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pour empêcher de placer les céphales au rang des poissons
les plus hébétés, en leur attribuant, avec Pline et
d’autres anciens auteurs, l’habitude de' se croire en
sûreté , comme plusieurs animaux stupides, lorsqu’ils
ont caché leur tête dans quelque cavité, et de ne plus
craindre le danger qu’ilsmnt cessé de voir.
Les muges céphales préfèrent les courans d’eau douce
vers la fin du printemps ou le commencement de l’été :
cette eau leur convient très-bien; ils engraissent dans
les fleuves et les rivières, et même dans les lacs, quand
le fond en est de sable. On fume et on sale les céphales
que l’on a pris et qu’on ne peut pas manger frais; mais
d’ailleurs on fait avec leurg oeufs assaisbnnés de sel,
pressés, lavés, séchés, une sorte de caviar que l’on
nomme boutargue, et que l’on recherche dans plusieurs
contrées de l’Italie et de la France méridionale.
Au reste, le foie du céphale est gros ; l’estomac petit,
charnu, et. tapissé d’une membrane rugeuse facile à
enlever;.le canal intestinal plusieurs fois sinueux; le
pylore entouré de sept appendices. Ces formes annoncent
que. ce muge se nourrit non seulement de
vers et de petits animaux, mais encore de substances
végétales. Sa vessie natatoire, qui est noire comme son
péritoine, offre de grandes dimensions.
L’albule habite dans l’Amérique septentrionale.
Le crénilabe vit dans la mer d’Arabie et dans le grand
Océan. On a remarqué sa longueur de trois ou quatre
décimètres; ses écailles larges et distinguées presque
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toutes par une tache' brüne ; la grande mobilité de la
lèvre supérieure; la double carène de la mâchoire inférieure
; la tache noire de la base dés pectorales ; les
nuances vertes , bleues et blanchâtres de toutes les
nageoires.
On a observé aussi deux variétés de cétte espèce. La
première, suivant Forskaël,- est nommée our; et la seconde,
idde. L’une et l’autre n’ont qu’une carène à la
mâchoire d’en-bas : mais les ours ont des cils aux deux
lèvres ; et les tâdes n’en ont que de très-déliés, et n’en
montrent qu’à la lèvre supérieure.
Le tang, que l’on a pêché dans les fleuves de la
Guinée, a la chair gra’sse et de bon goût; la bouche
petite; l’orifice de chaque narine double; le dos brun;
les flancs blancs; les nageoires d’un brun jaunâtre,
presque de la même couleur que les raies longitudinales.
Nous avons cru devoir regarder comme une espèce
distincte des autres muges, le poisson envojé de Tran-
quebar à Bloch, par le zélé et habile missionnaire
John, et que ce grand ichthyologiste n’a Considéré' que
comme une variété du tang.
Les narines du tranquebar sont très-écartées l’une
de l’autre; les os des lèvres très-étroits;'ses dorsales'plus
basses et ses couleurs plus claires que celles du tang;
les deux côtés du museau hérissés d’une petite dentelure,
comme sur le tang et le céphale.
Les Antilles nourrissent le muge plumier. Ses deux