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transparence. Si au contraire le Rhin est limpide et
qu’il fasse un beau soleil, ils aiment à se jouer sur la
sui’face du fleuve.
Ils pèsent souvent plus de vingt kilogrammes, et
pondent ou fécondent une très-grande quantité d’oeufs.
Leur multiplication n’est pas cependant très - considérable:
un grand nombre d’oeufs servent d’aliment à l’anguille,
à la lote, au brochet, aux oiseaux d’eau ; et une
très-petite partie des illankens qui éclosent, échappe
aux poissons voraces.
Après le frai, leur poids est ordinairement diminué
d’un tiers ou de la moitié, lorsqu’ils sont-remontés très-
haut vers les sources du Rhin. Leur chair, au lieu d’être
rouge, de bon goût, et facile à digérer, devient blanche
et de mauvais goût: aussi ne sont-ils plus, à cette
époque, les poissons les plus recherchés du lac de Constance
et du Rhin supérieur. Iis se hâtent alors de retourner
dans le lac, et se laissent aller au courant, la tête
fréquemment tournée contre ce même courant, qui les
entraîne et les délivre de la fafigue de la natation dans
le temps où ils n’ont pas encore réparé leurs forces.
Ils vivent non seulement de vers et d’insectes, mais
encore de poissons. Ils sont sur-tout fort avides de sal-
mones très-estimés dans les marchés; et les pêcheurs
du lac assurent que, dans certaines années, ils leur
causent plus de pertes qu’ils ne leur procûrent d’ayan-
tages.
Malgré leur grandeur et leurs armes, ils sont pour-
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suivis par le brochet, qui, confiant dans ses dents et dans
sa légèreté, lors même qu’il leur est très-inférieur en
grosseur, les attaque avec audace, les harcèle avec
constance, et à force de hardiesse, d’évolutions et
de manoeuvres , parvient sous leur ventre qu’il déchire.
Cependant ils trouvent bien plus souvent une perte
assurée dans les filets qu’on tend sur leur passage, particulièrement
dans le Rhin supérieur. Pour qu’ils 11e
puissent pas échapper au piège, on construit de chaque
côté du fleuve une cloison composée <& bois entrelacés.
On l’assujettit avec des pieux, et on l’étend depuis le
rivage jusque vers le milieu du courant le plus rapide.
Les deux cloisons transversales ne laissent ainsi qu’un
intervalle assez étroit. On adapte à cette ouverture un
vcrveux *, dans lequel les illankens vont s’enfermer,
mais qu’ils déchirent cependant si ce verveux n’est pas'
très-fort, ou au-dessus duquel ils parviennent souvent
à s’élancer.
Ils ont la fête moins petite que les saumons. Dès la
seconde année de leur âge, leur mâchoire inférieure se
termine par une sorte de crochet émoussé. On ne distingue
pas aisément les taches noires, alongées et inégales,
qui sont distribuées irrégulièrement sur leur
corps et sur leur queue. Les pectorales, les ventrales,
et la nageoire de l’anus, sont grisâtres; la nageoire’
* Voyez la description du verveux à l’article di, gade colin.