se trouve presque entièrement conforme à d’autres faits
connus depuis long-temps.
La truite se nourrit de petits poissons très-jeunes,
de petits animaux à coquille, de vers, d’insectes, et
particulièrement d’éphémères et de phryganes, qu’elle
saisit avec adresse lorsqu’elles voltigent auprès de la
surface de l’eau.
Il paroit que le temps du frai de la truite varie suivant
les pays et peut-être suivant d’autres circonstances.
Un habile naturaliste, le citoyenDecandolle, de Genève,
nous a écrit que les truites du lac' Léman et celles du
lac de Neufchâtel remontoient tjans le printemps, pour
frayer dans les rivières et mcmé dans les ruisseaux1. Dans
les contrées sur lesquelles Bloch a eu des observations,
ces poissons fraient dans l’automne; et dans le département
de la Corrèze, selon le tribun Pénières 2, les
truites quittent également, au commencement ou vers
le milieu de l’automne, les grandes rivières, pour aller
frayer dans les petits ruisseaux. Elles montent quelquefois
jusque dans des rigoles qui ne sont entretenues
que par les eaux pluviales. Elles cherchent un gravier
couvert par un léger courant, s’agitent, se frottent,
pressent leur ventre contre le gravier ou le sable, et y
déposent des oeufs que le mâle arrose plusieurs fois dans
le jour de sa liqueur fécondante.
Blochra trouvé, dans les ovaires d’une truite, des rangées
d’oeufs gros comme des pois, et dont la couleur
orange s’est conservée pendant long-temps même dans
‘de l’alcool.
D’après cette grosseur des oeufs des truites, il n’est
pas surprenant qu’elles contiennent moins d’oeufs que
plusieurs autres poissons d’eau douce ; et cependant *
? jNotes manuscriles données par le citoyen Decandolle.
* Notes manuscriles déjà citées•