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bizarres. La collection du Muséum d’histoire naturelle
renferme un de ces cyprins, dont la bouche n’a d’autre
orifice extérieur que ceux des branchies. Mais ces poissons
sont sujets à présenter dans leur tête., et particulièrement
dans leur museau, une difformité qui a souvent
frappé les physiciens, et qui a toujours étonné le
vulgaire, à cause dés rapports qu’elle lui a paru avoir
avec la tête d’un cadavre humain, ou au moins avec
celle d’un dauphin. Rondelet*, Gesner, Aldrovande et
d’autres naturalistes, en ont donné la figure ou la
description : on en voit des exemples dans un grand
nombre de cabinets. Le Muséum d histoire naturelle a
reçu dans le temps, de feu le président de Meslay, une
carpe qui offroit cette conformation monstrueuse,, et
que l’on avoit pêchée dans l’étang de Meslay; et le citoyen
Noël de Rouen nous a transmis un dessin d une
carpe altérée de la même manière dans les formes de
son museau , que l’on avoit prise dans un étang voisin
de Caen, et qui étoit remarquable d’ailleurs par l’uni-
fbrmité de la couleur verte également répandue sur
toute la surface de l’animal.
Mais, indépendamment de ces monstruosités et des
variétés dont nous avons déjà parlé, l’espèce de la
carpe est fréquemment modifiée, suivant plusieurs naturalistes,
par son mélange avec d’autres espèces du
genre des cyprins, particulièrement avec des carassins
* Étrange espèce de carpe. Rondelet, seconde partie , des poissons des
lacs j chap. 7.
d e s p o i s s o n s . 5a3
et des gibèles. Il résulte de ce mélange, des individus
plus gros que des gibèles ou des carassins, mais moins
grands que des carpes, et qui ne pèsent guère qu’un
ou deux kilogrammes. Gesner, Aldrovande,Schwenck-
feld, Schoneveld, Marsigli, Willughby et Klein, ont
parlé de ces métis, auxquels les pêcheurs de l’Allemagne
septentrionale ont donné différens noms. On
les reconnoit à leurs écailles, qui sont plus petites, plus
attachées a la peau, que celles des carpes, et montrent
des stries longitudinales ; de plus, leur tête est plus
grosse, plus courte, et dénuée de barbillons. Mais Bloch
pense qu’on ne voit ces dernières différences, que lorsque
des oeufs de carpe ont été fécondés par des carassins
ou par des gibèles, parce que les métis ont toujours
la tete et la caudale du mâle. Si ce dernier fait
est bien constaté, il faudra le regarder comme un des
phénomènes les plus propres à fonder la théorie de la
génération des animaux*.
* 3 rayons à la membrane branchiale du cyprin carpe.
16 à chaque pectorale.
à la nageoire *9 de la queue.