a introduites dans les proportions des organes du doré,
ainsi que toutes les nuances que ce même art a mêlées
aux couleurs naturelles de ce cyprin, et sur-tout si l’on
pense à toutes les combinaisons qui peuvent résulter
des divers mélanges de ces modifications plus on moins
importantes, on ne sera pas étonné du nombre prodigieux
de métamorphoses que le cyprin doré présente
dans les eaux de la Chine ou dans celles de l’Europe.
On peut voir les principales de ces dégradations, ou, si
on l’aimé mieux, de ces améliorations, représentées
d’une manière très-intéressante dans un ouvrage publié
il y a plusieurs années par MM. Martinet et Sau-
vigny, et exécuté avec autant d’habileté que de soin
d’après des dessins coloriés envoyés de la Chine au
ministre d’état Bertin. En examinant avec attention
ce recueil précieux, on seroit tenté de compter près
de cent variétés, plus ou moins remarquables, produites
par la main de l’homme dans l’espèce du cyprin ;
et c’est ce titre assez rare de prééminence et de domination
sur les productions de la Nature, que nous avons
cru devoir faire observer *.
Le désir d’orner sa demeure a produit le perfectionnement
des cyprins dorés; la nouvelle parure, les nouvelles
formes, les nouveaux mouvemens que leur a
donnés l’éducation, ont rendu leur domesticité plus
* Voyez le Discours intitulé 9 Des effets de l ’art de l ’homme sur la nature
des poissons.
nécessaire encore aux Chinois. Les dames de la Chine,
plus sédentaires que celles des autres contrées, plus
obligées de multiplier autour d’elles tout ce qui peut
distraire l’esprit , amuser le coeur, et charmer des loisirs
trop prolongés, se sont sur-tout entourées de ces cyprins
si décorés par la Nature, si favorisés par l’art, images
de leur beauté admirée, mais captive, et dont les évolutions
, les jeux et les amours, peuvent remplacer
dans des âmes mélancoliques la peine de l’inaction ,
l ’ennui du désoeuvrement, et le tourment de vains
désirs, par des sensations légères mais douces, des
idées fugitives mais agréables, des jouissances foibles
mais consolantes et pures. Non seulement elles en
peuplent leurs étangspmais elles en remplissent leurs
bassins, et elles en élèvent dans des vases de porcelaine
ou de crystal, au milieu de leurs asyles les plus
secrets.
Les dorés sont particulièrement originaires d’un lac
peu éloigné de la haute montagne que les Chinois
nomment l'sienking, et qui s’élève dans la province de
The-hiang, auprès de la ville de Tchanghou, vers le trentième
degré de latitude. Leur véritable patrie appartient
donc à un climat assez chaud. Mais on les a accoutumés
facilement à une température moins douce
que celle de leur premier séjour : on les a transportés
dans les autres provinces de la Chine, au Japon, en
France, en Allemagne, en Hollande, dans presque
toute l’Europe, dans les autres parties du globe; et,